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D’un point de vue juridique, l’octroi de la citoyenneté à un migrant revient à conférer à ce dernier les mêmes droits et devoirs que tout autre citoyen de ce même pays. Par conséquent, il importe d’informer les migrants, le plus tôt possible, des recours existants et des exigences spécifiques en matière de résidence à long terme et de citoyenneté, et de les rendre transparents aux yeux de ceux qui souhaitent obtenir un titre de séjour ou la citoyenneté. Les conditions d’octroi varient selon les pays en ce qui concerne, par exemple, la durée de séjour légal ou le degré de participation à la société, de maîtrise de la langue et de connaissance de la société d’accueil. Ces conditions, parfois excessives, et la longueur des délais d’attente, peuvent dissuader bon nombre de migrants de demander la citoyenneté de leur pays d’accueil.

Le débat en cours sur l’intégration, et la tendance croissante, dans un certain nombre de pays, à introduire des mesures ou critères spécifiques sont l’occasion d’engager un véritable dialogue public et d’attirer l’attention sur le caractère fondamental de la « citoyenneté » et sur son rôle en tant que facteur facilitant l’ intégration, cette dernière étant un processus à double sens, dans lequel les citoyens du pays hôte et les migrants ont tous un rôle et des responsabilités. Il s’agit donc d’aller au-delà des aspects juridiques de la citoyenneté (qui sont abordés dans des instruments internationaux spécifiques, notamment ceux du Conseil de l’Europe) et de considérer la notion plus large de « participation », qui est liée à l’exercice de la citoyenneté démocratique active.

S’appuyant sur l’expérience acquise lors de l’Année européenne de la citoyenneté par l’éducation (2005) et sur les travaux intensifs qu’il a menés sur une approche de la participation à la vie civique qui soit fondée sur des valeurs, le Conseil de l’Europe a élaboré une Charte sur l’éducation à la citoyenneté démocratique et aux droits de l’homme, accompagnée d’une Recommandation du Comité des Ministres sur la mise en œuvre des mesures prévues par la Charte. Ces instruments (non contraignants) soutiennent une approche de l’éducation à la citoyenneté démocratique pour tous les membres de la société (citoyens et non-citoyens) qui aboutisse à l’acquisition de connaissances, de compétences, d’une compréhension et d’attitudes devant permettre aux individus d’exercer, et, le cas échéant, de défendre, leurs droits et devoirs démocratiques au sein de la société. Ces textes définissent une approche inclusive de la citoyenneté démocratique qui promeut la cohésion sociale, la compréhension interculturelle et le respect de la dignité humaine, tout en valorisant la diversité.

L’acquisition des types de connaissances, attitudes et compétences requises pour l’obtention d’un titre de résidence et de la citoyenneté s’inscrit dans un processus qui dure tout au long de la vie, et ce, pour TOUS les membres de la société, quel que soit leur statut officiel. S’agissant spécifiquement des migrants, les formations à l’intégration qui leur sont parfois proposées peuvent être utiles pour apprendre à acquérir des compétences fondamentales en dehors du cadre de ces formations, dans la mesure où elles leur apportent des informations pertinentes, les sensibilisent à certaines questions et leur proposent des pratiques et activités conçues pour favoriser leur participation active et leur autonomisation. Cette conception de la citoyenneté (ou l’éducation à la citoyenneté) ne se prête pas aux formes classiques d’évaluation.

Dans cette acception plus large de la citoyenneté – au sens de « participation » – et gardant à l’esprit la tendance croissante, dans certains pays, à accepter la double nationalité (et à reconnaître les identités plurielles), la naturalisation ne peut constituer l’objectif ultime des migrants. C’est une décision importante, qui s’inscrit dans le contexte plus général d’un processus continu d’intégration marqué par une participation de plus en plus active à la société et un sentiment renforcé d’appartenance, indépendamment du fait que les personnes concernées souhaitent ou non acquérir la citoyenneté. Il importe de permettre aux migrants, le plus tôt possible, d’avoir accès à la vie civique, politique, économique, sociale et culturelle pour qu’ils puissent se construire en tant que citoyens et enrichir leurs expériences en la matière, dans le cadre d’un processus de développement qui peut englober la citoyenneté « juridique » mais qui, surtout, aboutit à une participation active à la vie de la société – un élément fondamental pour l’intégration.

La mise en place de formations en langue qui soient suffisamment ciblées et souples pour tenir compte de la diversité des compétences et des besoins des migrants peut faciliter ce processus de participation. Parfois, l’octroi de la citoyenneté est conditionné par la réussite d’un test de langue. A cet égard, il convient de souligner qu’il n’existe pas de preuve de l’existence d’un lien étroit entre un niveau spécifique de compétence en langue et l’exercice de la citoyenneté. L’intégration, qui s’inscrit dans un processus continu, peut suivre son cours même avec des compétences en langue limitées ; celles-ci se développent au fil du temps, par l’utilisation de la langue dans les activités quotidiennes. Par conséquent, plutôt que de conditionner l’octroi de la citoyenneté à la satisfaction de certains critères linguistiques, il conviendrait, dans ce domaine, de mettre en place des mesures qui tiennent compte du fait que c’est la participation active à la société qui permet d’acquérir directement des compétences en communication et de les améliorer

JS

Ressources complémentaires

  • Charte du Conseil de l’Europe sur l’éducation à la citoyenneté démocratique et l’éducation aux droits de l’homme (Recommandation CM/REC (2010), 2010, Conseil de l'Europe adoptée par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, et son exposé des motifs)
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