Des systèmes de santé hiérarchisés, ainsi que les différents obstacles à la participation active des patients et des professionnels de santé, peuvent entraver la prise de décisions communes. En facilitant la participation active et le partage du pouvoir et des connaissances, la littératie en santé aide à prendre des décisions sur la base d’un consentement éclairé.

Contexte

La prise de décisions partagée – professionnels de santé et patients examinent les meilleures options thérapeutiques possibles et prennent des décisions ensemble, à partir des meilleures informations disponibles – est essentielle pour le renforcement des capacités et l’autonomie des patients. Elle contribue à ce que les patients aient de réelles possibilités de choisir librement et de prendre des décisions éclairées sur les alternatives médicales et sur la gestion autonome des soins.

La prise de décisions communes sur les soins et les traitements est corrélée à des améliorations dans la qualité des décisions, dans les connaissances des patients et dans leur perception des risques. Elle peut réduire les disparités de santé entre patients dans une situation plus ou moins favorisée à l’égard du système de santé. Les soins prodigués sont plus sûrs, moins coûteux et plus efficaces lorsque les patients sont informés et peuvent exprimer leurs préférences.

Défis

La nature hiérarchisée des systèmes de santé et la méconnaissance par les patients des possibilités d’être cooptés au cours des processus décisionnels posent problème.
Des recherches européennes mettent en évidence des défis dans les relations entre patients et professionnels de santé. Au Royaume-Uni par exemple, 23 % des personnes interrogées déclarent avoir des difficultés à discuter de leurs problèmes de santé avec un professionnel de santé, 35 % n’arrivent pas à déterminer si le professionnel de santé les comprend correctement, 25 % jugent difficile de discuter avec le professionnel jusqu’à avoir correctement compris tout ce qu’ils doivent savoir, et 23 % ont du mal à poser des questions au professionnel pour obtenir des informations sur leur santé [1] . Bien que certaines de ces difficultés soient liées aux limites dans les connaissances des patients, elles peuvent aussi s’expliquer par la réticence des autorités sanitaires à redistribuer le pouvoir et les capacités d’action.

Un faible niveau de littératie en santé entraîne davantage de conflits de décisions entre patients et professionnels de santé, en partie peut-être du fait de difficultés à comprendre le niveau de risque associé à chaque traitement. De plus, une recherche européenne a montré que 43 % des adultes éprouvaient des difficultés à peser les avantages et les inconvénients des différentes options thérapeutiques [2]. En Europe, les défis afférents à une prise de décisions réellement partagée en matière de santé sont donc évidents.

S’agissant du recueil du consentement éclairé, une approche centrée sur les patients exige que les informations sur les différentes options thérapeutiques et leurs risques, avantages et coûts soient communiquées de façon claire, transparente et objective. Selon leurs expériences et préférences personnelles, les patients devraient pouvoir mettre en balance les bénéfices du traitement et ses risques probables, évitant des décisions qui n’auraient pas été prises s’ils avaient été correctement informés et impliqués.
En outre, pour améliorer la prise de décisions communes et l’adhésion au traitement, des approches différenciées sont nécessaires, selon que les personnes sont plus ou moins au fait des questions de santé (ainsi, la non-adhésion au traitement peut être involontaire chez les patients présentant un faible niveau de littératie en santé, mais volontaire chez les patients présentant un niveau élevé).

[1] Kashaf, M. S., McGill, E. T., & Berger, 2017.

[2] The Health Literacy Population Survey Project (HLS19) Consortium of the WHO Action Network M-POHL, 2021.

Actions

La littératie en santé donne aux intéressés les moyens de participer réellement à la prise de décisions. Il appartient aux systèmes sanitaires d’assurer des possibilités de prise de décisions partagée en adaptant leurs procédures aux besoins des individus, en leur permettant de s’exprimer, en tenant compte de leurs situations sociales et en collaborant avec eux sur un pied d’égalité. À cet égard, le recours à des médiateurs interculturels en santé pourrait aider à combler les écarts socioculturels, à renforcer la confiance envers les professionnels de santé et à faciliter des relations propices à la prise de décisions partagée.

Besoins individuels :

Responsabilités des systèmes de santé :
  • disposer d’informations pertinentes sur son état de santé et sur les options thérapeutiques disponibles,
  • disposer d’informations sur son droit d’être entendu et de participer aux prises de décisions qui ont une incidence sur sa santé et sur les soins prescrits,
  • déterminer et décrire ses propres attentes, préférences, souhaits et besoins,
  • examiner les informations avec un regard critique et évaluer ce qui correspond à son mode de vie (possibilités, préférences),
  • demander les clarifications nécessaires,
  • participer à l’élaboration des plans de traitement, discuter des autres options possibles et prendre des décisions communes.
  • offrir aux patients suffisamment d’informations, dans des formats pertinents,
  • encourager les patients à réfléchir et à poser des questions,
  • valoriser les patients (leurs connaissances, leurs expériences, etc.),
  • partager le pouvoir, créer un climat de confiance et de compréhension mutuelle et respecter l’avis, les attentes et les valeurs des patients, en recourant si nécessaire à des médiateurs en santé interculturels,
  • avoir conscience de la diversité des patients et de leurs besoins particuliers.

 

Bonnes pratiques

Royaume-Uni – Outils et lignes directrices pour une décision médicale partagée

 Objectif :

Dans le cadre de la « décision médicale partagée », le professionnel de santé délibère avec le patient en vue de prendre une décision acceptée d’un commun accord concernant les soins. Il implique de choisir des examens et des traitements en se basant sur des éléments de preuve scientifique et sur les préférences, croyances et valeurs personnelles du patient. 

 Groupe cible :

Les publics clés des aides à la décision du National Institute for Care and Excellence (NICE) sont les personnes confrontées à ces décisions (et leurs soignants, tuteurs et proches, le cas échéant) et les praticiens impliqués dans leurs soins. Les publics secondaires sont les organisations qui commandent ou fournissent des soins (qui peuvent inclure des aides à la décision dans les politiques et les parcours), et les organisations du secteur bénévole et communautaire (qui peuvent les promouvoir auprès des personnes avec lesquelles ils travaillent).

 Méthode :

Les points de décision sensibles aux préférences sont des points où les valeurs et les préférences de la personne sont particulièrement importantes. Ils se produisent lorsque :

-    Il existe deux options ou plus d’investigation, de traitement ou de soins qui donnent des résultats similaires, mais :

  • ils ont différents types de préjudices et d’avantages que les gens peuvent apprécier différemment, ou
  • la probabilité que les préjudices ou les avantages diffèrent, ou
  • les aspects pratiques des options sont différents (par exemple, le choix est entre la médecine et la chirurgie, ou les exigences en matière de surveillance diffèrent), ou
  • les gens peuvent considérer que les risques globaux de préjudices pour l’une des options l’emportent sur les avantages globaux par rapport à l’absence de traitement.
     

ou

-    le choix entre une option d’investigation, de traitement ou de soins et l’option « sans traitement » est finement équilibré.

Les aides à la décision NICE sont développées pour divers traitements et options de soins, ce qui contribue à :

  • résumer les meilleures preuves disponibles relatives à l’efficacité, à l’innocuité et aux facteurs pratiques liés au traitement ou aux options de soins, et
  • présenter ces informations d’une manière facile à comprendre pour les personnes confrontées à la décision (et leurs soignants, le cas échéant), avec le soutien de leur professionnel de la santé ou des soins, afin qu’elles puissent peser les avantages des options, inconvénients et compromis.
     

 Résultat :

Les aides à la prise de décision permettent de discuter et d’échanger des informations, et d’avoir la certitude que les patients ont bien compris les avantages et les inconvénients associés aux différentes options ainsi que les résultats possibles. La décision médicale partagée permet aux personnes de décider du traitement et des soins qui leur conviennent, y compris de décider de poursuivre leur traitement ou de l’arrêter.

 Intérêt :

Les outils d’aide à la décision médicale partagée permettent aux personnes de décider jusqu’à quel point elles veulent s’impliquer dans la prise de décision. Certaines préfèrent ne jouer aucun rôle actif dans la prise de décisions avec les professionnels de santé. 

 Outils et lignes directrices pour une décision médicale partagée

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Finlande - Intégration des connaissances des patients et des professionnels de santé dans la prise de décisions partagée sur les traitements

 Objectif :

A l’occasion des rendez-vous, faire en sorte que les discussions sur les traitements tiennent compte à la fois des connaissances spécialisées des professionnels de santé et des connaissances tirées de l’expérience des patients.
Il y a, en effet, une asymétrie entre les « viviers de connaissances » dans lesquels les patients et les professionnels de santé peuvent puiser. Les professionnels ont accès à des informations médicales ; les patients connaissent leur propre expérience, le monde dans lequel ils vivent : symptômes, préférences, valeurs.

 Groupe cible :

Professionnels de santé

 Méthode :

  • s’enquérir du point de vue des patients, comme leurs attentes à l’égard du traitement, qui doivent être prises en compte dans les propositions de traitement,
  • présenter plusieurs options plutôt qu’une seule alternative possible,
  • si nécessaire, recommander une option spécifique sur la base du point de vue exprimé par les patients, et expliquer pourquoi on la recommande.

 Résultat :

Les patients mettent le traitement proposé en rapport avec les solutions auxquelles ils s’attendaient et comprennent les raisons des différentes propositions.

 Intérêt :

Une telle approche donne aux patients le sentiment de peser davantage dans le choix de leur traitement, et donc les inciter à y adhérer.

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Outil

États-Unis – Modèle de parcours pour la littératie en santé

 Objectif :

Le modèle de parcours (balisé) de la littératie en santé (Health Literacy Pathway Model) expose selon quelle trajectoire la littératie en santé permet aux patients, avec l’aide d’autrui, de rechercher des informations thérapeutiques et de les utiliser pour gérer leur santé et pour devenir plus actifs dans les prises de décisions et dans leurs relations avec le système de santé.

 Groupe cible :

Les patients ayant une affection de longue durée peuvent développer, au fil du temps, des compétences en littératie et mettre ces compétences en pratique pour devenir plus actifs lors des consultations.

 Méthode :

Elle consiste à développer les connaissances, les compétences de littératie en santé et leur mise en pratique, les actions pour la littératie en santé, la capacité à rechercher différentes options et les possibilités de prises de décisions éclairées et partagées.

 Résultat :

Cette trajectoire aide à identifier les motivations et les barrières au développement et à l’application des compétences de littératie en santé tout en tenant compte des caractéristiques des patients et des professionnels de santé.

 Intérêt :

Développer le modèle de parcours de la littératie en santé aide les intéressés à s’impliquer davantage dans les processus du système de santé, y compris en prenant des décisions communes et éclairées.

Figure  : Modèle de parcours (balisé) de la littératie en santé [1]

[1] The development of health literacy in patients with a long-term health condition: the health literacy pathway model | BMC Public Health | Full Text (biomedcentral.com)

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