Origines de la Convention

En mars 1994, quelques mois avant la 1ère Session plénière du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe (ci-après : le Congrès), l'ancienne Conférence permanente des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe a adopté la Résolution 256 (1994) sur la 3e Conférence des régions méditerranéennes. Dans ce texte, l'ancienne Conférence permanente a invité le Congrès, l’organe qui lui a succédé, « à élaborer, sur la base de la Charte du paysage méditerranéen – adoptée à Séville par les régions Andalousie (Espagne), Languedoc-Roussillon (France) et Toscane (Italie) – une Convention-cadre sur la gestion et la protection du paysage naturel et culturel de toute l'Europe ».

Un an plus tard, à la suite de la première Conférence des ministres européens de l'Environnement qui s'est tenue à Dobríš en juin 1991, l'Agence européenne de l'environnement de l'Union européenne a publié L'environnement de l'Europe, le rapport de Dobríš, qui représente une analyse approfondie de l'état et des perspectives de l'environnement dans la « Grande Europe ». Le chapitre 8 de ce texte est consacré à la question du paysage et dans ses conclusions il exprime le souhait que le Conseil de l'Europe prenne l'initiative d'élaborer une Convention européenne sur le paysage rural.
En 1995, l'Union mondiale pour la nature (UICN) a publié le document Des Parcs pour la vie : des actions pour les aires protégées d'Europe, avec le soutien, entre autres, de l'Agence suédoise de protection de l'environnement, du ministère néerlandais de l'Agriculture, de l'Aménagement du territoire et de la Pêche, du ministère norvégien de l'Environnement, de la Countryside Commission britannique, du ministère allemand de l'Environnement, de la Conservation de la nature et de la Sécurité nucléaire, du ministère français de l'Environnement et du Fonds mondial pour la nature (WWF). Ce texte préconise la mise en œuvre d'une Convention internationale sur la protection des paysages ruraux en Europe à laquelle participerait le Conseil de l'Europe.

Sur la base de ces recommandations et d'une demande sociale croissante, le Congrès a décidé d'élaborer un projet de Convention européenne du paysage en vue de son adoption par le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe. Afin d'élaborer ce projet, en septembre 1994, le Congrès a mis en place un groupe de travail ad hoc. En novembre de cette même année a eu lieu la première réunion de ce groupe, composé de membres du Congrès et d’experts (Régis Ambroise, Michael Dower, Bengt Johansson, Yves Luginbuhl, Michel Prieur and Florencio Zoido-Naranjo). M. Riccardo Priore, fonctionnaire du Conseil de l’Europe, a assumé la fonction de Secrétaire du Groupe de travail. En application du principe de la consultation et de la participation, plusieurs institutions et programmes internationaux, nationaux et régionaux ont été invités à participer aux travaux de ce groupe de travail. Parmi ceux-ci rappelons ici : l'Assemblée parlementaire et le Comité du patrimoine culturel du Conseil de l'Europe (CC-PAT), le Comité pour les activités du Conseil de l'Europe en matière de diversité biologique et paysagère (CO-DBP), le Comité pour la protection du patrimoine mondial de l'Unesco, l'UICN, le Comité des Régions et la Commission européenne de l'Union européenne, le Bureau de la Stratégie paneuropéenne pour la diversité biologique et paysagère, et les régions de l’Andalousie (Espagne), du Languedoc-Roussillon (France) et de la Toscane (Italie). 

En raison de la complexité scientifique du sujet et de la diversité des approches juridiques nationales le concernant, le groupe de travail a élaboré, en tant que documents préparatoires, une version complète du projet de Convention en termes non juridiques et une étude de droit comparé européen du paysage. Cette étude a été élaborée afin de connaître les conditions juridiques et pratiques relatives à la protection, à la gestion et à l'aménagement du paysage dans les Etats membres du Conseil de l'Europe.

Par ailleurs, au cours de ses travaux, le groupe de travail a fait constamment référence aux textes juridiques déjà existants aux niveaux international et national dans ce domaine. Parmi ces textes figurent – outre la Convention concernant la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel de l'Unesco – la Convention pour la sauvegarde du patrimoine architectural de l'Europe, la Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe, la Convention européenne pour la protection du patrimoine archéologique, la Recommandation 95 (9) du Comité des Ministres relative à la conservation des sites culturels intégrée aux politiques de paysage, la Recommandation (79)9 du Comité des Ministres concernant la fiche d'identification et d'évaluation des paysages naturels en vue de leur protection, la Charte du paysage méditerranéen, le Règlement des Communautés européennes concernant les méthodes de production agricole compatibles avec les exigences de l'environnement ainsi que l'entretien de l'espace naturel, la directive des Communautés européennes concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, la directive des Communautés européennes concernant l'évaluation de l'impact sur l’environnement ainsi que d'autres textes importants de droit national, communautaire et international.

Etant donné les exigences de démocratie ainsi que la spécificité, la polyvalence et la variété des valeurs et des intérêts paysagers à prendre en compte, dans le cadre de son programme de consultation au sujet du projet de Convention, le groupe de travail a organisé à Strasbourg deux auditions spécifiques. La première, à l'intention des organismes scientifiques nationaux et régionaux privés et publics et des organisations non gouvernementales européennes intéressées a eu lieu les 8 et 9 novembre 1995 ; la deuxième, tenue le 24 mars 1997, était destinée aux organisations internationales et aux autorités régionales européennes concernées.

A la suite de ces auditions, à l'occasion de sa 4ème Session plénière qui s'est tenue à Strasbourg du 3 au 5 juin 1997, le Congrès a adopté l'avant-projet de Convention européenne du paysage dans le cadre de sa Résolution 53 (1997). Le projet de Convention exprimé dans un langage non juridique et l'étude de droit comparé européen du paysage susmentionnés, ont été présentés en tant qu'annexes à l'exposé des motifs de cette résolution (CG (4) 6, partie II). A cette même occasion, par sa Recommandation 31 (1997), le Congrès a demandé à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe d'examiner l'avant-projet de Convention européenne du paysage contenu dans la Résolution 53 (1997), d'exprimer un avis et, si possible, d'y apporter un soutien. Cette demande d'avis et de soutien a également été adressée par le Congrès au Comité des régions de l'Union européenne.

Par ailleurs, avant de recommander au Comité des Ministres l'adoption de la Convention européenne du paysage, le Congrès a décidé, toujours par sa Résolution 53 (1997), de consulter les représentants des ministères nationaux concernés. C'est pourquoi il a chargé le groupe de travail d'organiser une conférence de consultation à l'intention de ces représentants ainsi que des principales organisations internationales et non gouvernementales techniquement qualifiées dans le domaine du paysage. A la suite de l'invitation du ministère italien des Biens culturels et environnementaux, cette importante Conférence s'est tenue à Florence (Italie) du 2 au 4 avril 1998. Par cette conférence de consultation, le Congrès a pu établir un dialogue constructif avec les autorités gouvernementales des Etats membres du Conseil de l'Europe responsables des questions relatives au paysage. En particulier, grâce à cet échange de vues ouvert et informel entre, d'une part, les membres du groupe de travail et les experts les assistant dans la préparation du projet de Convention et, d'autre part, les représentants des ministères chargés de la question du paysage, le Congrès a pu comprendre les exigences de ces Etats en ce qui concerne l'établissement de règles communes visant la protection, la gestion et l'aménagement de leurs paysages par le droit international.

Sur la base des résultats très encourageants de la Conférence de Florence et de l'avis très favorable des institutions internationales concernées sur l'avant-projet de Convention (L'Assemblée parlementaire et le Comité du patrimoine culturel du Conseil de l'Europe, le Comité des régions de l'Union européenne, le Comité pour la protection du patrimoine mondial de l'Unesco, la Commission pour les aires protégées et la Commission du droit de l'environnement de l'Union mondiale pour la nature (UICN) ont présenté leur avis officiel dans le cadre de la Conférence de Florence. A cette occasion, un certain nombre d'organisations non gouvernementales techniquement qualifiées dans le domaine du paysage ont également exprimé leur opinion favorable sur l'avant-projet de Convention), et compte tenu des propositions reçues lors des auditions susmentionnées, le groupe de travail a élaboré le projet final de Convention européenne du paysage en vue de son adoption par le Congrès dans le cadre du projet de recommandation présenté à l'occasion de sa 5ème Session plénière (Strasbourg, 26-28 mai 1998). Le groupe de travail a été présidé par Mme Cristiana Storelli (Suisse) de 1994 à 1996 et par M. Pierre HITIER (France) de 1997 à 1998. Mme Storelli et M. Hitier ont également été Rapporteurs. Le projet de recommandation, adopté par le Congrès le 27 mai 1998 (Recommandation 40 (1998)), a demandé au Comité des Ministres du Conseil de l'Europe d'examiner le projet de Convention européenne du paysage en vue de son adoption comme Convention du Conseil de l'Europe déjà, si possible, à l'occasion de la campagne sur le patrimoine commun décidée par les chefs d'Etat et de gouvernement lors de leur 2ème Sommet à Strasbourg en octobre 1997. La recommandation susmentionnée a invité par ailleurs l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe à soutenir le projet de Convention européenne du paysage en vue de son adoption par le Comité des Ministres. La Recommandation 40 (1998) contient en annexe une liste d’exemples de moyens juridiques, administratifs, fiscaux et financiers spécifiques qui peuvent être mis en place en vue de la protection, de la gestion et de l’aménagement des paysages. La recommandation est complétée par un exposé des motifs contenant en annexe un projet de Rapport explicatif du projet de Convention.

Lors de leur 641ème réunion (15-18 septembre 1998), les Délégués des Ministres du Conseil de l'Europe ont examiné la Recommandation 40 (1998) du Congrès et ont demandé au Comité pour les activités du Conseil de l'Europe en matière de diversité biologique et paysagère (CODBP) et au Comité du patrimoine culturel (CC-PAT) de considérer l'opportunité et la faisabilité d'élaborer sous les auspices du Conseil de l'Europe un texte de Convention du paysage en tenant compte du projet de Convention européenne du paysage du Congrès figurant dans la Recommandation n° 40 (1998). Le CC-PAT et le CO-DBP ont exprimé un avis favorable, respectivement les 17 février et 19 avril 1999. 

Sur cette base, lors de sa 676ème réunion (1-2 juillet 1999), le Comité des Ministres a décidé la création d'un Comité restreint d'experts gouvernementaux chargé de la rédaction de la Convention européenne du paysage sur la base du projet préparé par le Congrès. En particulier, le Comité des Ministres a recommandé au Comité restreint d’experts d’accorder une attention particulière aux articles concernant l’organe chargé de suivre la mise en œuvre de la Convention et l’identification des paysages d’intérêt européen. Ce comité d'experts s'est réuni trois fois (septembre, novembre 1999 et janvier 2000) et a transmis un nouveau projet de Convention au CC-PAT et au CO-DBP en janvier 2000. Ces deux comités ont examiné conjointement le texte le 10 mars 2000 et ont décidé de le soumettre pour examen au Comité des Ministres, accompagné du rapport de leur réunion [TLAND(2000) 4], en vue de ses éventuelles adoption et ouverture à la signature.

Sur la base des textes figurant dans le rapport précité et des Avis de l’Assemblée parlementaire et du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l’Europe des 25 mai 2000 et 26 juin 2000 respectivement, le Secrétaire général du Conseil de l'Europe a soumis un projet de Convention au Comité des Ministres pour adoption. Le Comité des Ministres a adopté le texte de la Convention le 19 juillet 2000 et a fixé la date de son ouverture à la signature au 20 octobre 2000.

(cf. Rapport explicatif de la Convention, pages 1-4)