Le CPT publie aujourd’hui le rapport relatif à sa 5ème visite périodique effectuée du 2 au 12 décembre 2019 en Arménie ainsi que la réponse du gouvernement arménien. Ces deux documents sont rendus publics à la demande des autorités arméniennes.
Le Comité indique que la majorité des personnes avec lesquelles la délégation s’est entretenue, qui étaient ou avaient récemment été placées en garde à vue, affirment avoir été traitées correctement par la police. La délégation du CPT n’a en outre recueilli aucune allégation crédible concernant des mauvais traitements physiques qui auraient été récemment infligés par le personnel dans les six établissements pénitentiaires visités.
Malheureusement, le Comité se doit de conclure que la violence entre détenus, les intimidations et les vols demeurent des problématiques présentes dans la plupart des prisons visitées et qu’elles sont clairement liées à l’influence persistante d’une hiérarchie carcérale informelle. Le Comité appelle les autorités arméniennes à redoubler d’efforts pour lutter contre les phénomènes de violence et d’intimidations entre détenus.
Le Comité se félicite du fait que les autorités arméniennes aient en projet de fermer, d’ici à la fin de 2022, plusieurs établissements pénitentiaires vétustes (Goris, Hrazdan, Noubarachen, Erevan-Kentron, ainsi que l’hôpital pénitentiaire central) où les conditions matérielles fluctuent entre des conditions médiocres et à peine acceptables et de les remplacer par de nouveaux établissements (ou quartiers) pénitentiaires construits intégralement conformément aux critères internationaux actuels.
Le Comité accueille aussi favorablement la réforme en cours au sein des services de santé pénitentiaire et la création d’un centre de médecine pénitentiaire (CMP), un organisme public non commercial chargé de dispenser les soins de santé dans les prisons ; cependant, il reste préoccupé par le fait que de nombreux détenus se plaignent encore d’un accès insuffisant aux soins médicaux spécialisés.
Le Comité est également préoccupé par l'insuffisance des effectifs constatée quelle que soit la discipline, à divers degrés, dans les trois hôpitaux psychiatriques visités. La situation à Syunik Marz est particulièrement préoccupante, car elle menace la viabilité du dispensaire de Syunik et du service régional de soins ambulatoires. En outre, le personnel clinique pluridisciplinaire est soit totalement inexistant, soit en nombre insuffisant pour répondre aux multiples besoins des patients en matière de prise en charge psychosociale et de réadaptation.
À l'instar des constatations faites lors des visites précédentes, le Comité note avec une profonde inquiétude qu'un certain nombre de patients légalement compétents ayant signé des formulaires de consentement à l'hospitalisation et étant toujours considérés comme volontaires, ne consentent néanmoins pas réellement à leur hospitalisation, déclarant qu'ils veulent partir mais que souvent ils ne sont même pas autorisés à pratiquer de l'exercice en plein air, et encore moins à quitter l'hôpital ; ils sont de fait privés de liberté. Le rapport indique qu'au Centre de soins psychiatriques d'Armash, la délégation du CPT a été informée que saisir le tribunal pour obtenir une autorisation d'hospitalisation sous contrainte « serait toute une histoire » et qu’« une hospitalisation avec consentement exigeait la signature du formulaire de consentement ».
Le CPT est impressionné par les efforts déployés pour assurer des soins individualisés aux résidents du foyer social pour personnes présentant des troubles mentaux de Dzorak, ainsi que par la gamme d'activités professionnelles et récréatives psychosociales structurées et multidisciplinaires ; ceci est particulièrement louable compte tenu des difficultés rencontrées par manque de personnel.
Le Comité encourage les autorités arméniennes à poursuivre leurs efforts en faveur du développement de logements sociaux de proximité et de services d’accueil de jour afin d’écourter ou d'éviter les séjours en institution et d'améliorer les expériences et les résultats pour les bénéficiaires de ces services, et ainsi leur permettre de se réinsérer convenablement dans la société.
Dans leur réponse, les autorités arméniennes fournissent des informations relatives aux mesures prises pour répondre aux questions soulevées par le CPT. Elles font notamment référence à l'adoption imminente d’un nouveau Code pénal, d’un nouveau Code de procédure pénale et d’un nouveau Code pénitentiaire, qui devraient remédier à un certain nombre de lacunes et renforcer davantage la protection des droits humains. Elles réitèrent les projets de replacement d’un certain nombre d’anciennes prisons par de nouvelles prisons modernes. Il est également fait référence à la nouvelle législation qui pénalise l'appartenance à une culture criminelle informelle et à un certain nombre de mesures à prendre pour lutter contre le phénomène dans les prisons. Des informations sont également fournies sur l'adoption d'une nouvelle loi relative à l'assistance et aux soins psychiatriques modifiant les procédures d'hospitalisation sous contrainte et de traitement obligatoire.
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- Le CPT et l'Arménie