Retour Bulgarie : progrès dans la lutte contre les inégalités, mais d’autres mesures s’imposent pour protéger les personnes LGBTI et les Roms de la discrimination et du discours de haine et aider les réfugiés

Bulgarie : progrès dans la lutte contre les inégalités, mais d’autres mesures s’imposent pour protéger les personnes LGBTI et les Roms de la discrimination et du discours de haine et aider les réfugiés

La Bulgarie a accompli des progrès tangibles depuis 2014 en matière de lutte contre l’intolérance, d’introduction de l’éducation inclusive, de lutte contre l’antisémitisme, de promotion de l’intégration des Roms et d’aide aux réfugiés. Cela étant, la haine et les préjugés à l’égard des personnes LGBTI persistent et doivent être combattus et les mesures d’intégration des réfugiés doivent être étendues. Tels sont les constats du nouveau rapport publié aujourd’hui par la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) qui couvre la période de juin 2014 à fin mars 2022 (voir la version bulgare du rapport).

L’ECRI se félicite de plusieurs évolutions positives observées depuis le précédent cycle de monitoring. L’organisme national de promotion de l’égalité, la Commission pour la protection contre la discrimination (CPD), a reçu des fonds pour ouvrir quatre bureaux locaux supplémentaires, ce qui porte le nombre total de ces bureaux à 24. L’ECRI note avec satisfaction qu’à la fin de 2019, une enveloppe de 7 millions de BGN (quelque € 3,5 millions) a été allouée au renforcement des capacités des pédagogues spécialisés dans les milieux multiculturels. En 2020 pour la première fois, l’interdiction à Sofia de la marche de Loukov – une procession aux flambeaux réunissant des ultranationalistes et de jeunes néonazis à la gloire d’un ancien responsable politique bulgare pro-nazi – a été confirmée par la Cour administrative suprême et la marche a été annulée. Les autorités ont pris d’importantes mesures pour empêcher et combattre l’antisémitisme sous toutes ses formes. Le ministère de l’Intérieur et les étudiants de l’École de police ont suivi une formation sur la reconnaissance des infractions motivées par la haine des personnes LGBTI.

En ce qui concerne l’intégration et l’inclusion des Roms, les autorités proposent depuis 2016 jusqu’à une centaine d’heures de cours de bulgare, en milieu pré-scolaire, aux enfants dont ce n’est pas la langue maternelle, essentiellement des Roms. En 2020, près de 30 000 Roms ont participé aux activités d’intégration socio-économique proposées par l’Agence publique pour l’emploi. Le travail des médiateurs roms dans les domaines de l’éducation, de l’emploi et de la santé a été très positif, tout particulièrement pendant la pandémie de covid-19.

L’ECRI note que les réfugiés et les bénéficiaires de la protection subsidiaire peuvent demander un regroupement familial, sans conditions de ressources ni de logement, dès lors que la protection leur est octroyée. L’ECRI rend aussi hommage aux efforts déployés par les autorités pour protéger et assister les nombreux Ukrainiens venus se réfugier en Bulgarie après le début de l’agression russe contre l’Ukraine en février 2022 (d’après les autorités bulgares, entre la fin février et le mois de mai 2022, la Bulgarie a accueilli plus de 80 000 Ukrainiens, essentiellement des femmes et des enfants).

Malgré les progrès accomplis, certains points demeurent toutefois préoccupants. Les personnes LGBTI et les Roms sont les principales victimes de l’expression publique de la haine et des préjugés. Ces deux groupes ont fait l’objet, ces dernières années, de discours de haine qui émanaient de responsables politiques de haut niveau. Les mesures positives prises pour lutter contre l’antisémitisme n’ont malheureusement pas été étendues au discours de haine ciblant ces groupes.

Il n’existe pas de système spécifique permettant de suivre les incidents à caractère raciste et anti-LGBTI en milieu scolaire et de lutter contre ces phénomènes pas plus que de données officielles sur la population LGBTI en Bulgarie. Malgré la recommandation formulée par l’ECRI dans son dernier rapport, les autorités n’ont pas effectué la moindre étude ou recherche concernant la situation de ce groupe de personnes. Elles n’ont pas non plus élaboré de législation sur la conversion sexuelle et la reconnaissance du genre, contrairement à ce que l’ECRI leur avait recommandé. À Sofia, l’espace social LGBTI « Rainbow Hub » a été la cible de plusieurs actes de violence ces dernières années.

En ce qui concerne l’intégration et l’inclusion des Roms, de nombreux enfants roms n’iraient toujours pas à la maternelle, à l’école ou n’achèveraient pas le cycle secondaire. Il semblerait qu’il existe dans certains cas une ségrégation de fait. À deux reprises au moins, les Roms ont été la cible localement de manifestations et de menaces collectives, ont subi des actes d’agression et leurs maisons ont été démolies. Les membres de la communauté rom ont été particulièrement touchés par les mesures que les autorités ont prises pour lutter contre la pandémie, car nombre d’entre eux occupent des emplois précaires dans le secteur informel de l’économie.

L’ECRI adresse plusieurs recommandations aux autorités bulgares. Les autorités devraient constituer un groupe de travail LGBTI qui comprendrait divers organismes des communautés LGBTI pour mener des recherches sur la discrimination à l’égard des personnes LGBTI, puis établir une stratégie nationale et le plan d’action correspondant dans ce domaine. L’ECRI recommande aussi aux autorités d’augmenter le nombre de médiateurs roms et d’élargir la portée de leurs précieux travaux dans les domaines de la santé, de l’éducation et de l’emploi. Elle évaluera la mise en œuvre de ces recommandations dans un délai de deux ans.

L’ECRI recommande aussi aux autorités de s’appuyer sur les mesures positives qu’elles ont prises en matière de prévention de l’antisémitisme et de lutte contre ce phénomène pour définir des mesures similaires applicables aux autres groupes exposés au discours de haine.

Les autorités devraient notamment mettre en place un système pour suivre les incidents à caractère raciste et anti-LGBTI en milieu scolaire et lutter contre ce phénomène. L’ECRI recommande à nouveau aux autorités d’élaborer une législation sur la conversion sexuelle (changement de sexe d’une personne) et la reconnaissance du genre qui garantisse la conformité aux normes internationales relatives aux droits humains.

En ce qui concerne les Roms, l’ECRI recommande vivement aux autorités de prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher des groupes de personnes de faire subir aux Roms des menaces ou des actes de violence et de veiller à mettre fin à la ségrégation de fait touchant les enfants roms à la maternelle et à l’école. La commission du Conseil de l’Europe recommande aussi aux autorités de protéger les logements des Roms contre les mesures de démolition n’offrant pas les garanties énoncées dans les textes internationaux applicables (notamment un préavis suffisant, la possibilité d’intenter un recours contre ces mesures et la mise à disposition d’un autre logement).

L’ECRI recommande en outre aux autorités d’intensifier et d’étendre les mesures d’intégration destinées aux réfugiés et aux bénéficiaires de la protection subsidiaire (notamment les cours de bulgare pour adultes et les mesures de développement des compétences et de soutien à l’emploi) afin de toucher davantage de personnes, soit en relançant les programmes nationaux d’intégration, soit en finançant adéquatement et en déployant l’intégralité des activités à l’échelon local.

Strasbourg 4 octobre 2022
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