Image: Theme 'Health' by Pancho

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit ainsi la santé : « La santé est un état de total bien-être physique, mental et social et pas seulement l’absence de maladie ou d’infirmité. »2
Les hommes ont considérablement amélioré l’état de santé dans le monde. Nous avons appris à traiter et contrôler des maladies qui, autrefois, tuaient des millions d’individus. Nous avons amélioré l’accès à l’eau et le traitement des eaux et mis en place des systèmes complexes de soins de santé. Nos connaissances et notre expertise en matière de santé augmentent rapidement et, qui plus est, nous n’avons jamais disposé d’autant de ressources pour la santé.
Toutefois, en la matière, les progrès sont extrêmement inégaux. Un enfant né aujourd’hui en Suède peut espérer vivre plus de 80 ans ; mais il vivra moins de 70 ans s’il est né au Brésil, moins de 63 ans s’il est né en Inde et moins de 50 ans s’il est né au Lesotho. En Irlande, le risque d’une femme de décéder durant sa grossesse ou l’accouchement est de 1 pour 47 006 ; en Afghanistan, ce chiffre est de 1 pour 8. Notre espérance de vie et notre état de santé sont des données qui diffèrent massivement selon le pays où nous vivons et où nous grandissons. Ces inégalités majeures se manifestent non seulement entre les pays, mais également à l’intérieur des frontières nationales. Ainsi, à Glasgow, l’espérance de vie des hommes à la naissance est-elle de 54 ans dans le quartier de Calton et de 82 ans dans celui de Lenzie, distant de quelques kilomètres à peine. En Bolivie, la mortalité des enfants dont la mère n’a pas d’instruction est supérieure à 100 pour 1000 naissances vivantes, alors que celle des enfants dont la mère a au moins achevé l’enseignement secondaire est inférieure à 40 pour 1000. Au Royaume-Uni, les taux de mortalité des adultes dans les quartiers pauvres sont 2,5 fois plus élevés que dans les quartiers les moins défavorisés.3

La plus grande des libertés est de pouvoir échapper aux maladies évitables et à la mortalité.1
Amartya Sen

Ces inégalités flagrantes n’ont aucune explication biologique. Les différences entre les pays et à l’intérieur même des frontières d’un pays sont dues à l’environnement social dans lequel les gens naissent, vivent, grandissent, travaillent et vieillissent.5 Les inégalités sanitaires sont injustes mais évitables. La croissance économique permet d’améliorer le revenu dans de nombreux pays, mais l’augmentation de la richesse nationale ne suffit pas à elle seule pour améliorer la santé dans un pays. Faute d’une répartition équitable des avantages, la croissance nationale peut même exacerber les inégalités. L’OMS souligne que certains pays à faibles revenus comme Cuba, le Costa Rica, la Chine, l’Etat du Kerala en Inde et le Sri Lanka ont atteint des niveaux de santé satisfaisants malgré un revenu national relativement peu important6 Lutter contre les inégalités sanitaires et une question de justice sociale et de droit de l’homme.

La définition des Objectifs du millénaire pour le développement témoigne de l’engagement général envers la santé pour tous. Les gouvernements ont promis de réaliser d’ici 2015 huit objectifs relatifs à la réduction de la pauvreté. Toutefois, cet effort global sera vain sans la mobilisation active de la société civile. Les individus doivent connaître leurs droits et les obligations de leur gouvernement. Il faut exiger que les politiques économiques et sociales mises en place ou réformées par les gouvernements ne renforcent pas les inégalités sanitaires. La santé n’est pas seulement une aspiration au bien-être ; c’est un droit de l’homme.

Le droit à la santé

De nombreux instruments régionaux et internationaux consacrent le droit à la santé, et notamment la Déclaration universelle des droits de l’homme (article 25), le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (article 12), la Convention relative aux droits de l’enfant (articles 6, 24), la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (articles 10, 11, 12, 14) et la Charte sociale européenne.
Le droit à la santé ne saurait se comprendre comme le droit d’être en bonne santé : la bonne santé ne peut être garantie par un État et les États ne peuvent pas davantage assurer une protection contre toutes les causes possibles de mauvaise santé de l’être humain. Le droit à la santé doit être entendu comme le droit de jouir d’une diversité d’installations, de biens, de services et de conditions nécessaires à la réalisation du droit au meilleur état de santé susceptible d’être atteint. Il englobe, outre l’accès aux services de santé, une grande diversité de facteurs socioéconomiques de nature à promouvoir des conditions dans lesquelles les êtres humains peuvent mener une vie saine et s’étend aux facteurs fondamentaux déterminants de la santé tels que l’alimentation et la nutrition, le logement, l’accès à l’eau salubre et potable et à un système adéquat d’assainissement, des conditions de travail sûres et hygiéniques, un environnement sain et l’accès à l’éducation et l’information en matière de santé.7

Question: Tout individu devrait-il avoir droit aux traitements médicaux, indépendamment de sa situation et de ses possibilités économiques ?

Le droit à la santé de chacun doit être entendu comme le droit de jouir sans discrimination aucune d’une diversité d’installations, de biens, de services et de conditions nécessaires à la réalisation du droit au meilleur état de santé susceptible d’être atteint.

En vertu des instruments internationaux en matière de droits de l’homme, les installations et les services en matière de santé doivent être à disposition, accessibles, acceptables et de bonne qualité pour chacun, sans discrimination aucune.

En septembre 2010, le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a adopté une résolution reconnaissant l’accès à l’eau et à l’assainissement comme un droit de l’homme.

Disponibilité. Il doit exister dans chaque Etat, en quantité suffisante, des installations, des biens et des services ainsi que des programmes fonctionnels en matière de santé publique et de soins de santé.

Accessibilité. Des installations, des biens et des services en matière de santé doivent être physiquement et économiquement accessibles à chacun, sans discrimination, et il doit être possible de rechercher, de recevoir et de diffuser des informations sur les questions de santé. Par exemple, les installations de santé pour les jeunes doivent être proches de leur lieu de vie (y compris dans les zones rurales et les petites villes), et des transports publics doivent permettre de s’y rendre facilement. Les heures d’ouverture doivent être adaptées aux jeunes. Les installations de santé doivent être gratuites ou bon marché, de manière à ce que les jeunes puissent en bénéficier. Les informations en matière de santé, et notamment sur la santé reproductive et sexuelle, doivent être facilement accessibles à tous les jeunes sans discrimination.

Acceptabilité. Les installations, biens et services en matière de santé doivent être respectueux de l’éthique médicale. Les médecins et les infirmières doivent avoir reçu une formation sur la façon de s’adresser aux jeunes. L’atmosphère au sein des centres de santé doit être libre de tout jugement et de nature à soutenir les jeunes.

... Finalement, la santé ne sera pas considérée comme un bienfait souhaitable, mais comme un droit de la personne humaine pour lequel il faut se battre.
Kofi Annan

Qualité. Les installations, biens et services en matière de santé doivent également être scientifiquement et médicalement appropriés et de bonne qualité8. Par exemple, les informations en matière de santé doivent être rigoureuses sur le plan scientifique, et les services, comme les praticiens, doivent répondre à des normes de qualité.

Question:  Les demandeurs d’asile et les sans-papiers ont-ils accès aux soins de santé là où vous vivez ?

La participation

Un autre aspect important est la participation de la population, y compris les jeunes, à la prise de toutes les décisions en matière de santé aux niveaux communautaire, national et international.9 Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies explique que « Les États parties doivent prévoir à l’intention des adolescents un environnement sain et favorable leur donnant la possibilité de participer à la prise des décisions concernant leur santé, d’acquérir des connaissances élémentaires, de se procurer des informations appropriées, de recevoir des conseils et de négocier les choix qu’ils opèrent en matière de comportement dans l’optique de la santé. »10    

Les jeunes peuvent et devraient être des partenaires stratégiques dans les activités et programmes axés sur les problèmes en matière de santé. Il existe quantité d’organisations et de réseaux internationaux qui agissent en partenariat avec les jeunes sur différents thèmes de santé, dont la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, le Réseau européen des écoles en santé, le Réseau d’éducation des jeunes par les pairs, l'International Federation of Medical Students Associations (Fédération internationale des étudiants en médecine), et bien d’autres.

Le Forum européen de la jeunesse souligne également le rôle des organisations de jeunesse en tant que partenaires essentiels dans l’élaboration d’une politique de santé adaptée aux jeunes. Dans son document politique de 2008 sur la santé et le bien-être des jeunes, il est écrit : « elles [les organisations de jeunesse] sont un espace idéal pour organiser des consultations entre les jeunes, et elles sont les organes les plus représentatifs pour exprimer les préoccupations d’un large éventail de jeunes. De nombreuses organisations de jeunesse possèdent certaines compétences dans le domaine de la santé et sont donc des partenaires adéquats pour ces consultations. »11

Question: Comment pouvez-vous participer à la prise de décision en matière de santé dans votre communauté ou votre pays ?

Responsabilité

Les droits de l’homme exigent des gouvernements qu’ils soient responsables de leurs actes, et notamment qu’ils démontrent, expliquent et justifient comment ils ont satisfait à leurs obligations relativement au droit à la santé.
Les ONG et les activistes à travers le monde ont utilisé différentes méthodes pour demander des comptes relativement au droit à la santé, et notamment : des  campagnes par le biais des médias, la soumission de rapports officieux aux organes des traités internationaux, la présentation de requêtes aux tribunaux nationaux, régionaux et internationaux, la défense de la cause des droits de l’homme avant la tenue d’élections nationales et régionales et l’active participation aux initiatives de suivi.

Comment pouvez-vous mettre en oeuvre la responsabilité de votre gouvernement concernant le droit à la santé ?

Le droit à la santé et la Charte sociale européenne

En Europe, le droit à la santé est protégé par la Charte sociale européenne. Le principal article consacré au droit à la santé est l’article 11, qui fait obligation aux Etats européens de prendre des mesures pour promouvoir la santé et fournir des soins de santé en cas de maladie.

Charte sociale européenne – Article 11

En vue d’assurer l’exercice effectif du droit à la protection de la santé, les Parties s’engagent à prendre, soit directement, soit en coopération avec les organisations publiques et privées, des mesures appropriées tendant notamment:
1. à éliminer, dans la mesure du possible, les causes d’une santé déficiente;
2. à prévoir des services de consultation et d’éducation pour ce qui concerne l’amélioration de la santé et le développement du sens de la responsabilité individuelle en matière de santé;
3. à prévenir, dans la mesure du possible, les maladies épidémiques, endémiques et autres, ainsi que les accidents.

Le suivi de la Charte est assuré par le Comité européen des droits sociaux. Chaque année, le Comité examine les rapports soumis par les Etats parties et décide si la situation nationale relativement au droit à la santé et aux autres droits économiques et sociaux est conforme à la Charte sociale européenne. Qui plus est, quelques organisations européennes et les ONG nationales dont les Etats ont accepté la procédure sont habilitées à déposer des réclamations collectives.

Le Conseil de l’Europe et la santé

Un droit égal à la santé pour les plus démunis
Conseil de l’Europe, site web sur la politique de santé

En plus de l’application de la Charte sociale européenne et de son suivi constant, le Conseil de l’Europe aide les Etats membres à mettre en oeuvre une approche de « la santé et des droits de l’homme pour tous », en tenant compte des minorités et des groupes vulnérables, avec l’aide du Comité d’experts sur la bonne gouvernance pour l’équité des soins de santé. La Direction européenne de la qualité du médicament contribue à la réalisation du droit d’accès à des médicaments de qualité grâce à l’harmonisation et la coordination des normes, la réglementation et le contrôle de la qualité des médicaments, de la transfusion sanguine, de la transplantation d’organes, des substances pharmaceutiques et des soins pharmaceutiques.
Pour le domaine en pleine évolution de la bioéthique, le Conseil de l’Europe tente de trouver un équilibre entre la liberté de la recherche et la protection des individus. La Conférence européenne des comités nationaux d’éthique promeut la coopération entre les comités nationaux d’éthique dans les Etats membres et encourage le débat sur les questions soulevées par les progrès de la science biomédicale et la santé. La Convention d’Oviedo sur les droits de l’homme et la biomédecine (1997) a posé les principes fondamentaux de l’éthique biomédicale. Depuis, trois protocoles additionnels concernant l’interdiction du clonage des êtres humains, la transplantation d’organes et la recherche biomédicale sont venus compléter la Convention.

Les jeunes et la santé

Si nous, travailleurs sanitaires, enseignants, étudiants ou fonctionnaires n’avons pas le sentiment que nous, et les groupes et organisations auxquels nous appartenons, ont un quelconque pouvoir sur les politiques qui touchent à nos vies ou bien à la vie de ceux qui nous entourent, alors pourquoi se lever le matin ?
Gill Walt4

Mener une vie saine ne signifie pas la même chose pour tout le monde. D’une manière générale, on peut s’accorder pour dire qu’un mode de vie sain devrait favoriser le bien-être physique et mental. Les jeunes sont exposés à divers facteurs de risque durant l’enfance et l’adolescence, et notamment à une alimentation insuffisante, le manque d’activité et/ou les addictions ; tous ces comportements peuvent avoir des conséquences sur la suite de leur vie.
Les jeunes qui commencent à travailler très tôt sont exposés à des risques professionnels qui peuvent avoir des conséquences sur le reste de leur vie. Dans l’Europe toute entière, les jeunes courent un risque d’être blessés sur le lieu de travail supérieur d’au moins 50% à celui des travailleurs plus âgés. Ils sont aussi davantage exposés au risque de contracter une maladie professionnelle.12
La politique du Conseil de l’Europe en matière de jeunesse reconnaît également que le bien-être des jeunes est une priorité dans le cadre de son Agenda 2020. Cette vision découle d’une tendance préoccupante observée ces dernières années dans beaucoup de pays européens, à savoir l’augmentation de la consommation d’alcool, de drogue et de tabac par les jeunes, associée à une dégradation de leurs perspectives en termes d’autonomie économique et sociale.

Tabac:  Au niveau mondial, 5,4 millions d’individus meurent chaque année du tabac – plus que du VIH/sida, de la malaria et de la tuberculose combinés. En Europe, le tabac est responsable de jusqu’à 21% des décès. En moyenne, 24 % des jeunes de 15 ans fument chaque semaine13.

Question: Faudrait-il rendre le tabac illicite ?

Alcool: Selon l’OMS, la consommation d’alcool en Europe représente le double de la moyenne mondiale. L’alcool est le second plus important facteur de risque de décès et de handicap chez les adultes, et le plus important facteur de risque pour les jeunes. En Europe, l’alcool est responsable de 618 000 décès par ans. La consommation excessive d’alcool contribue non seulement à des maladies, mais également à une diminution de la productivité dans les cadres éducatifs et sur le lieu de travail, à des comportements criminels et violents.14

ACTIVE - Sobriety, Friendship and Peace - est une organisation européenne qui rassemble des jeunes qui ont décidé de vivre dans la sobriété et partagent la vision d’un monde démocratique, pluriel et pacifique, libre de l’alcool et d’autres drogues, et où chacun peut exploiter son plein potentiel.
www.activeeurope.org

Drogues: Selon l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, entre 155 et 250 millions d’individus de par le monde, ou entre 3,5 et 5,7% de la population des 15-64 ans, a consommé des drogues illicites au moins une fois en 2009. Les consommateurs de cannabis sont les plus nombreux consommateurs de drogues illicites ; toutefois, en termes d’effets nocifs, les opiacés sont en tête de liste.15

Question: Savez-vous quelles sont les conséquences pour les jeunes d’une consommation excessive d’alcool et de drogues illicites ?

Obésité: Selon l’OMS, 30 à 80% des adultes en Europe et environ 20% des enfants et des adolescents sont en surpoids, et 7% sont obèses.16 L’obésité génère des risques de maladies cardio-vasculaires, de diabète, de problèmes orthopédiques et de troubles mentaux. Les rapports indiquent que la discrimination, le harcèlement et l’intimidation peuvent être à la fois les causes et les effets de la prise de poids.17

Il est facile de dire que les individus portent l’entière responsabilité de leur santé et donc que s’ils décident de fumer, de consommer des aliments malsains ou des drogues, c’est leur choix. Culpabiliser la victime est une attitude répandue pour « résoudre » les comportements malsains et, malheureusement, cette approche est appliquée dans les programmes et politiques de santé de nombreux pays européens. Les spécialistes de la santé publique affirment que, si une politique de santé ignore les inégalités existantes et ne s’intéresse qu’à l’éducation et l’information en matière de santé, beaucoup d’individus ne seront pas en mesure de réaliser leur droit à la santé. Par exemple, un rapport de l’OMS sur l’obésité en Europe montre que les enfants issus de familles socio-économiquement défavorisées et peu instruites choisissent des aliments moins sains que les enfants issus de familles plus éduquées et plus favorisées sur le plan socio-économique.18

Question:Selon vous, pourquoi les groupes les plus nantis de la société seraient-ils moins enclins à manger des aliments mauvais pour la santé ou à souffrir de toxicomanie ?

Les valeurs et objectifs de vie idéalisés par la société et promus par les médias de masse sont peut-être également responsables de comportements préjudiciables pour la santé. Les sociétés industrialisées occidentales valorisent de plus en plus la réussite financière, la popularité, le pouvoir, le prestige, le statut social et le consumérisme. Les campagnes publicitaires incitent les jeunes à avoir d’eux-mêmes une image médiocre s’ils ne possèdent pas tel ou tel nouveau gadget, tel vêtement à la mode, s’ils ne consomment pas une nouvelle boisson ou s’ils n’ont pas la coiffure ou le corps parfait vus à la télévision. L’énorme pression que sont l’apparence et la possession de nouveautés influent sur la santé physique et mentale des jeunes. L’OMS a identifié le harcèlement, la médiocre estime de soi, les pressions sociales, les difficultés à gérer le stress et la présentation de la maigreur sous un jour séduisant par les médias de masse comme des facteurs de risque dans l’apparition de troubles de l’alimentation comme l’anorexie et la boulimie.19

Interdiction des mannequins taille zéro

En 2006, la Madrid Fashion Week a interdit de défilé les mannequins en déficit pondéral et, tout de suite après, Milan a suivi cette initiative. Des organisations de santé et des groupes de la société civile ont fait campagne afin que d’autres villes suivent ce mouvement, avec un succès limité. L’interdiction espagnole est la conséquence du décès de deux jeunes modèles en Amérique du Sud, mortes de sous-alimentation et d’anorexie.20

La santé reproductive et sexuelle

La santé reproductive et sexuelle couvre des questions sensibles et controversées pour les jeunes, leurs familles et les professionnels de santé. En la matière, les adolescents et les jeunes sont confrontés à de nombreuses difficultés. À cause de la puberté et d’un rapide développement psychologique, les jeunes sont vulnérables aux pressions de la société et de leurs pairs, avec le risque d’adopter des comportements préjudiciables pour leur santé et des comportements sexuels dangereux. Dans beaucoup de sociétés, la sexualité des adolescents est un sujet à controverse et la question se pose de savoir si les jeunes doivent bénéficier d’une éducation sexuelle en dehors de la famille, ou si les moins de 18 ans doivent recevoir des conseils et des traitements anonymes sans l’autorisation de leurs parents. La santé reproductive et sexuelle concerne les femmes et les hommes de façons différentes.

Question: Quelles sont les perceptions dans votre pays qui pourraient avoir une influence négative sur la santé reproductive et sexuelle des jeunes ?

La santé reproductive et sexuelle en chiffres

Toutes les minutes dans le monde, au moins une femme meurt en couches ou de complications liées à la grossesse, soit 529 000 femmes par an.21
Selon l’UNFPA, au moins 200 millions de femmes dans le monde voudraient utiliser, mais ne le font pas faute d’accès, des méthodes de planning familial sûres et efficaces.
Chaque année, plus d’un quart des femmes qui se retrouvent enceintes avortent. La plupart de ces avortements s’effectuent en secret et dans des conditions de médiocre sécurité.22
Selon une évaluation conduite en 2008, 33,4 millions d’individus vivent avec le VIH/sida, en grande majorité dans les pays à moyens et faibles revenus.23 Les jeunes (15-24 ans) représenteraient 40% des nouvelles infections par le VIH dans le monde.

La maladie devient une violation des droits de l’homme dès lors qu’elle résulte du manquement d’un État à respecter, protéger ou remplir ses obligations en matière de droits de l’homme.24 Nos Etats ont l’obligation de faire tout ce qui leur est possible pour nous protéger de la maladie, y compris au moyen de mesures comme l’éducation en matière de santé reproductive et sexuelle, de conseils appropriés, de services de soins de santé accessibles et de bonne qualité, ainsi que de programmes pour lutter contre la stigmatisation, la discrimination et les pratiques culturelles dangereuses.

K.L. c. Pérou et droit à ne pas subir de traitements inhumains et dégradants

K.L., une jeune fille de 17 ans, était enceinte d’un foetus présentant une anencéphalie (absence totale ou partielle du cerveau, impliquant que l’enfant ne va pas survivre à la naissance ou mourir dans les quelques heures ou jours qui suivent). Bien que la loi péruvienne sur l’avortement autorise l’avortement lorsque la vie ou la santé de la mère est en danger, la jeune femme n’a pas été autorisée à avorter et a dû mettre au monde l’enfant et le nourrir durant les quatre jours où il a survécu.
En 2005, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies a estimé que le Pérou avait violé le droit de la jeune femme à ne pas subir de traitements cruels, inhumains et dégradants (article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques), ainsi que son droit à la vie privée (article 17). Le Comité a par ailleurs estimé que l’État aurait dû lui fournir pendant et après sa grossesse le soutien psychologique et médical nécessaire dans ces circonstances.25

La santé mentale

Selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la santé mentale est « un état de bien-être permettant à chacun de reconnaitre ses propres capacités, de se réaliser, de surmonter les tensions normales de la vie, d’accomplir un travail productif et fructueux et de contribuer à la vie de sa communauté. »26
Selon l’OMS, un jeune sur quatre dans le monde est susceptible d’être affecté de troubles mentaux ou neurologiques à un moment de sa vie.27 Les jeunes sont particulièrement exposés au risque de développer des troubles de santé mentale tandis qu’ils passent de la dépendance à l’indépendance ou à la vie adulte. Les nouvelles pressions et les changements comme la puberté, les nouvelles relations, le fait de quitter le toit familial pour la première fois, l’instabilité financière, l’anxiété liée au travail ou aux études peuvent générer des niveaux élevés de stress qui peuvent conduire à des troubles mentaux. Plusieurs de ces troubles, comme la dépression, la schizophrénie, les troubles de l’alimentation et l’abus de substances toxiques démarrent à un âge précoce.28 Par ailleurs, le suicide est la deuxième cause de décès chez les enfants et les jeunes de 10 à 24 ans dans le monde entier.

Les maladies et les souffrances
non nécessaires endurées par les personnes défavorisées, dans les pays riches comme dans les pays pauvres, sont la conséquence de notre gestion des affaires publiques.
Michael Marmot30

Seulement 10 à 15% des jeunes affectés par des troubles mentaux bénéficieraient de l’aide de professionnels.29 Par conséquent, outre garantir l’accès aux services de santé mentale, il faudrait informer le grand public au sujet des aides professionnelles disponibles et lutter contre la stigmatisation et les stéréotypes qui empêchent les jeunes de solliciter une assistance.

Question: Savez-vous où un jeune est susceptible de bénéficier de soins de santé adaptés là où vous vivez ?

Pauvreté et accès aux médicaments

Les dépenses de santé publique dans les pays à hauts et faibles revenus bénéficient essentiellement aux riches plutôt qu’aux pauvres. Plus de 90% de la production mondiale de substances pharmaceutiques est consommée par seulement 15% de la population mondiale. Par exemple, entre 1975 et 2004, 1556 nouveaux médicaments ont reçu l’autorisation de mise en marché au plan mondial. Toutefois, seulement 20% avaient été développés spécifiquement pour soigner les maladies tropicales et la tuberculose, alors que ces maladies constituent 11,4% de la charge que représente la maladie à l’échelle mondiale.31 Les maladies tropicales comme la malaria, la lèpre, la maladie de Chagas et d’autres font partie de ce qu’on appelle les « maladies négligées » : bien qu’elles touchent plus d’un milliard d’individus dans le monde, elles ne sont guère prises en compte car elles affectent les communautés les plus pauvres et les plus marginalisées.32  On estime également que, dans les pays en développement, les patients doivent payer de leur propre poche 50 à 90% des médicaments dont ils ne peuvent se passer.

Chaque année, plus de 100 millions d’individus sombrent dans la pauvreté parce qu’ils doivent payer leurs frais de santé..33

Quelque 2 milliards d’individus dans le monde n’ont pas accès aux médicaments essentiels. Le coût élevé des médicaments est l’une des principales raisons pour laquelle les personnes démunies ne peuvent se procurer les médicaments nécessaires. Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à la santé affirme qu’améliorer l’accès aux médicaments existants pourrait sauver 10 millions de vies par an.34

Les médicaments génériques

L’une des meilleures façons de réduire les prix et d’améliorer l’accès aux médicaments serait d’autoriser et de promouvoir les médicaments génériques. Une substance générique est la copie d’un produit pharmaceutique de marque. Les génériques ont la même efficacité, la plus grande différence étant le prix. Il est moins cher de produire des génériques parce que les fabricants n’ont pas à couvrir les coûts liés à l’invention du médicament ainsi qu’aux lourds tests cliniques de sécurité et d’efficacité. Du fait de leur faible prix, les médicaments génériques sont souvent les seuls que peuvent se procurer les personnes qui vivent dans la pauvreté.
L’industrie pharmaceutique affirme que les médicaments génériques diminuent ses profits et, en conséquence, sa capacité à investir dans la recherche et le développement de nouveaux médicaments. Pour aider les entreprises qui découvrent de nouveaux médicaments à récupérer l’argent investi et leur permettre de profiter de leur découverte, elles ont l’assurance d’obtenir un brevet. Un brevet ou un droit de propriété intellectuelle est un ensemble de droits exclusifs accordés par un État à l’inventeur pour fabriquer, utiliser, vendre et proposer de vendre ou importer son invention. Le brevet est généralement valable pour 20 ans et, durant cette période, d’autres entreprises ne peuvent produire, vendre, proposer de vendre ou importer la substance brevetée.

Question: L’industrie pharmaceutique a-t-elle des responsabilités en termes de droits de l’homme ?

Les questions de propriété intellectuelle génèrent de fortes tensions entre le Nord et le Sud. Les pays développés revendiquent le droit de leur industrie pharmaceutique à faire breveter ses produits. Les pays en développement affirment que les normes internationales en termes de propriété intellectuelle font obstacle à leur développement parce qu’ils ne sont pas préparés ou équipés à bénéficier de ces normes. L’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), entré en vigueur en 1995, est administré par l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Cette législation a eu un impact majeur sur la production de médicaments génériques. Ainsi, les pays en voie de développement se sont vus octroyer une période de transition et ont été autorisés à continuer à produire des médicaments génériques jusqu’en 2000 ; les pays les moins développés ont bénéficié d’une période de transition qui court jusqu’à 2016 pour les brevets pharmaceutiques et les informations confidentielles.35

L’impact des droits de propriété intellectuelle sur le droit à la santé

La conséquence de l’Accord sur les ADPIC est que les nouveaux médicaments, plus efficaces, ne sont disponibles que dans les pays qui ont la capacité d’en couvrir le coût élevé. […] Le sentiment est que, si la possibilité existe de fournir au monde en développement des traitements génériques efficaces et pourtant peu chers contre le sida, alors il est immoral de ne pas autoriser la production de médicaments susceptibles de sauver des millions de vies.36
AVERT – organisation caritative internationale engagée contre le VIH/sida (www.avert.org)
Selon Médecins Sans Frontières (MSF), beaucoup de pays en développement se voient contraints d’appliquer des conditions plus restrictives que ne l’exige l’Accord sur les ADPIC à leur législation sur les brevets. En effet, même s’ils ne sont pas obligés par le droit international de renforcer leur législation en la matière, ils n’ont bien souvent pas le choix dans la mesure où les clauses de restriction font partie des accords commerciaux signés avec les États-Unis ou l’Union européenne.37
En réaction aux négociations sur l’accord de libre-échange entre l’UE et les pays d’Asie et d’Amérique latine, MSF a lancé une campagne intitulée « Europe, touche pas à mes médicaments ! ». Pour plus d’informations sur la campagne, voir: www.msfaccess.org

Notes

1 Amartya Sen, "Health in Development," Bulletin de l’Organisation mondiale de la santé (1999): 77:620.
2  Préambule de la Constitution de l’Organisation mondiale de la santé, telle qu’adoptée par l’Assemblée mondiale de la santé, New York, 19-22 juin 1946; signée le 22 juillet 1946 par les représentants de 61 Etats (Official records of the World Health Organization, n° 2, p. 100) et entrée en vigueur le 7 avril 1948.
3Commission des déterminants sociaux de la santé, Combler le fossé en une génération: Instaurer l’équité en agissant sur les déterminants sociaux de la santé. Rapport final (WHO: 2008).
4 Gill Walt, Health Policy: an introduction to process and power, p. 10.
5 Communiqué de presse, http://www.who.int/mediacentre/news/releases/2008/pr29/fr/index.html
6 ibid. 
7Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Observation générale n° 14, Le droit au meilleur état de santé susceptible d’être atteint (22e session, 2000). Pour le texte, voir U.N. Doc. E/C.12/2000/4 (2000): A Compilation of General Comments and General Recommendations Adopted by Human Rights Treaty Bodies, U.N. Doc. HRI/GEN/1/Rev.6 at 85 (2003).
8 Observation générale n° 14, supra, n° 7, par. 12. 
9 Observation générale n° 14, supra, n° 7, par. 11.
10 Observation générale n° 14, supra, n°.7, par. 23.
11Forum européen de la jeunesse, 2008, Document politique: « La santé et le bien-être des jeunes »
12 http://osha.europa.eu/en/priority_groups/young_people
13 http://www.euro.who.int/en/what-we-do/health-topics/disease-prevention/tobacco/facts-and-figures
14 Organisation mondiale de la santé (OMS) (2010) Best practice in estimating the costs of alcohol – Recommendations for future studies
15 Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC) (2010), Rapport mondial sur les drogues 2010 (anglais).
16OMS (2007) The challenge of obesity in the WHO Europe region and the strategies for the response (Le défi de l’obésité dans la région européenne de l’OMS et les stratégies de lutte), p. 1. (rapport en anglais uniquement)
17 OMS (2007) The challenge of obesity in the WHO Europe region and the strategies for the response, p. 158.
18 OMS (2007) The challenge of obesity in the WHO Europe region and the strategies for the response, p.
19 OMS (2004) Prevention of mental disorders: effective intervention and policy options.
20 http://www.telegraph.co.uk/news/uknews/1540595/Fashion-leaders-refuse-to-ban-size-zero-models.html
21 http://www.who.int/research/en/
22 Fonds des Nations Unies pour la population; http://www.unfpa.org/rh/planning.htm
23 http://www.who.int/research/en/
24 Paul Hunt, Judith Bueno de Mesquita. (2005) The Right to Sexual and Reproductive Health, Université d'Essex.
25 K.L. v. Peru, Communication No. 1153/2003, U.N. Doc. CCPR/C/85/D/1153/2003, 2005.
26  OMS (2005) Promoting Mental Health: Concepts, Emerging evidence, Practice: A report of the World Health Organization, Department of Mental Health and Substance Abuse in collaboration with the Victorian Health Promotion Foundation and the University of Melbourne. World Health Organization. Organisation mondiale de la santé. Genève.
27 OMS (2001) Mental Health: New Understanding, New Hope.
28 OMS (2010) Mental Health Promotion in Young People – an Investment for the Future.
29 OMS (2010) Mental Health Promotion in Young People – an Investment for the Future.
30 Marmot, M. Health in an unequal world. Lancet, (2006) p. 2,081.
31 http://www.dndi.org/index.php/media-centre.html?ids=6 
32 http://www.who.int/neglected_diseases/en/
33 Rapport « Promotion et protection de tous les droits de l’homme, civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, y compris le droit au développement », 31 mars 2009, A/HRC/11/12.
34 Report of the Special Rapporteur on the right of everyone to the enjoyment of the highest attainable standard of physical and mental health, 11 août 2008, A/63/263, p.15.
35 http://www.wto.org/english/thewto_e/whatis_e/tif_e/agrm7_e.htm
36 http://www.avert.org/generic.htm
37 http://www.msfaccess.org/main/access-patents/introduction-to-access-and-patents/trips/going-beyond-trips-trips-plus-provisions/