Le carnet des droits humains de la Commissaire

Retour Les établissements scolaires doivent cesser de diffuser des messages homophobes et transphobes

Le carnet des droits de l'homme

Dans les établissements scolaires à travers toute l’Europe, des jeunes sont victimes de harcèlement en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. Pour bon nombre d’entre eux, les brimades homophobes et transphobes sont une réalité de la vie quotidienne. Il est temps de réagir à ces situations, surtout au vu des mises en garde formulées par plusieurs études et rapports nationaux au sujet d'un certain nombre de suicides commis par de jeunes personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT) qui se sentent rejetées par leurs pairs et leur famille.

L'étendue du problème est considérable. Une étude réalisée au Royaume-Uni montre que neuf professeurs de l'enseignement secondaire sur 10 ont été témoins de brimades homophobes subies par des enfants dans leur établissement. Deux instituteurs de l'enseignement primaire sur cinq ont constaté la même situation chez les élèves à ce stade très précoce.

Les études montrent également que les élèves des établissements de l'enseignement primaire emploient des expressions homophobes avec une fréquence alarmante. Ils reprennent et répètent un jargon péjoratif, dont ils ne comprennent le plus souvent pas le sens.

Mon récent rapport intitulé « Discrimination on grounds of sexual orientation and gender identity in Europe » (Discrimination en raison de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre en Europe) illustre par de multiples exemples à quel point les informations diffusées à propos des personnes LGBT, parfois par les établissements scolaires eux-mêmes, sont inexactes. Ce grave problème peut favoriser les brimades et contribuer à cimenter les comportements homophobes et transphobes.

Des préjugés souvent diffusés par les manuels scolaires

L'Organisation mondiale de la santé a rayé l'homosexualité de la Classification internationale des maladies en 1990. En dépit de cela, les préjugés et malentendus ont trop souvent perduré dans les programmes scolaires.

Ainsi, « l’ex-République yougoslave de Macédoine » a décidé cet été seulement de réviser un manuel scolaire qui qualifiait les homosexuels de « personnes névrosées et psychotiques » ayant une « vie sexuelle anormale, contre nature et dégénérée ». D'après les informations que j'ai obtenues en Lituanie, les élèves y apprenaient que l'homosexualité était une maladie et que les relations entre personnes de même sexe détruisaient les familles.

En 2009, le Comité européen des droits sociaux a établi une norme importante en examinant une réclamation déposée à l’encontre de la Croatie à propos du contenu d'un manuel scolaire de biologie, qui était considéré comme comportant des informations véhiculant des préjugés. Le Comité a conclu que « certains éléments spécifiques du matériel pédagogique … sont manifestement entachés d’erreurs, discriminatoires et avilissants ». La Croatie a retiré le manuel à la suite des conclusions du Comité, mais les ONG du pays continuent à faire état de problèmes analogues posés par d'autres manuels scolaires.

« Ne cautionnez pas les brimades homophobes »

Certains États membres ont pris des initiatives encourageantes. En Norvège, un plan d'action national destiné aux établissements de l'enseignement primaire et secondaire donne aux matières du programme scolaire classique une dimension LGBT. En Estonie, le programme scolaire national offre une base de discussion sur les questions relatives aux personnes lesbiennes, gays et bisexuelles. L’UNESCO a initié une consultation internationale sur les brimades homophobes dans les établissements d'enseignement. Les ONG mènent d’indispensables campagnes de lutte contre les brimades homophobes, comme l'initiative irlandaise « Ne cautionnez pas les brimades homophobes » (Don’t stand for homophobic bullying).

Il y a un besoin impératif de revoir les programmes d'enseignement et le matériel pédagogique dans l'ensemble des États membres du Conseil de l'Europe. C'est ce qu'a souligné une Recommandation du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe, qui invite les États membres à fournir « à tous les élèves et étudiants l’information, la protection et le soutien requis pour leur permettre de vivre en accord avec leur orientation sexuelle et leur identité de genre ».

Des établissements scolaires tenus de protéger les élèves

Tout établissement scolaire a l'obligation de protéger ses élèves contre les brimades et d'enseigner le respect et l'ouverture d'esprit. Le personnel de l'établissement doit suivre une formation approfondie sur les questions relatives à la non-discrimination. À cet égard, le Manuel de formation sur la réduction de la violence à l'école (training pack) du Conseil de l'Europe est un outil important.

Les décideurs politiques et la direction des établissements scolaires doivent fournir aux enseignants un soutien sans faille, afin qu'ils disposent des moyens et des ressources nécessaires à la création d'un environnement sain et ouvert à tous au sein des établissements scolaires et à l'intérieur des salles de classe.

Thomas Hammarberg

Lien : Page thématique du Commissaire sur les droits de l'homme des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT)

Strasbourg 27/09/2011
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