Conférence européenne des autorités de protection des données

Strasbourg, 5 juin 2014

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Commissaires,

Chers collègues,

C’est un vrai plaisir pour moi de m’adresser à vous à l’occasion de votre conférence annuelle, que j’ai le privilège d’ouvrir.

Un plaisir et un privilège partagés - et cela bien volontiers - avec vous Madame la Présidente.

Madame la Présidente,

Vous avez accepté d’unir l’expertise et l’énergie de la CNIL à celles du Conseil de l’Europe. Aussi nos institutions respectives ont-elles l’honneur d’organiser ensemble l’édition 2014 de la Conférence européenne des autorités de protection des données. Je vous en sais gré.

La dimension européenne de cette Conférence prend à Strasbourg toute sa mesure. Cette dimension coïncide pratiquement avec la grande Europe qui est la nôtre. Nous défendons une vision paneuropéenne dans un idéal commun ; un idéal de démocratie, de respect des droits de l’homme et de l’Etat de droit, un idéal qui peut s’étendre à d’autres Continents.

Le Conseil de l’Europe a déjà eu l’honneur et le privilège d’accueillir en 2008 certains d’entre vous à l’occasion de la Conférence internationale des Commissaires à la protection des données et à la vie privée. Et cela reflétait bien la vocation universelle de nos instruments juridiques les plus récents, des instruments ouverts à l’adhésion d’Etats non membres du Conseil de l’Europe.

Cette ouverture est précisément l’une des forces de notre Convention sur la protection des données, la Convention 108, que vous connaissez tous bien évidemment par cœur.

Mesdames et Messieurs,

Vous êtes les représentants d’un maillon essentiel de la défense et de la promotion du droit fondamental à la protection des données personnelles. Le Conseil de l’Europe est à vos côtés pour vous soutenir dans cette mission. Je suis donc ravi aujourd’hui de pouvoir mettre à votre disposition nos équipes, nos outils juridiques ainsi que nos locaux.

Le thème de la conférence de cette année est la coopération européenne et internationale. Au Conseil de l’Europe, et plus particulièrement au sein de la Direction générale dont je suis responsable, la coopération est l’un des éléments clé du triptyque de notre action. Pour être efficace, notre action se concentre sur l’activité normative d’une part, sur les mécanismes de suivi du respect de ces normes d’autre part, et enfin sur la coopération. La coopération est pour nous le moyen de travailler de façon ciblée avec un ou plusieurs pays au renforcement de leurs capacités.

Ce travail de coopération ne peut se faire sans volonté préalable, sans définition des besoins, sans accord sur les objectifs et les moyens et sans cadre règlementaire procurant la base légale nécessaire à cette coopération.

Chacun de ces points fait l’objet d’un examen attentif lors de la préparation et de la mise en œuvre de nos projets de coopération. Si le contexte et les outils sont différents, ces éléments sont également pertinents en matière de coopération entre autorités de protection des données. Vous disposez de cette journée pour en traiter. C’est un début, ou plutôt une continuation puisque ce sujet n’est pas nouveau, et aucun effort ne doit être épargné afin de vous permettre de mieux travailler ensemble.

La coopération entre autorités n’est pas une option, c’est une obligation. Je vois au moins trois raisons à cette obligation de coopérer :

  • premièrement la protection de la vie privée et la protection des données personnelles font quotidiennement la une de tous médias, aux quatre coins du globe ;
  • deuxièmement, nos données personnelles ne connaissent plus de limites ; ni géographiques, ni physiques, ni volumétriques ;
  • et enfin, troisièmement, les défis auxquels nous sommes confrontés ne relèvent plus d’un pays ou d’une région mais nous concernent tous puisque nous avons tous à faire aux mêmes technologies, aux mêmes applications et aux mêmes géants de l’internet.

Il est donc crucial de s’entendre sur des principes communs de protection, et sur les moyens de travailler ensemble à leur promotion, à leur application et à leur défense.

Comment le Conseil de l’Europe peut-il vous assister dans cette entreprise ?

S’agissant de principes communs, vous le savez mieux que quiconque, la Convention 108 est, depuis maintenant plus de 30 ans, le seul instrument international juridiquement contraignant applicable à la protection des données. Il est bien évident que le protocole additionnel de 2001, qui vise spécifiquement l’établissement au niveau national, ou infranational, d’autorités dites « de contrôle », c’est-à-dire vos autorités, est un élément clé du dispositif de protection. Je sais combien ce protocole a été déterminant dans l’établissement de certaines autorités nationales, et dans la défense de leur indépendance ainsi que des moyens nécessaires à l’accomplissement de la mission confiée.

C’est l’un des aspects qui fait l’objet d’un renforcement dans le cadre de la modernisation de la Convention. Le Comité de la Convention qui a préparé la première ébauche de la version modernisée a intégré dans ce qui sera un protocole d’amendement les dispositions de l’actuel protocole additionnel, afin que le dispositif de protection représente un tout indissociable. Un Etat Partie à la Convention ne pourra pas laisser de côté l’obligation d’instituer une autorité de contrôle indépendante, et les pouvoirs des autorités seront élargis. Il est notamment prévu qu’à l’avenir les autorités de contrôle relevant des Etats ou organisations internationales Parties à la Convention pourront coordonner des investigations ou interventions et mener des actions conjointes. C’est une avancée considérable en matière de coopération entre autorités de protection des données.

Le Comité qui regroupe les parties à la Convention, c’est à dire actuellement 46 Etats dont l’Uruguay, est un forum unique d’échange et de coopération. La 31ème réunion Plénière de ce comité a pris fin hier. Les participants ont travaillé sur divers dossiers : données et emploi,  données médicales, données et police, big data. Autant de sujets d’actualité traités au sein d’un Comité dont la richesse de sa composition permet un échange unique d’expertise. Je saisis cette occasion pour féliciter Jean-Philippe Walter de sa réélection à la Présidence du Comité.

La Convention est un outil précieux, à charge pour vous de vous en servir et de le faire véritablement vôtre ! Je vous invite à faire la promotion de la Convention à l’échelle internationale, à utiliser le système d’entraide qu’elle établit et à vous impliquer dans les travaux de son Comité.

Permettez-moi enfin d’attirer votre attention sur le guide récemment adopté par le Comité des Ministres sur les droits des utilisateurs de l’Internet. Ce guide, inspiré par la Convention européenne des droits de l’Homme et la jurisprudence de la Cour, et dans le domaine de la protection des données, également par la Convention 108, recense et commente les droits des utilisateurs de l’Internet dans un langage simple et accessible, en insistant tout particulièrement sur les recours pour rendre les droits pleinement efficaces. Je vous invite vivement à favoriser la visibilité et la diffusion de ce guide et à le promouvoir sur vos sites web et à travers vos activités.

Mesdames et Messieurs,

Il était important que vous puissiez, comme chaque année, vous réunir. Votre conférence n’a pas d’équivalent, c’est un forum unique et je suis heureux que le Conseil de l’Europe ait pu cette année soutenir l’organisation de la conférence européenne.

Le Conseil de l’Europe soutient également, vous le savez, la protection des données le 28 janvier de chaque année. Cette journée de la protection des données, née à Strasbourg et définie à l’origine comme journée européenne, est désormais célébrée tant aux Etats-Unis qu’en Afrique ou au Japon. Cette journée est un véritable tremplin de la promotion du droit à la protection des données, et plus spécifiquement de la promotion de vos actions et de votre travail. Le Conseil de l’Europe est fier d’y contribuer et continuera à faire la promotion de cet évènement.

Deux dernières observations.

Vous êtes toutes et tous au fait de l’actualité en matière de droit au respect de la vie privée et de protection des données à caractère personnel. Je ne soulignerai donc qu’un aspect important pour le Conseil de l’Europe des deux décisions récentes de la Cour de Justice de l’Union européenne. Ces décisions constituent un renforcement indéniable de la protection des personnes au regard du traitement de données à caractère personnel et soulignent l’importance de l’adhésion rapide de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme, afin d’éviter les risques d’interprétations divergentes de droits figurant dans la CEDH et dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

Parlant de l’Union européenne, je souhaite enfin mettre en exergue un exemple de coopération fructueuse.  Il s’agit de celle qui a permis au Conseil de l’Europe et à la Cour européenne des droits de l’Homme de s’associer à l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne pour la production du Manuel de droit européen que vous aurez désormais la possibilité de consulter en français, italien, grec et allemand en plus de la version originale anglaise. J’adresse toutes mes félicitations à Mario Oetheimer pour le succès de cette publication.

Madame la Présidente, permettez-moi avant de conclure de vous remercier une fois encore d’avoir permis au Conseil de l’Europe et à la CNIL de travailler ensemble à la préparation de cette conférence. Cette coopération – je le sais - a été excellente et je salue le professionnalisme et l’engagement de votre équipe.

Je vous souhaite à toutes et à tous une excellente conférence et vous invite à être ambitieux dans vos propositions et vos attentes !
 

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