Retour Le Comité anti-torture du Conseil de l'Europe (CPT) publie un rapport relatif à sa visite ad hoc de 2022 en République de Moldova

Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) publie aujourd'hui un rapport critique sur la situation dans les prisons moldaves faisant suite à sa visite ad hoc effectuée dans le pays en décembre 2022.
Le Comité anti-torture du Conseil de l'Europe (CPT) publie un rapport relatif à sa visite ad hoc de 2022 en République de Moldova

L’objectif principal de la visite était de réexaminer le traitement et les conditions de détention des personnes incarcérées. A cette fin, le CPT s’est rendu à la Prison n° 4 de Cricova, à la Prison n° 13 de Chișinău et à la Prison n° 18 de Brănești. Une attention particulière a été accordée à l'évaluation des progrès réalisés par les autorités moldaves en matière de lutte contre la violence et l'intimidation entre détenus.

Bien que la grande majorité des personnes avec qui la délégation s’est entretenue n'ont pas fait état d’allégations de mauvais traitements infligés par le personnel, le rapport souligne toutefois que le phénomène de la hiérarchie informelle entre détenus et les actes de violence et d’intimidation qui en résultent n’ont pas été résolu et que les prisons ne parviennent toujours pas à assurer un environnement sûr aux personnes incarcérées. Une fois de plus, un grand nombre de personnes détenues en prison ont décrit à la délégation l'atmosphère générale où règne intimidation et violence engendrées par les chefs informels de la prison et par leur entourage.

La situation des personnes considérées comme "humiliées" ou "intouchables", c'est-à-dire celles appartenant à la "caste" la plus basse de la hiérarchie informelle des détenus, demeure très préoccupante et le CPT estime qu'elle pourrait être considérée comme constituant une violation continue de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme.

De l’avis du CPT, cette situation insatisfaisante dans les prisons est liée directement à un certain nombre de facteurs, notamment le manque chronique de personnel de surveillance, la dépendance envers les chefs informels des détenus pour contrôler la population carcérale et l’existence de dortoirs d’une capacité d’hébergement élevée. En même temps, aucune véritable évaluation des risques et des besoins des personnes n’est effectuée à leur admission en prison ni de catégorisation des personnes permettant d’identifier dans quelle prison, bloc ou cellule elles devraient être placées.

À la lumière de ces constatations, le Comité appelle une fois de plus les autorités moldaves à lutter avec détermination et sans plus attendre contre le phénomène de hiérarchie informelle dans les prisons et à prévenir les actes de violence et d'intimidation entre détenus dans l'ensemble du système pénitentiaire.

Les conditions matérielles observées dans les établissements visités étaient généralement mauvaises, de nombreuses cellules/dortoirs étaient délabrés, sales et mal équipés. Le CPT a également constaté qu’un certain nombre de cellules et dortoirs des prisons de Chișinău et de Cricova étaient surpeuplés. La délégation a en outre remarqué une répartition étonnamment inégale des détenus au sein des établissements visités, une situation étroitement liée au phénomène de hiérarchie informelle des détenus ; certains détenus privilégiés disposaient de chambres spacieuses, voire de petits appartements composés de plusieurs pièces, disposant d’équipement variés et divers. Le CPT recommande, entre autres, que les détenus soient équitablement répartis dans les cellules/dortoirs et qu’ils disposent d'au moins 4 m² d'espace vital par personne et que toutes les cellules/dortoirs soient maintenus dans un état d'entretien et d'hygiène adéquat et qu’ils soient convenablement équipés.

Malgré les efforts déployés dans les prisons de Brănești et de Cricova pour proposer aux détenus un travail et quelques autres activités, il n'en reste pas moins qu’une grande partie d'entre eux ne participait à aucune activité motivante. La situation était encore plus problématique pour les prévenus adultes de la prison de Chișinău, qui restaient enfermés dans leurs cellules jusqu'à 23 heures par jour. Le fait que les mineurs placés en détention provisoire dans cet établissement étaient soumis à un régime tout aussi appauvri est particulièrement préoccupant.

Le CPT a pris note des efforts entrepris par le personnel en place pour dispenser des soins de santé de bonne qualité aux personnes détenues dans les prisons, ainsi que pour procéder à un examen médical des personnes nouvellement admises et pour consigner et signaler les blessures détectées à l’admission ou durant l’incarcération. Toutefois, les effectifs du personnel de santé étaient faibles et le fait qu’aucun médecin généraliste ne soit présent dans les prisons de Brănești et de Cricova est particulièrement préoccupant.

Le rapport a été rendu public dans le cadre de la procédure de publication automatique mise en place par les autorités moldaves.

 

13/09/2023
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