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Les pouvoirs locaux et régionaux face aux défis de la crise sanitaire

Le 7 décembre 2020, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux a organisé un événement en ligne pour échanger sur les défis rencontrés et les leçons tirées de la pandémie Covid-19. Les participants ont unanimement souligné la nécessité de résister aux tentatives de recentralisation, mais aussi l’urgence d’accorder aux municipalités et aux régions des ressources qui leur permettent de répondre aux besoins de la gestion de la crise au plus près des citoyens. Grâce à des approches innovantes, aux nouvelles technologies et aux bonnes pratiques que les élus locaux et régionaux ont mis en place avec efficacité et résilience, des plans d’actions sont élaborés pour servir à l’avenir.

« Avant même que l’épidémie de la Covid 19 ne soit terminée, les pouvoirs locaux et régionaux ont déjà tiré une série de leçons en tant qu’acteurs de première ligne », a souligné Mme Gunn Marit Helgesen, présidente de la Chambre des régions du Congrès. Il est essentiel d’entretenir et de gagner la confiance des citoyens – une des principales missions des pouvoirs locaux et régionaux qui doivent aussi s’assurer de la bonne coordination entre les différents niveaux de gouvernance. Le dialogue permanent entre les municipalités, les régions et le gouvernement central permet de forger des procédures démocratiques spécifiques pouvant servir lors de futures épidémies. Citant en exemple le travail de l’Association des autorités locales et régionales en Norvège (KS), Mme Helgesen a indiqué que KS a profité de mécanismes de coordination, mis en place avant l’épidémie, pour assurer la communication efficace entre les différents niveaux de gouvernance dans le pays.

Ce n’est malheureusement pas le cas pour d’autres pays où la recentralisation des compétences des gouvernements locaux et régionaux par les gouvernements centraux a eu pour résultat la dégradation de la confiance citoyenne dans les mesures sanitaires. Le maire bulgare Dilyan Mlazev a souligné que son pays souffrait déjà d’une décentralisation insuffisante avant la pandémie, mais qu’actuellement le défaut accru d’autonomie locale empêche fatalement la bonne gestion de la crise.

A l’inverse, trop de disparités entre les mesures prises par les différentes régions ou municipalités, mais aussi par les gouvernements nationaux en Europe, risquent de conduire à des flux de personnes qui voudraient bénéficier de services disponibles ailleurs (restaurants, hôtels, pistes de ski etc). Le représentant de la chambre des régions David Eray (Suisse) a expliqué que lors de la deuxième vague de l’épidémie, son pays a pu expérimenter les limites du fédéralisme et la nécessité d’une coordination nationale pour éviter les déplacements des personnes d’un canton à l’autre.

Le débat a aussi relevé l’importance du maintien des procédures démocratiques normales en temps de crise sanitaire comme la tenue régulière des conseils municipaux évoquée par Angela Constance (Royaume Uni) ou les référendums et les élections cantonales en Suisse par Marianne Hollinger (Suisse). Dans ce contexte, Atte Kaleva (Finlande) a appelé à la continuité pendant la pandémie du monitoring par le Congrès des élections locales et régionales, tandis que Cemal Bas (Turquie) a proposé la rédaction par le Congrès d’un rapport sur les pratiques politiques innovantes en temps de crise sanitaire.

Un grand nombre de participants ont déploré l’insuffisance des ressources financières dont disposent les régions et les municipalités pour adresser les besoins d’urgence générés par la crise. Présidente de la Commission des questions d’actualité du Congrès et élue de la municipalité de Munich, Gabrielle Neff a rappelé la diversité de défis organisationnels qui exigent d’importantes ressources financières et humaines de la part des municipalités : maintenir les crèches et les écoles ouvertes; gérer la résistance de certains citoyens face aux mesures de restriction (les anti-masques et autres) ; aider les entreprises locales, les artistes et les artisans à maintenir leurs emplois, adresser la fragilité psychique des jeunes en situation d’isolement etc.

En ce sens, le maire d’Athènes Kostas Bakoyannis a expliqué comment sa ville a pu « tirer profit » de la crise comme une opportunité pour réduire certaines inégalités structurelles en aidant les plus vulnérables à travers la construction d’un nouveau centre pour les SDF, un nouveau foyer pour les toxicomanes et la mise en place de lignes téléphoniques de secours citoyen. En Suède, certaines régions ont saisi l’occasion pour avancer dans le domaine de la transition écologique et le développement durable à travers des aides spécifiques aux entreprises mises en difficulté par la crise, ainsi que l’a expliqué Magnus Berntsson (Suède).

En Russie, les régions ont vu leurs compétences s’élargir pour gérer la crise en prenant en compte la situation concrète dans les territoires, non seulement en ce qui concerne les mesures de restriction, mais également pour former du personnel médical et décider du plan vaccinal, a expliqué Alexander Drozdenko (Russie). Malgré la très forte centralisation des mesures en France, Xavier Cadoret (France) a fait part de l’expérience des régions et des municipalités qui se sont aussi organisées pour la production de masques, la scolarisation des enfants du personnel médical, le soutien aux artisans et aux artistes, mais aussi la mise en place du futur dispositif vaccinal. En plus d’avoir créé la ligne téléphonique spéciale Covi Psy, le département du Bas-Rhin a aussi fourni des tablettes aux EHPAD et à certaines structures scolaires a déclaré Pascale Jurdant-Pfeiffer (France).

La « ville numérique » et la « démocratie digitale » étaient en effet au centre du débat. Beaucoup de villes ont développé leurs services en ligne ou/et lancé des plateformes de participation citoyenne. Néanmoins, Brannan McVey Heather (Ecosse) et d’autres élus ont attiré l’attention sur la nécessité de continuer à assurer aussi un contact humain et personnel avec les citoyens.

Diverses initiatives rapportées par les délégués jeunes se sont appuyées sur les outils numériques et les réseaux sociaux pour organiser des échanges entre jeunes de différents pays européens au sujet de la pandémie : entre délégués jeunes serbes et allemands qui ont également sollicité la participation des collectivités territoriales dans leurs réunions virtuelles ; dans le cadre du projet Répondre collectivement à la Covid-19 ; ou encore un projet pour aider les étudiants de Bosnie-Herzegovine qui se sont retrouvés isolés à l’étranger pendant la pandémie etc.

Le numérique s’est révélé ainsi porteur d’espoir, tout en révélant ses limites. Pour répondre aux inquiétudes liées aux éventuels abus de surveillance ou d’utilisation de l’intelligence artificielle au détriment des valeurs humanistes et démocratiques des sociétés européennes, les délégués jeunes ont proposé d’organiser une réunion paneuropéenne sur l’intelligence artificielle et la protection des droits de l’homme (Vadim Kuznetsov, délégué jeune Russie) et sur l’Europe démocratique post-covid.

 

*** « COVID-19 : les collectivités locales et régionales en première ligne » – 7 décembre 2020 ***
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