Retour Serbie : intensifier les efforts pour affronter le passé, garantir la liberté d’expression et de réunion et protéger les femmes contre la violence

Rapport de visite pays

La Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Dunja Mijatović, a rendu public aujourd’hui le rapport sur sa visite en Serbie de mars 2023, qui comporte des recommandations axées sur la justice transitionnelle et le traitement du passé, sur la liberté d’expression et de réunion et sur les droits des femmes et l’égalité de genre.

La Commissaire appelle les autorités serbes à renforcer les poursuites concernant les crimes commis en temps de guerre ; à remédier aux lacunes persistantes du système de protection des témoins ; à améliorer la coopération judiciaire internationale et régionale dans ce contexte ; et à donner à toutes les victimes de crimes commis en temps de guerre un accès à une réparation rapide, adéquate et effective, conformément aux normes internationales établies en la matière.

Constatant avec préoccupation la lenteur des progrès dans le règlement des quelque 9 800 cas restants de personnes disparues dans la région, la Commissaire exhorte la Serbie à prendre toutes les mesures nécessaires pour permettre une recherche effective et continue des personnes disparues, ce qui suppose notamment qu’elle ouvre ses archives militaires et qu’elle renforce sa coopération avec les pays voisins.

La Commissaire appelle la Serbie à lutter contre la glorification publique des criminels de guerre et contre la négation et la relativisation des crimes de guerre et du génocide, et à cesser d'offrir une tribune aux personnes coupables ou soupçonnées de crimes de guerre qui propagent un discours de négation des crimes de guerre et du génocide. Elle souligne que l'approche de la Serbie en matière d’approche mémorielle devrait être inclusive et critique, tandis que l'enseignement de l'histoire devrait refléter la pluralité des perspectives, condamner toutes les atrocités et promouvoir la tolérance et l'ouverture.

La question de la sécurité des journalistes reste une grave préoccupation en matière de droits humains en Serbie. « Tous les crimes commis contre des journalistes devraient faire l’objet d’enquêtes rapides et effectives, et les auteurs devraient être dûment sanctionnés. Quant aux responsables publics serbes, ils devraient se garder de tenir des propos qui encouragent les agressions, les calomnies ou les campagnes de dénigrement dirigées contre les journalistes, et qui enhardissent les auteurs de ces actes », souligne la Commissaire.

La Commissaire invite instamment les autorités à créer un environnement sûr et propice pour le travail des organisations de la société civile et des défenseurs des droits humains, et à contrer le recours massif aux poursuites-bâillons (SLAPP) visant les journalistes, les défenseurs des droits humains et les militants. En outre, elle appelle les autorités à se garder de restreindre davantage le droit à la liberté de réunion pacifique et à mettre plutôt le cadre législatif et la pratique de la Serbie en totale conformité avec les normes internationales pertinentes en matière de droits humains. Les autorités sont également invitées à s'abstenir d'instaurer la surveillance biométrique des espaces publics et le traitement biométrique des données, et à amender le projet de loi sur les affaires intérieures en ce sens.

Tout en constatant avec satisfaction que le cadre législatif et politique en faveur de l’égalité entre les genres a été renforcé ces dernières années, la Commissaire appelle à redoubler d'efforts pour le mettre en œuvre et pour lutter contre les stéréotypes de genre discriminatoires qui contribuent à la perpétuation de la violence fondée sur le genre.

Vivement préoccupée par l’ampleur de toutes les formes de violence à l’égard des femmes en Serbie, la Commissaire exhorte les autorités à s’attaquer à ce phénomène en rendant la législation pleinement conforme aux dispositions pertinentes et en améliorant sa mise en œuvre. Pour ce faire, les autorités devraient s’appuyer sur les recommandations formulées en la matière par le GREVIO et par le Comité des Parties à la Convention d’Istanbul. La Commissaire demande aussi aux autorités de prendre des mesures résolues pour lutter contre la violence numérique à l’égard des femmes et des filles. Enfin, saluant le travail essentiel réalisé par les organisations de la société civile dans ce domaine, la Commissaire invite les autorités à fournir à ces organisations un financement stable, à coopérer avec leurs services de soutien et à mieux les utiliser.

Strasbourg 28/09/2023
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