Retour « Il faut remédier aux conséquences persistantes des graves violations des droits de l'homme perpétrées dans l’ex-Yougoslavie »

Sarajevo, 19/03/2012 – « La réconciliation interethnique, la cohésion sociale et la paix durable ne sont réalisables dans la région de l'ex-Yougoslavie que si les Etats remédient aux conséquences des graves violations des droits de l'homme dont des milliers de personnes ont été victimes pendant les guerres des années 1990. Les problèmes qu'il reste à régler exigent une vision empreinte de sagesse et une direction politique résolue. La paix et la stabilité dans la région doivent s'enraciner fermement dans les principes des droits de l'homme et de l'Etat de droit » a déclaré Thomas Hammarberg, le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, en présentant, à Sarajevo, un document sur la justice d'après-guerre dans l'ex-Yougoslavie.

Le document énonce et analyse des recommandations concernant quatre grandes composantes de la justice d'après-guerre : des mesures visant à mettre fin à l'impunité ; l'octroi d'une réparation effective et appropriée à toutes les victimes de guerre ; la nécessité d'établir et de reconnaître la vérité concernant les violations flagrantes des droits de l'homme ; et des réformes institutionnelles destinées à empêcher la répétition des événements passés.

« Malgré les efforts déployés et les progrès accomplis, le lourd héritage des violences du passé récent est encore dangereusement présent dans toute la région de l'ex-Yougoslavie » a déclaré le Commissaire. « L'impunité des crimes de guerre n'a pas été éliminée et le sort de quelque 13 500 personnes disparues n'a toujours pas été éclairci. Les milliers de femmes qui ont subi des violences sexuelles ne bénéficient toujours pas d'une assistance appropriée. Il y a aussi environ 438 000 réfugiés et autres personnes déplacées dont les demandes légitimes de réparation n'ont toujours pas été satisfaites. En outre, la situation d'environ 18 000 personnes qui, dans la région, sont apatrides ou risquent de l'être, notamment des Roms, pose de sérieux problèmes dans les domaines humanitaire et des droits de l'homme, qui doivent être traités et réglés conformément aux normes européennes et internationales consacrées. »

Le Commissaire souligne qu'il est capital d'établir des systèmes judiciaires nationaux efficaces dans les pays de la région afin non seulement de renforcer l'Etat de droit mais aussi d'accroître la nécessaire confiance de la population dans la justice et de renforcer la prévention des violations des droits de l'homme.

Les Etats doivent convenir de solutions justes et durables pour mettre fin au déplacement prolongé des réfugiés et autres personnes déplacées. Les femmes qui ont subi des violences sexuelles pendant la guerre restent particulièrement vulnérables et méritent un soutien plus important de la part des Etats concernés.

La reconnaissance publique des faits et l'acceptation des responsabilités peuvent constituer une forme importante de satisfaction contribuant à la réparation des graves préjudices subis par les victimes de guerre. Le Commissaire se félicite des mesures prises jusqu'à présent, en particulier par les Présidents croate et serbe, pour reconnaître les crimes de guerre ainsi que pour établir et reconnaître la vérité. « La reconnaissance par les pouvoirs publics des atrocités passées permet de faire changer les attitudes et contribue à la réconciliation. Les campagnes de sensibilisation de l'opinion publique sont également nécessaires pour instaurer une paix durable et la cohésion sociale dans la région. »

Le Commissaire exprime son soutien aux efforts déployés jusqu'à présent pour établir et reconnaître la vérité concernant les violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international perpétrées au cours des guerres dans l'ex-Yougoslavie et appelle à des engagements politiques plus fermes dans ce domaine. « Les efforts ont été sérieusement entravés par des divisions et des clivages ethniques persistants parmi les responsables politiques et les populations. Les Etats de la région devraient appuyer la création d'une commission régionale de vérité et de réconciliation et lui donner les moyens financiers et humains nécessaires pour mener à bien sa tâche ».

Enfin, le Commissaire recommande une refonte des systèmes éducatifs des Etats de la région afin qu'ils assurent la promotion d'une connaissance véritable de l'histoire, favorisent la tolérance et la confiance entre les peuples, notamment les jeunes générations, et permettent de lutter contre la discrimination et les clivages entre les différents groupes ethniques.