Retour Autonomie locale en Azerbaïdjan : quelques progrès mais il est urgent d’étendre les compétences des municipalités et de rendre leur situation financière moins fragile

Autonomie locale en Azerbaïdjan : quelques progrès mais il est urgent d’étendre les compétences des municipalités et de rendre leur situation financière moins fragile

Malgré quelques progrès dans le fonctionnement des municipalités, la situation reste préoccupante car plusieurs facteurs continuent d’entraver le développement de l’autonomie locale en Azerbaïdjan. Par exemple, les municipalités n’ont pas de véritables pouvoirs, elles ne sont pas considérées comme des institutions d’État et elles ne disposent pas de ressources propres. C’est ce que constate le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe dans son rapport de suivi, dans lequel il adresse aussi aux autorités un certain nombre de recommandations qui devraient être mises en œuvre d’urgence.

Le rapport, qui a été élaboré sur la base d’une visite effectuée à distance en février 2021, salue les progrès réalisés par Azerbaïdjan : la ratification de l’article 10.3 de la Charte, qui énonce le droit, pour les municipalités, de coopérer entre elles et avec leurs homologues d’autres États (en Azerbaïdjan, cette coopération requiert toutefois une autorisation de la part des autorités nationales) ; l’amélioration de la qualité et de la transparence du travail des municipalités ; le recours à la délégation de fonctions aux municipalités pour la première fois en 2020 ; et la représentation accrue des femmes et des jeunes dans les conseils municipaux après les dernières élections municipales de 2019.

Cependant, les municipalités azerbaïdjanaises ne sont pas considérées comme des institutions d’État ni comme faisant partie de l’administration publique générale, mais plutôt comme une expression de la société civile, et elles ne sont pas investies de compétences pleines et entières, note le Congrès dans son rapport.

« Les municipalités azerbaïdjanaises demeurent dans l’incapacité d’exercer les fonctions de base qui leur sont attribuées par la législation », regrette l’un des rapporteurs, Stewart Dickson (Royaume-Uni). Bernd Vohringer (Allemagne), l’autre rapporteur, explique : « Nous avons eu l’impression qu’en pratique, les responsabilités des municipalités sont encore plus restreintes que la loi ne le prévoit et qu’elles se cantonnent, au mieux, à l’entretien des routes et cimetières et à certains aspects de la prestation de services sociaux qui ne sont pas assurés par le gouvernement central. Dans la plupart des cas, les municipalités n’ont pas la capacité, la formation ou les connaissances nécessaires pour assumer les quelques responsabilités prévues par la loi. »

Il n’existe pas de loi portant spécifiquement sur la capitale, Bakou. Comme l’ont observé les rapporteurs, « Bakou demeure la seule capitale de la zone du Conseil de l’Europe qui ne dispose pas d’une structure de gouvernance directement élue », malgré des appels répétés de la part du Congrès à changer le système. Selon M. Vohringer, l’efficacité de l’administration de la ville de Bakou est également entravée par le fait qu’il n’existe pas de cartes de la capitale ; le manque de clarté dans les limites qui séparent les terrains appartenant à l’État et ceux appartenant à la municipalité réduit encore davantage les recettes municipales, notamment pour ce qui est des taxes et de l’affichage publicitaire. Ce problème existe également dans quelques autres villes.

Les revenus propres des municipalités azerbaïdjanaises restent largement insuffisants pour assumer les fonctions que la législation leur assigne ; les municipalités n’ont pas le pouvoir de déterminer le taux de leurs propres impôts et sont d’une manière générale dans une situation de dépendance financière vis-à-vis de l’État, comme l’explique le rapport. D’autre part, la consultation des municipalités sur les affaires les concernant n’est pas une pratique établie et n’est pas réglementée de manière détaillée dans la législation ; il reste difficile de recruter des personnels qualifiés pour les municipalités, en raison également de salaires peu compétitifs et de possibilités d’évolution limitées ; la législation dispose encore que les municipalités doivent rendre compte de leurs activités devant le Parlement ; le droit à la protection juridictionnelle est restreint et les municipalités ne s’en prévalent pas.

Enfin, les municipalités ont été totalement tenues à l’écart des actions menées dans le contexte de la pandémie de Covid-19 et leur budget a été considérablement réduit.

La recommandation adressée par le Congrès aux autorités azerbaïdjanaises les invite, entre autres, à reconnaître sans ambiguïté les municipalités en tant qu’institutions publiques exerçant leur pouvoir dans le cadre de l’administration publique générale ; modifier les lois pertinentes en veillant à ce que les compétences et responsabilités assignées aux municipalités soient pleines et entières ; adopter une loi sur le statut de la capitale et établir une autorité municipale unifiée et élue démocratiquement à Bakou ; créer un cadre législatif pour la consultation des municipalités et de leurs associations dans le processus d’élaboration de la législation les concernant ; achever le processus d’abrogation de l’obligation pour les municipalités de rendre compte de leurs activités au Parlement et adopter une loi réglementant la présentation de rapports par les municipalités ; réduire la dépendance financière des municipalités vis-à-vis de l’État en augmentant et en pérennisant leurs propres recettes ; veiller à ce que le droit à la protection judiciaire des municipalités soit garanti dans la pratique.

Enfin, les autorités nationales sont appelées, dans le cadre de la lutte contre la pandémie de COVID-19, à s’assurer que les municipalités sont impliquées et que leurs ressources financières ne sont pas affectées de manière disproportionnée.

Le Congrès décide de continuer de suivre attentivement l’évolution de la démocratie locale et régionale en Azerbaïdjan et convient d’approfondir son dialogue politique avec les autorités nationales azerbaïdjanaises dans le cadre d’un processus post-suivi, afin qu’elles se conforment aux dispositions énoncées dans la Charte européenne.

*** 40e session du Congrès (deuxième partie) ***

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40e Session Strasbourg, France 17 juin 2021
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