Politique de la santé

Rapport sur l'organisation des services de soins de sante dans les etablissements penitentiaires des etats membres

Contents

Preface

Methodologie de l'etude

1. la situation generale

qui est responsable en matiere de soins de sante?

l'etat actuel des prisons

2. les principaux probl�mes au niveau de la distribution des soins

SIDA

MST

Tuberculose

Toxicomanie, alcoolisme, hepatite

Information, pr�vention et education en mati�re de sant�

3. Aspects sociaux

4. Quelques exemples de droits fondamentaux des d�tenus, avec la question �thique qui s'y rattache

PREFACE 

    Le Comit� europ�en de la Sant� est de plus en plus pr�occup� de la sant� des groupes vuln�rables et a d�cid� de faire une s�rie d'�tudes sur l'organisation des soins de sant� des populations institutionalis�es.

    La sant� des populations plac�es en institution risque de p�tir de l'insuffisance des soins de sant�. Sont en cause les difficult�s d'acc�s aux soins, l'absence de choix, la mauvaise qualit� des soins de sant� ou, d'une mani�re g�n�rale, un �chec possible de la coordination g�n�rale des services de soins de sant�.

    Une prise en consid�ration des droits des populations plac�es en institution, � titre de patients et de citoyens, s'impose. Ces droits comprennent notamment le droit de consentir un traitement ou de le refuser et d'exprimer ses pr�f�rences personnelles quant au choix du m�decin, d'autres professionnels de la sant� ou d'institutions et la protection contre la participation des recherches m�dicales ou scientifiques contraires � l'�thique.

    Dans l'examen de l'organisation des soins de sant� des diverses populations plac�es en institution, le Comit� europ�en de la sant�, � sa 32e r�union, en novembre 1992, a cr�� un groupe de recherches m�dicales pour examiner, dans un premier stade, l'organisation des soins de sant� � l'�gard des personnes d�tenues dans des �tablissements p�nitentiaires, et en particulier :

1. faire le point sur les probl�mes de sant� particuliers des populations d�tenues dans des �tablissements p�nitentiaires et poursuivre leur examen;

2. passer en revue les syst�mes de soins de sant� pr�vus actuellement pour les populations d�tenues dans des �tablissements p�nitentiaires et recenser les secteurs o� des am�liorations sont possibles, par exemple, en ce qui concerne l'acc�s et l'organisation des soins de sant� et la liaison entre les diff�rents syst�mes de soins;

3. d�finir en d�tail le droit des populations d�tenues dans des �tablissements p�nitentiaires � des soins de sant� appropri�s;

4. d�finir les principes qui devraient r�gir l'acc�s des populations d�tenues dans des �tablissements p�nitentiaires � des soins de sant� appropri�s et assurer au mieux la sauvegarde de leurs droits.

    Le Groupe �tait compos� des experts suivants :

- Dr Jean Tch�riatchoukine, Inspection g�n�rale des Affaires sociales, Minist�re des Affaires sociales et de l'Int�gration, France - Directeur d'�tudes

- Professeur Lazlo Buris - Institut de m�decine l�gale, Universit� m�dicale, Debrecen, Hongrie

- Professeur Francesco Di Girolamo, Inspecteur g�n�ral de la Sant�, Administration des �tablissements p�nitentiaires, Rome, Italie

- Professeur C. Kelk, Chief, Institut criminologique, Facult� de Droit, Universit� d'Utrecht, Pays-Bas

- Dr Marek Rzaczyski, m�decin de prison, Varsovie, Pologne.

    METHODOLOGIE DE L'ETUDE  

    Le Groupe d'�tude s'est r�uni trois fois � Strasbourg
    les 15-16 mars 1993
    les 17-18 f�vrier 1994
    les 10-12 octobre 1994

    Un questionnaire a �t� r�dig� et envoy� � tous les Etats membres pour une qu�te d'informations sur l'organisation des services de sant� en prison. Les pays suivants ont r�pondu au questionnaire : Autriche, Belgique, Bulgarie, Chypre, Danemark, Espagne, Finlande, France, Allemagne, Hongrie, Italie, Pays-Bas.

    Chaque membre du Groupe avait pour obligation de visiter un certain nombre d'Etats membres et de recueillir les r�ponses au questionnaire relatif � ces pays ainsi que dans son propre pays. Les pays suivants ont �t� visit�s : Allemagne, Autriche, Belgique, Chypre, Danemark, Espagne, Finlande, Gr�ce, Irlande, Luxembourg, Norv�ge, Su�de, Suisse, Royaume-Uni.

    Des rapports �taient ensuite �labor�s sur la situation dans les divers pays membres. Sur la base de ces rapports le Groupe d'�tudes a r�dig� un rapport sur la situation actuelle en Europe.

    Bien que le mandat concerne clairement l'organisation des soins de sant� dans les prisons, le Groupe d'�tudes a estim� qu'il �tait opportun d'inclure dans le rapport un chapitre sur les aspects sociaux de la vie p�nitentiaire qui a souvent un impact sur la sant� du d�tenu.

    Le questionnaire envoy� aux pays membres ne contenait pas de questions sur les aspects sociaux. Ce chapitre est donc bas� uniquement sur des renseignements obtenus durant les visites.

    Le Groupe d'�tudes souligne que le rapport dans son ensemble est bas� sur des informations obtenues gr�ce aux r�ponses au questionnaire ainsi que sur des discussions et des impressions lors des visites. Le rapport est publi� sous la responsabilit� des auteurs.

1. LA SITUATION GENERALE 

QUI EST RESPONSABLE EN MATIERE DE SOINS DE SANTE?

    Dans la plupart des pays europ�ens la mise en place de soins de sant� dans les prisons est de la responsabilit� du minist�re de la Justice; et les services m�dicaux sont organis�s par l'Administration p�nitentiaire. Toutefois, dans un petit nombre de pays (en Norv�ge, par exemple), cette mission incombe au minist�re de la Sant�. Dans certains pays, on a pris des mesures pour associer le minist�re de la Sant� � cette responsabilit�; tel est le cas en France.

    Dans tous les pays les soins de sant� sont financ�s par l'Etat. Au Royaume-Uni ce sont les administrations r�gionales qui ont la charge du budget; elles participent � l'organisation des services. En Italie c'est, en principe, le minist�re de la Justice qui supporte le co�t des soins de sant� dans les prisons.

    Dans la grande majorit� des pays, les d�tenus peuvent �tre hospitalis�s soit � l'int�rieur de la prison, soit � l'ext�rieur. A Chypre, en Lituanie, au Luxembourg, en Norv�ge, en Su�de et en Turquie, les soins hospitaliers ne peuvent �tre dispens�s qu'� l'ext�rieur de l'�tablissement p�nitentiaire.

L'ETAT ACTUEL DES PRISONS

    A quelques exceptions pr�s les �tablissements p�nitentiaires d'Europe sont des b�timents anciens, qui datent du si�cle dernier ou du d�but de notre si�cle; ils ont �t� construits en fonction des attentes, des normes et des conditions qui pr�valaient � l'�poque. Malgr� les efforts de reconstruction et de r�novation, il est tr�s difficile de modifier l'�tat originel.

    Cette situation est aggrav�e dans tous les Etas membres par le surpeuplement p�nitentiaire et par le fait que de nombreux d�tenus sont toxicomanes, sont s�ropositifs, souffrent de l'h�patite B ou sont porteurs du virus, ou encore sont atteints d'une maladie sexuellement transmissible. Dans certains pays on observe une augmentation du nombre de d�tenus atteints de tuberculose. On voit aussi augmenter, au sein de la population carc�rale le nombre des malades mentaux. L'am�lioration de l'hygi�ne est un aspect �troitement li� aux soins de sant�. Il y a beaucoup trop d'�tablissements dans lesquels les conditions d'hygi�ne sont inacceptables. De m�me, la traditionnelle douche hebdomadaire institu�e dans nombre de prisons est inacceptable du point de vue du maintien de l'hygi�ne personnelle. En outre, beaucoup d'�tablissements p�nitentiaires sont trop grands. Il peut difficilement s'y �tablir de bons contacts personnels entre d�tenus conseillers; de m�me, ces �tablissements se pr�tent mal � l'�laboration de programmes �ducatifs et � l'exercice d'une surveillance efficace. Bien souvent, l'h�pital de la prison a une grande capacit� en lits, ce qui est co�teux. Il serait plus commode de pouvoir disposer de petites unit�s r�gionales dans les h�pitaux civils, avec une infirmerie centrale plus petite, o� seraient soign�s les d�tenus faisant l'objet des mesures de s�curit� maximale.

    Les grands �tablissements ont leur propre personnel m�dical et soignant, alors que les autres disposent d'un personnel de soins de sant� primaires � temps partiel, qui peut inclure des psychologues, des psychiatres, des dentistes, des gyn�cologues. Tous les cas qui n�cessitent des soins sp�cialis�s sont orient�s vers des h�pitaux ou des dispensaires locaux ou r�gionaux. A chaque fois que les m�decins sont employ�s � temps partiel, les soins de sant� de base sont dispens�s par des assistants travaillant � plein temps et justifiant d'une formation universitaire, second�s par un personnel infirmier qualifi�.

    L'�valuation psychologique des d�tenus fait partie int�grante de l'offre de soins de sant�. On peut ainsi d�pister les troubles de la personnalit�, �valuer la n�cessit� d'un traitement, d�celer et pr�venir le d�veloppement d'un comportement d�pendant. Ainsi, il est n�cessaire de mettre en place des groupes de psychologie et de faire en sorte que les principaux �tablissements p�nitentiaires disposent non seulement de m�decins, mais aussi de psychologues.

    Travailler en milieu carc�ral n�cessite une formation sp�ciale. Le m�decin travaille dans des conditions de stress, et il a besoin d'une formation psychologique appropri�e. Il faudrait organiser des stages pr�paratoires � l'intention des professionnels qui souhaitent travailler en milieu carc�ral, que ce soit � plein temps ou � temps partiel. Il faut que le personnel m�dical et infirmier re�oive la formation et acqui�re l'exp�rience qui lui permettront de reconna�tre les sympt�mes de la toxicomanie et les dangers qui y sont associ�s; et il faut qu'il soit familiaris� avec des m�thodes de d�tection telles que le d�pistage rapide � partir d'�chantillons d'urine.

    Il faut �galement qu'il soit capable de d�celer diverses maladies et affections contagieuses et de sensibiliser les d�tenus � l'int�r�t de se soumettre volontairement � un d�pistage, un diagnostic et, le cas �ch�ant, � un traitement du sida, de l'h�patite B, des maladies sexuellement transmissibles et de la tuberculose.

2. LES PRINCIPAUX PROBL�MES AU NIVEAU DE LA 

    DISTRIBUTION DES SOINS 

2.1 ─ PERSONNES ATTEINTES DU SIDA OU D'UNE MST

    ─ PERSONNES ATTEINTES DE TUBERCULOSE
    ─ TOXICOMANES
    ─ PERSONNES ATTEINTES DE L'HEPATITE

    Dans tous les pays la population p�nitentiaire est caract�ris�e par des cas de toxicomanies, de sida, de maladies sexuellement transmissibles, de tuberculose et d'h�patite virale B ou C. Dans beaucoup de pays, ces cas sont en augmentation.

    Il est essentiel de disposer d'informations sur les maladies si l'on veut organiser efficacement le syst�me des soins de sant� en milieu carc�ral. Toutes les maladies qui viennent d'�tre cit�es sont synonymes d'un large �ventail de probl�mes qui sont de nature m�dicale, mais aussi de nature psychologique et sociologique.

    D'une mani�re g�n�rale, tous les d�tenus, d�s qu'ils sont �crou�s, subissent un examen m�dical visant � d�pister toute maladie contagieuse ou �volutive pouvant justifier des mesures d'isolement ou n�cessiter d'urgence un traitement. N�anmoins, cette proc�dure n'a pas toujours lieu pour toute les maladies, ni dans tous les pays.

SIDA

    En ce qui concerne le sida des tests de d�pistage HIV gratuits et anonymes sont mis � la disposition de tous les d�tenus dans la quasi-totalit� des pays enqu�t�s. En Gr�ce et en Turquie il n'y a pas de d�pistage syst�matique; et dans ces pays, on ne se fait pas un devoir d'informer les d�tenus sur les probl�mes HIV/SIDA.

    En Lituanie et en Hongrie les tests s�rologiques sont obligatoires. En Lituanie, l'anonymat n'est pas garanti; en Hongrie, les renseignements concernant les d�tenus s�ropositifs ne sont transmis qu'au Centre public de lutte contre les maladies.

    Dans tous les autres pays, les tests de s�ropositivit� ne peuvent �tre pratiqu�s sans le consentement de l'int�ress�; ils peuvent �tre recommand�s, mais non impos�s, aux d�tenus ayant un comportement � haut risque. Les d�tenus re�oivent toutes les informations pertinentes concernant les comportements � risque du point de vue de l'infection HIV, ainsi que les mesures de pr�vention. Des pr�servatifs sont couramment disponibles en Belgique, au Danemark, en Espagne, en Finlande, au Portugal, en Italie, en Suisse, en Norv�ge et en Su�de.

    En principe, les r�sultats des tests HIV sont communiqu�s aux d�tenus par les services m�dicaux internes. Les d�tenus s�ropositifs sont soign�s par le personnel m�dical p�nitentiaire. Les patients qui d�veloppent le sida sont admis dans un centre de soins public ou dans d'autres types d'�tablissements de soins, ext�rieurs � la prison.

    Dans plusieurs pays (France, Espagne, Finlande, Norv�ge, Irlande, Su�de, Italie, Luxembourg, Hongrie), les d�tenus s�ropositifs ou sid�ens re�oivent un soutien psychologique; ils ont droit � une psychoth�rapie et � d'autres formes d'assistance.

    En Irlande, les prisons comportent des quartiers sp�cialement destin�s � l'accueil des s�ropositifs et des sid�ens, qui font ainsi l'objet d'une v�ritable s�gr�gation. En Belgique et en Pologne un d�tenu sid�en ou s�ropositif a le droit d'�tre seul dans sa cellule; mais il pr�f�re parfois se trouver avec des cod�tenus atteints du m�me mal. En Su�de, au Royaume-Uni, en Suisse et en Pologne tout le personnel p�nitentiaire re�oit une information de base sur la s�ropositivit�, le sida, les comportements � risque, la pr�vention, les tests et le traitement. En revanche, en Lituanie par exemple il n'existe, en mati�re de formation, qu'un certain nombre de brochures que le Centre lituanien de lutte contre le sida envoie p�riodiquement dans les �tablissements p�nitentiaires. Dans les prisons grecques et turques les informations � ce sujet sont rares.

MST

    Le d�pistage et le traitement des maladies sexuellement transmissibles est obligatoire pour les d�tenus en France, en Lituanie et en Pologne. En Bulgarie, on pratique souvent un d�pistage s�rologique lors de l'incarc�ration. En Hongrie, les tests sont obligatoires lorsqu'on soup�onne la pr�sence de la maladie; en Espagne, le d�pistage et le traitement incombent au service m�dical p�nitentiaire. Au Portugal, le d�pistage des MST n'est syst�matique que pour la syphilis; il repr�sente un facteur de discrimination, car il n'est pratiqu� que sur la population f�minine.

    Dans tous les autres pays les MST ne font pas l'objet d'un d�pistage syst�matique, et il est rare que le probl�me soit per�u comme �tant particuli�rement dramatique.

    Quant aux m�thodes de traitement des MST, on en sait tr�s peu � ce sujet.

TUBERCULOSE

    Les cas de tuberculose pulmonaire ou extra-pulmonaire sont relativement fr�quents en Espagne et en Lituanie, mais ils sont extr�mement rares au Luxembourg, en Norv�ge et en Finlande.

    En Lituanie, une fluorographie est pratiqu�e sur tous les d�tenus lors de leur incarc�ration; les d�tenus qui pr�sentent une tuberculose pulmonaire active sont plac�s dans des �tablissements sp�ciaux.
    En Espagne, une radiographie est pratiqu�e sur tous les d�tenus qui pr�sentent les premiers sympt�mes de la maladie. Cette radioscopie pulmonaire n'est effectu�e qu'� des fins diagnostiques et n'est effectu�e que par un m�decin.

    En Pologne et en Hongrie, �galement, la tuberculose fait l'objet d'un d�pistage syst�matique par radioscopie. En France, l'article L.273 du Code de la Sant� publique pr�voit le d�pistage syst�matique de la tuberculose pulmonaire lors de l'incarc�ration. En vertu de l'article D.394 du Code de proc�dure p�nale, c'est aux conseils de r�gion qu'il appartient de proc�der au d�pistage. A chaque fois qu'on soup�onne un cas de tuberculose infectieuse, on doit isoler le patient et, le cas �ch�ant, l'hospitaliser.

    Il existe tr�s peu d'informations concernant la tuberculose dans les autres pays.

TOXICOMANIE, ALCOOLISME, HEPATITE

    La toxicomanie, l'alcoolisme et l'h�patite se rencontrent fr�quemment dans les prisons partout en Europe; mais seuls certains pays fournissent des statistiques en la mati�re.

    En Belgique, le taux de toxicomanie dans les prisons est de 42 %; le taux d'alcoolisme est de 34 %, et le taux de consommation habituelle de psychotropes est de 30 %. Au Royaume-Uni, environ 20 % des d�tenus sont toxicomanes. En Espagne, la lutte contre la toxicomanie dans les prisons est l'une des priorit�s des programmes de sant�.

    Les toxicomanes et les alcooliques inv�t�r�s sont soign�s dans une partie ad hoc de la prison ou dans un h�pital ext�rieur. En Pologne �galement, il existe des quartiers r�serv�s aux d�tenus toxicomanes. Au Portugal, il existe un centre pour jeunes toxicomanes; cet �tablissement, qui fonctionne en r�gime ouvert, emploie plusieurs psychiatres, psychologues, omnipraticiens etc. En Italie et en Autriche, tous les services de sant� p�nitentiaires coop�rent avec le syst�me national de sant� pour soigner la toxicomanie et l'alcoolisme.

    Les d�tenus des prisons su�doises peuvent se faire vacciner contre l'h�patite. Dans des pays comme la Finlande, la question ne se pose pas, car les cas d'h�patite sont extr�mement rares. En Lituanie une vaccination g�n�ralis�e contre l'h�patite B est jug�e souhaitable; si elle n'est pas effectu�e, c'est en raison des contraintes financi�res du pays.

INFORMATION, PR�VENTION ET EDUCATION

EN MATI�RE DE SANT�

    Dans tous les pays europ�ens on d�ploie de grands efforts pour mener une action d'information g�n�rale en mati�re de sant�. On met l'accent, en particulier, sur la pr�vention du sida et d'autres maladies sexuellement transmissibles. Dans la quasi-totalit� des prisons les d�tenus se voient remettre une brochure d'information. Dans certains pays, comme la Su�de, la Norv�ge, les Pays-Bas et le Royaume-Uni, les supports didactiques et les m�thodes utilis�s dans les programmes d'information sont tr�s avanc�s: on utilise une documentation �crite et un mat�riel audiovisuel; il y a des r�unions individuelles et des r�unions de groupe. Au Luxembourg et au Portugal, �galement, des expos�s sur ce th�me ont lieu syst�matiquement � l'intention des d�tenus. En Irlande, on utilise une bande dessin�e dont tout le monde peut saisir facilement le message. En Suisse et aux Pays-Bas, toute la documentation est traduite en plusieurs langues. Par contre, en Gr�ce, il n'existe actuellement aucun programme d'information des d�tenus concernant le sida; enfin, nous ne savons pas grand-chose en ce qui concerne l'information des personnes d�tenues dans les prisons turques.

2.2. Les maladies mentales en milieu carc�ral

    Dans presque tous les pays chaque �tablissement p�nitentiaire dispose d'un certain nombre de psychologues qui ont pour t�che de soigner les d�tenus atteints de troubles psychiatriques, et de les aider � s'adapter au milieu carc�ral.

    En Gr�ce et en Italie, des examens psychiatriques sont pratiqu�s syst�matiquement; en outre, tous les d�tenus passent devant l'�quipe de pr�vention du suicide, au cours de l'examen m�dical g�n�ral qu'ils subissent obligatoirement � leur arriv�e dans l'�tablissement.

    Dans tous les pays, les tribunaux ou d'autres autorit�s judiciaires comp�tentes peuvent demander qu'un rapport psychiatrique soit �tabli par un psychiatre/un psychologue avant et pendant le jugement. En France, il peut �tre proc�d� � un tel examen � la demande du d�tenu ou de sa famille/de ses amis. Au Luxembourg et en Lituanie, la chose n'est possible, respectivement, qu'avant et pendant le jugement. Dans certains pays tels que Chypre ou la Finlande, un examen psychiatrique peut �tre demand� m�me pendant la p�riode d'emprisonnement. En Europe, la l�gislation contient des dispositions relatives au traitement des d�linquants atteints de troubles psychiques; elle pr�voit la possibilit� d'un traitement � l'int�rieur ou � l'ext�rieur de l'�tablissement p�nitentiaire, g�n�ralement dans un h�pital psychiatrique public. Le facteur d�cisif n'est pas la gravit� de l'infraction mais l'�tat mental du d�linquant. En vertu de la l�gislation lituanienne les d�tenus atteints de troubles psychiques sont soign�s dans les h�pitaux du syst�me p�nitentiaire. En Espagne, un nouveau code p�nal est entr� en vigueur. S'agissant du Royaume-Uni, le CPT a pr�cis�, dans son rapport, qu'il a pris note d'une circulaire publi�e par le Home Office (minist�re de l'Int�rieur) en septembre 1990, qui attirait l'attention des tribunaux sur la possibilit� de confier le traitement des malades mentaux aux services de l'action sociale et sanitaire, au lieu de les soigner en milieu carc�ral; bien qu'on ait observ�, ces derni�res ann�es, une nette augmentation des prises en charge par le syst�me de soins de sant�, on continue de recenser dans les prisons un nombre consid�rable de malades mentaux. En Bulgarie, on sursoit � l'ex�cution de la peine de prison pendant la p�riode au cours de laquelle le d�tenu est consid�r� comme malade par le service m�dical p�nitentiaire responsable. D�s qu'on estime que le d�tenu est r�tabli, la p�riode d'emprisonnement reprend.

    Dans certains pays il existe des institutions psychiatriques sp�cialement destin�es aux d�tenus atteints de troubles psychiques. Au Portugal, le service p�nitentiaire dispose d'un dispensaire psychiatrique et de sant� mentale o� l'on envoie les d�tenus qui pr�sentent des troubles mentaux; les d�tenus dont le comportement autorise � supposer qu'ils souffrent de troubles mentaux peuvent �galement �tre dirig�s pour observation sur deux annexes psychiatriques, si leur traitement ne dure pas plus de 6 mois. En France, les d�tenus psychopathes sont accueillis dans deux unit�s centrales, respectivement � Metz-Barres et Ch�teau-Thierry. En Autriche, les d�tenus qui ne sont pas gravement atteints sont soign�s dans une unit� distincte comportant 45 lits, � la p�riph�rie imm�diate de Vienne. En Italie, il existe, � l'int�rieur du syst�me p�nitentiaire, six h�pitaux psychiatriques (HPJ) accueillant les malades mentaux qui n'ont pas �t� condamn�s � une peine de prison, mais qui sont plac�s en d�tention � la fois pour des raisons de s�curit� et � des fins de traitement.

    Il importe de souligner que les �tablissements psychiatriques sp�cialis�s dans l'accueil des d�tenus ne fonctionnent pas seulement comme des centres de d�tention, mais peuvent aussi �tre consid�r�s comme des centres de soins. La France et l'Italie offrent des exemples int�ressants de la coop�ration de plus en plus �troite entre l'institution carc�rale et les organismes locaux ─ et, � travers eux avec le syst�me de sant�, et notamment le syst�me de soins psychiatriques. En France, certaines prisons ─ au nombre de 18 ─ b�n�ficient du concours des services r�gionaux de sant� mentale, qui incluent une �quipe hospitali�re au complet, attach�e � un h�pital sp�cialis�. Cette �quipe travaille dans la prison, �tablit le diagnostic et reste au contact des d�tenus psychiatriques. Si, au cours de sa d�tention, un d�tenu pr�sente des signes de troubles mentaux n�cessitant un traitement, il est dirig� vers le psychiatre de la prison ou vers l'�quipe du service psychiatrique p�nitentiaire pertinent. En Italie, l'administration p�nitentiaire peut faire appel aux services nationaux comp�tents, en vertu des accords qu'elle a pass�s avec eux. Cet arrangement fonctionne dans les deux sens; en effet, d'une part, le personnel des services nationaux de sant� peut se rendre dans les prisons; et, d'autre part, les d�tenus ont la �permission� de se rendre dans une antenne ext�rieure du HPJ, comme celle qui existe � Castiglione delle Stiviere. En Belgique, les d�tenus plac�s en lib�ration conditionnelle peuvent b�n�ficier de soins compl�mentaires dispens�s par un psychiatre ou un psychologue.

2.3. Difficult�s li�es � la pr�cense de personnes d�tenues pour crime ou d�lit d'ordre sexuel

    D'une mani�re g�n�rale, le nombre des crimes et d�lits d'ordre sexuel a augment� consid�rablement au cours des quatre derni�res ann�es. Les d�tenus coupables de ce genre d'infraction ne constituent pas un groupe homog�ne. Ils sont d'�ge et d'intelligence variables et sont originaires de milieux tr�s divers.

    Dans certains pays, tels que l'Irlande et l'Espagne, on place ces d�linquants dans des quartiers d'isolement, afin de garantir leur s�curit�. En effet, on consid�re souvent qu'ils risqueraient, autrement, de subir un comportement agressif, et m�me des voies de fait, de la part de leurs cod�tenus. Au Danemark, il existe � Herstedvester un centre de soins qui applique depuis longtemps une psychoth�rapie intensive aux d�tenus coupables d'une infraction d'ordre sexuel. Dans les derni�res ann�es, on peut, suite � un avis m�dical, offrir une castration m�dicale aux personnes condamn�es pour d�lits graves d'ordre sexuel.

    On estime que la m�thode th�rapeutique la plus prometteuse en milieu carc�ral est celle qui se fonde sur le mod�le comportemental cognitif. Cette approche repose sur le principe selon lequel les actions de cette cat�gorie de d�linquants proc�dent de d�marches mentales anormales, qui leur permettent d'agir comme ils le font et de justifier ensuite leur comportement.

    L'objectif de l'approche comportementale cognitive est de contrecarrer ces d�marches mentales anormales et de permettre � l'int�ress� d'�tre sensible � l'impact de ses actes sur ses victimes et d'assumer la responsabilit� de ses actes. Il s'agit aussi de permettre aux d�linquants d'identifier les sentiments qui ont abouti au comportement d�lictueux. Le programme est g�n�ralement con�u pour un groupe de huit � dix participants. Gr�ce � l'interaction du groupe, il est beaucoup plus facile de contrer la d�marche par laquelle ces d�linquants tentent de nier ou de justifier les faits qui leur sont reproch�s.

3. ASPECTS SOCIAUX 

Introduction

    Les divers services d'assistance et de soins aux d�tenus ne peuvent �tre consid�r�s comme �tant totalement s�par�s les uns des autres. Il existe entre eux un certain nombre de liens, dans la mesure o� ils conjuguent leurs efforts pour contribuer au bien-�tre physique, mental et social des d�tenus.

    Ce ph�nom�ne implique, entre autres, que les effets des activit�s d'assistance ont souvent une port�e plus large que celle qui est officiellement pr�vue. L'aum�nier de la prison ─ pour ne prendre que cet exemple ─ peut contribuer � am�liorer l'�tat de sant� des d�tenus. Le corollaire de ce fait, c'est que si l'un des services fait d�faut ou fonctionne mal, les autres services peuvent s'en trouver affect�s. Certes, l'aide sociale aux d�tenus est tr�s importante pour leur �tat de sant�. Mais il est bien d'autres facteurs qui ont un impact essentiel sur les conditions de vie g�n�rales des prisonniers, et par cons�quent sur leur sant�; mentionnons les contacts et les relations avec autrui, notamment la pr�servation des liens familiaux et autres liens de caract�re personnel. La relation entre une d�tenue et son enfant en bas �ge occupe naturellement, � cet �gard, une place particuli�re.

3.1. Les services sociaux disponibles

    On constate que, dans beaucoup de pays, des travailleurs sociaux sont employ�s dans les prisons; toutefois on ne sait pas exactement quel en est le nombre, ni quels sont le contenu et l'ampleur de leurs t�ches.

    Les services sociaux p�nitentiaires sont parfois organis�s par l'administration p�nitentiaire; mais ils peuvent aussi, comme � Chypre, �maner des services de protection sociale publics, ou, comme c'est le cas du service de probation aux Pays-Bas et en Suisse, d'associations priv�es, �ventuellement subventionn�es par l'Etat.

    Dans l'id�al, chaque service social devrait disposer d'un personnel suffisamment nombreux pour s'acquitter de certaines t�ches fondamentales:

a. aider les d�tenus � prendre leur mal en patience et � s'adapter au milieu carc�ral;

b. aider les d�tenus � r�soudre leurs probl�mes sociaux (comme le stipule la Loi n�erlandaise sur les prisons) et � faire valoir leurs droits sociaux et leur droit � l'assurance sociale; cet aspect peut �tre particuli�rement urgent pour les personnes qui sont d�tenues depuis tr�s peu de temps et se trouvent en d�tention pr�ventive;

c. conseiller les prisonniers pour des questions touchant � leur avenir, leur instruction et leur formation professionnelle (comme cela se fait en Suisse);

d. pr�parer les d�tenus � leur lib�ration, et les aider � se r�int�grer v�ritablement dans la soci�t� (du point de vue personnel, financier et social); il faut se pr�occuper de trouver un emploi et un logement, ce qui peut n�cessiter l'aide des organismes de protection sociale comp�tents (c'est ce qu'on observe, par exemple, en Allemagne et aux Pays-Bas).

    Naturellement, les travailleurs sociaux concern�s ont besoin non seulement d'une formation professionnelle g�n�rale, mais aussi d'une formation sp�cialis�e, orient�e sur l'aide aux d�tenus (un peu comme la formation sp�cialis�e dont ont besoin les m�decins qui exercent en milieu p�nitentiaire).

    Un bon travailleur social doit �tre capable de communiquer et de participer directement au d�pistage et � la pr�vention du stress psychologique, des maladies contagieuses et des troubles psychiques.

3.2. Pr�servation des liens familiaux

    L'une des cons�quences in�vitables de l'emprisonnement est l'affaiblissement temporaire des contacts sociaux. Certes, les liens avec la famille ne sont pas enti�rement rompus, puisque dans la plupart des cas une visite d'une heure au moins, par semaine est autoris�e.

    Il reste que les relations familiales souffrent �norm�ment de cette situation. Tr�s souvent, le conjoint et les enfants du d�tenu ont le sentiment d'�tre autant punis que le d�tenu lui-m�me. Pire encore: dans bien des cas, les liens du mariage ne r�sistent pas. D'une mani�re g�n�rale, les contacts sociaux subissent, eux aussi le contrecoup de l'emprisonnement. Dans certains pays comme le Danemark et la Suisse, les d�tenus peuvent recevoir leur partenaire sans surveillance. En Su�de �galement, la surveillance est tr�s rel�ch�e.

    Si l'on veut emp�cher la contamination par HIV, il faut que des pr�servatifs soient mis � disposition lorsque le d�tenu/la d�tenue re�oit la visite de sa partenaire/de son partenaire, mais aussi lors de relations homosexuelles occasionnelles entre prisonniers. Dans certains pays cela n'est pas possible, car les relations homosexuelles sont officiellement interdites. Des pr�servatifs sont disponibles dans des lieux suffisamment discrets, tels que le centre m�dical (c'est le cas au Luxembourg) ou les cabines t�l�phoniques (c'est le cas aux Pays-Bas et en Suisse).

    Une question particuli�rement d�licate est celle des femmes d�tenues qui accouchent en prison ou qui ont d�j� un b�b� ou des enfants en bas �ge.

    Certains pays, tels que Chypre et la Norv�ge, ne pr�voient rien de particulier � cet �gard. Mais dans la grande majorit� des syst�mes il existe des dispositions particuli�res, applicables aux d�tenues qui sont m�res de famille. L'�ge jusqu'auquel les enfants ont le droit de s�journer en prison avec leur m�re est tr�s variable: en Allemagne, par exemple, cette autorisation existe pour tout enfant qui n'a pas atteint l'�ge de la scolarit� obligatoire; dans d'autres pays la limite d'�ge est plus basse (deux � trois ans en France et aux Pays-Bas, trois ans en Espagne et en Suisse, dix-huit mois en Finlande).

    Le s�jour d'enfants dans les prisons est une question tr�s controvers�e. Certains experts craignent des r�percussions dramatiques pour l'avenir de ces enfants, en raison des conditions non naturelles et coercitives qui sont, par d�finition, celles de la d�tention. Dans certains syst�mes, les d�tenus ont acc�s � des services ext�rieurs, tels que des cr�ches (France); dans d'autres syst�mes, il existe des centres sp�ciaux ou des quartiers sp�cialement am�nag�s dans la prison. En Espagne et en Suisse, par exemple, on trouve une cr�che pour les b�b�s, une garderie de jour et un service employant des assistantes maternelles. Au Portugal �galement, les enfants sont install�s dans un quartier sp�cial de la prison; les enfants qui, normalement, vivent � l'ext�rieur de la prison ont le droit de passer une partie de leurs vacances (quinze jours) en prison, en compagnie de leur m�re.

3.3. Influence de l'�tude, du travail, du sport et des activit�s de loisir sur l'�quilibre des d�tenus

3.3.1. L'�tude et le travail

    Le niveau moyen d'instruction des d�tenus en Europe est relativement bas (beaucoup de condamn�s n'ont m�me pas fait d'�tudes primaires). Tr�s souvent, on observe un manque de qualification professionnelle, qui aboutit au ch�mage et � une situation sociale d�favoris�e (logement, mode de vie etc.). L'�ge moyen des d�tenus est compris entre 31 et 33 ans.

    Il est tout � fait �vident que la majeure partie de la population carc�rale est handicap�e en mati�re de d�veloppement, de formation professionnelle et d'emploi. C'est pourquoi presque tous les syst�mes p�nitentiaires sont orient�s vers les formes les plus fondamentales de la r�int�gration sociale. En d'autres termes, tous les d�tenus se voient proposer une instruction primaire. Tr�s souvent, ils peuvent aussi b�n�ficier d'un enseignement de plus haut niveau et d'une formation professionnelle; toutefois, cette possibilit� n'existe pas dans tous les �tablissements; et elle n'est parfois accord�e qu'aux d�tenus dont la lib�ration est proche (c'est le cas au Danemark).

    Parfois la formation professionnelle met en jeu des activit�s r�mun�r�es (art et artisanat, � Chypre). Le contenu de la formation est variable: depuis la formation technique (en Su�de: cours d'utilisation de machines-outils, technologie du bois, placage et soudure de m�taux, travail �lectronique) jusqu'� la formation artistique.

    Le travail quotidien ordinaire est obligatoire pour tous les condamn�s; il donne lieu � une r�tribution tr�s modique, qui ne permet aux d�tenus que de s'acheter quelques articles � la boutique de la prison: tabac, sucreries, boissons, etc. Il arrive que la r�tribution soit un peu plus �lev�e parce que des accords professionnels favorables ont �t� pass�s entre la prison et telle ou telle branche d'activit� (c'est le cas au Luxembourg).

    Les r�gles p�nitentiaires tendent g�n�ralement � promouvoir des types de travaux ax�s sur le d�veloppement ou l'am�lioration de comp�tences que les d�tenus puissent utiliser ult�rieurement. Mais ces tentatives pour faire participer les d�tenus � des activit�s qui pr�sentent un int�r�t pour eux ne sont pas toujours couronn�es de succ�s.

    Compte tenu du ch�mage �lev� qui s�vit dans la plupart des pays europ�ens, trouver du travail pour tous les prisonniers ne va pas sans difficult�s; il existe m�me des �tablissements qui n'offrent aucune possibilit� de travail; c'est le cas de la maison d'arr�t d'Anvers; beaucoup de pensionnaires de cet �tablissement profitent ─ ce qui ne saurait surprendre ─ de l'heure de consultation m�dicale pour quitter les cellules o� ils sont enferm�s vingt-trois heures par jour.

    La formation professionnelle est supervis�e soit par le minist�re de la Justice (par l'interm�diaire des cours externes), soit par le minist�re de l'Education (c'est le cas au Portugal). Dans certains syst�mes, les d�tenus qui font des �tudes, quel que soit le niveau de celles-ci (depuis le niveau primaire jusqu'au niveau avanc�), per�oivent la m�me r�tribution que les prisonniers qui travaillent. En outre les p�riodes de travail et les p�riodes d'�tude ont lieu au m�me moment de la journ�e.

    La formation professionnelle est certes co�teuse. Malgr� tout, il est souhaitable que les programmes de formation propos�s aux d�tenus soient aussi nombreux que possible; tout d�tenu qui n'a pas fait d'�tudes primaires a la possibilit� de combler cette lacune pendant son s�jour en prison.

    L'octroi d'une r�mun�ration serait stimulant. Le fait de responsabiliser le prisonnier est important pour son �quilibre. L'article 37 de la Loi allemande sur les prisons proc�de d'une approche tr�s saine:

1. Le but principal du travail, d'une occupation ergoth�rapeutique, d'une formation professionnelle et d'une �ducation postprimaire est de dispenser au d�tenu les connaissances th�oriques et pratiques qui lui permettront de gagner sa vie apr�s sa lib�ration, ou de conserver et d�velopper les connaissances et les savoir-faire qu'il poss�de d�j�.

2. L'autorit� p�nitentiaire devrait confier au d�tenu une t�che productive au plan �conomique, en tenant compte de ses capacit�s, de ses comp�tences et de ses go�ts.

3. Les d�tenus ayant un minimum d'aptitude doivent se voir proposer une formation, un recyclage ou une reconversion professionnel(le), ainsi qu'une participation � d'autres activit�s relevant de la formation professionnelle ou de l'�ducation permanente.

4. Lorsqu'il n'est pas possible de donner � un d�tenu qui est apte au travail une t�che productive au plan �conomique, ni la possibilit� de participer � une activit� de loisir, il convient de lui assigner un autre type d'occupation raisonnable.

5. Si un d�tenu n'est pas apte � s'acquitter d'une t�che productive en termes �conomiques, il convient de lui attribuer une occupation quelconque, dans un souci d'ergoth�rapie.

3.3.2. Le sport

    La pratique du sport en prison d�pend essentiellement de la pr�sence d'installations et de moniteurs. Une activit� sportive est toujours pr�vue sous une forme ou sous une autre pour les d�tenus; on privil�gie les sports collectifs (football, volley-ball, handball).

    Au Royaume-Uni, aux Pays-Bas et en Suisse, certains �tablissements sont bien pourvus en �quipements de remise en forme. Dans d'autres pays les prisons sont moins bien �quip�es � cet �gard.

    Quand les �quipements font d�faut, l'improvisation joue souvent un r�le capital; et certains endroits � l'int�rieur de la prison sont r�serv�s � l'exercice physique; c'est ainsi que la lutte est souvent pratiqu�e dans les prisons grecques.

    Tous les syst�mes pr�voient une promenade quotidienne � l'air libre: une heure, en Su�de et en Allemagne; deux heures le matin et deux heures dans la soir�e, en Italie; ou simplement, � l'heure choisie par le d�tenu.

    La fr�quence de la pratique sportive est tr�s variable d'un pays � l'autre; elle est, par exemple, de deux fois par semaine aux Pays-Bas et d'une heure par jour, au minimum, en Finlande. En Su�de, au Portugal et en Suisse, certains �tablissements organisent des matches qui opposent les d�tenus � des clubs ext�rieurs.

    Dans les prisons belges le sport est obligatoire, sauf pour les d�tenus malades ou �g�s.

3.3.3. Activit�s de loisir

    Un type de loisir tr�s courant est celui qui consiste � regarder la t�l�vision. Dans beaucoup de pays, le t�l�viseur individuel dans la cellule est autoris�; dans d'autres pays, les d�tenus doivent se rendre dans une salle commune s'ils veulent regarder la t�l�vision. Partout on trouve des jeux comme les �checs ou le billard. La prison dispose en g�n�ral d'une biblioth�que; et les d�tenus peuvent �couter les �missions d'une radio nationale au moins.

    Il y a parfois des s�ances de cin�ma; dans certains pays (par exemple en Su�de, � Chypre, en Gr�ce et en Suisse), des repr�sentations th��trales et/ou des concerts sont donn�s dans l'enceinte de la prison; les prisons ouvertes organisent des visites de mus�es (c'est le cas au Luxembourg). En principe, l'initiative de telles excursions culturelles revient au directeur de la prison et au personnel p�nitentiaire. Dans beaucoup de pays il existe des associations, telles

que la Croix-Rouge, qui se consacrent � la visite des d�tenus isol�s. Notons aussi le r�le des associations priv�es qui, en particulier, fournissent une aide personnalis�e aux d�tenus de telle ou telle origine.

    L'existence de salles de bricolage est tr�s importante pour la d�tente et le bien-�tre des d�tenus; mais il va sans dire que la pr�sence de tels locaux n'est pas garantie partout.

4. QUELQUES EXEMPLES DE DROITS FONDAMENTAUX DES D�TENUS, AVEC LA QUESTION �THIQUE QUI S'Y RATTACHE 

Introduction

    Il convient d'indiquer, tout d'abord, que le statut juridique du d�tenu doit se rapprocher autant que possible du statut juridique du citoyen libre; les restrictions qui p�sent sur sa situation doivent se limiter au minimum n�cessaire et � ce que pr�voit la loi. En cas de restrictions sp�ciales, les autorit�s p�nitentiaires sont tenues de justifier les mesures prises en en d�montrant la n�cessit�; elles sont tenues �galement d'appliquer les normes l�gales. En particulier les droits constitutionnels, fondamentaux et civils qui sont ceux des citoyens doivent �tre int�gralement respect�s dans l'enceinte de la prison. Un contr�le juridictionnel doit s'exercer � cet �gard.

    La Cour europ�enne des Droits de l'Homme a rejet� la th�orie selon laquelle une condamnation � une peine d'emprisonnement impliquerait ipso facto certaines aggravations et restrictions, telles que des �l�ments r�pressifs qui s'imposeraient d'eux-m�mes (la th�orie dite des �restrictions implicites�).

    Etant donn� que le pr�sent rapport est ax� sur les services de soins m�dicaux pour les d�tenus, nous ne pouvons aborder que tr�s bri�vement la question du statut juridique du d�tenu. Mais ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que le respect des droits et de la dignit� de la personne a, plus ou moins directement, une influence consid�rable sur l'�tat de sant� des d�tenus.

    Deux �l�ments du statut juridique sont � prendre en consid�ration ici: la garantie des droits substantiels, et la possibilit� de faire valoir ses droits dans une proc�dure l�gale.

    Compte tenu du caract�re sp�cifiquement coercitif de la vie p�nitentiaire, une proc�dure bien structur�e est de la plus haute importance.

    L'absence de dispositions juridiques ne signifie pas n�cessairement que les droits du d�tenu sont n�glig�s: la r�alit� est parfois plus satisfaisante qu'on ne pourrait le croire au vu de la situation juridique. Inversement, telle r�gle �crite peut sembler ad�quate, qui n'est pas suivie dans la pratique. N�anmoins, un certain nombre de droits fondamentaux, y compris en mati�re de soins m�dicaux, sont plus faciles � mettre en œuvre lorsqu'ils sont �nonc�s dans des textes officiels.

    Les R�gles p�nitentiaires europ�ennes ont incontestablement une influence et une valeur morale. En outre, les d�tenus ont acc�s � la Commission europ�enne des Droits de l'Homme, au Comit� pour la pr�vention de la torture et au Comit� des droits de l'homme de l'ONU.

4.1. Le droit d'�lever une r�clamation

    Il convient de distinguer deux types de r�clamations:

A. R�clamations visant la qualit� du traitement m�dical.

    Seul un m�decin peut porter une appr�ciation sur un traitement m�dical professionnel, � la lumi�re des codes disciplinaires m�dicaux ou en proc�dant � un examen m�dical. Les examens m�dicaux peuvent �tre pratiqu�s syst�matiquement, ou bien ordonn�s par le minist�re de la Justice dans un but de contr�le des soins m�dicaux.

    Pour que la r�clamation puisse �tre effective, il faut accorder aux d�tenus le droit d'acc�der librement et directement (sans qu'une quelconque censure s'exerce) au service des inspections m�dicales, et de saisir les conseils de discipline m�dicaux.

B. R�clamations visant l'organisation et la fourniture des soins m�dicaux.

    Dans les cas de ce genre les d�tenus doivent pouvoir acc�der librement et directement � un organe judiciaire, une commission des r�clamations, un m�diateur ou toute autre autorit� juridiquement habilit�e � examiner la r�clamation et � rendre une d�cision obligatoire.

4.2. Le secret m�dical

    Les normes g�n�ralement observ�es dans les prisons en mati�re de secret m�dical sont inf�rieures � celles qui pr�valent au sein de la soci�t� civile ordinaire. Lorsque les crit�res universels sont appliqu�s, seul le personnel m�dical p�nitentiaire est autoris� � prendre connaissance du dossier m�dical des d�tenus. Quant aux autres personnes, par exemple les membres du personnel p�nitentiaire g�n�ral, on ne leur communique l'information qu'� des fins professionnelles, et � condition qu'elles ne la divulguent pas. Le consentement du d�tenu concern� est n�cessaire; mais des d�rogations sont jug�es possibles, par exemple lorsqu'un d�tenu atteint d'une maladie transmissible cherche � dissimuler son �tat, et que ses cod�tenus sont alors expos�s � des risques.

    Il faut que les conditions dans lesquelles la divulgation d'une information m�dicale est autoris�e soient r�gies par la loi; cette exigence s'applique �galement aux proc�dures � suivre en pareil cas.

4.3. Le choix du m�decin

    Les d�tenus sont soign�s par le personnel m�dical de la prison; tel est le principe g�n�ral. Dans certains syst�mes cette r�gle ne souffre aucune exception. Dans d'autres syst�mes les d�tenus ont le droit de s'adresser, � leurs frais, � un m�decin priv� (Portugal); en Su�de, ils peuvent s'adresser � un m�decin priv�, d�s lors que ce choix est consid�r� comme m�dicalement indiqu� et justifi�.

    Les d�tenus qui sont autoris�s � sortir de l'�tablissement sont consid�r�s comme constituant une cat�gorie sp�ciale. Dans plusieurs syst�mes, ceux des prisonniers qui ont la qualit� de pr�venu ont le droit de consulter, � leurs frais, leur m�decin personnel (c'est le cas, par exemple, aux Pays-Bas). Ceci est conforme au paragraphe 98 des R�gles p�nitentiaires europ�ennes (possibilit� de recevoir la visite et les soins de son m�decin ou de son dentiste personnel, si la demande est raisonnablement fond�e). Cette disposition repose sur le principe de la pr�somption d'innocence. Ainsi, les restrictions applicables aux d�tenus ne peuvent d�passer le strict n�cessaire.

    Le recours � plusieurs m�decins peut provoquer des situations ambigu�s: les m�dicaments prescrits peuvent diff�rer de ceux qui sont habituellement administr�s dans la prison; en outre, ceux des d�tenus qui n'ont pas droit � un m�decin priv� risquent d'�prouver un sentiment d'injustice.

4.4. Les droits sp�cifiques des minorit�s ethniques

    La plupart des �tablissements p�nitentiaires abritent un nombre non n�gligeable de personnes appartenant � une minorit� ethnique (le syst�me p�nitentiaire irlandais constitue � cet �gard une exception), c'est-�-dire de personnes qui sont susceptibles d'�tre diff�rentes par leur religion, leur culture, leur langue, leur mode de vie et leurs habitudes alimentaires.

    Ne pas vouloir tenir compte de ces diff�rences c'est porter atteinte au bien-�tre g�n�ral du d�tenu. Dans beaucoup d'�tablissements la cuisine est �quip�e de mani�re � pouvoir proposer des types de nourriture particuliers, qui correspondent aux diff�rentes cultures repr�sent�es.

    Si l'on veut mettre en œuvre une v�ritable tol�rance religieuse, il est essentiel que l'administration p�nitentiaire �tablisse des contacts avec divers ministres du culte et avec des conseillers. On doit �galement respecter les principaux jours de f�te observ�s dans les diff�rentes religions repr�sent�es; cette remarque concerne plus particuli�rement le travail obligatoire et les aliments sp�ciaux.

    La langue est un autre facteur potentiel d'isolement. On peut, pour faire tomber les barri�res linguistiques, regrouper les d�tenus qui connaissent, du fait de la langue, des probl�mes de communication comparables. Il est bon, aussi, de recourir aux services d'un interpr�te et de faire appel � des associations ext�rieures dont les membres parlent la langue minoritaire en question.

4.5. Exp�rimentation m�dicale

    En raison de la vuln�rabilit� des d�tenus, qui sont dans une situation de grande d�pendance, il est difficile d'�valuer la r�alit� de leur consentement. Il serait donc trop dangereux de proc�der, sur la personne des d�tenus, � une forme quelconque d'exp�rimentation m�dicale. Tel est le point de vue exprim� dans les codes d�ontologiques g�n�raux de l'Association m�dicale mondiale.

4.6. Gr�ves de la faim

    Les gr�ves de la faim comptent parmi les plus grands dilemmes auxquels sont confront�s, de temps � autre, les directeurs d'�tablissements p�nitentiaires.

    Certains pays (par exemple la Finlande) s'en tiennent � la D�claration de Tokyo de l'AMM: les d�tenus qui font la gr�ve de la faim sont inform�s des cons�quences de leur action, et leur �tat de sant� est surveill�; une hospitalisation a lieu, le cas �ch�ant (si le patient y consent); on donne aux int�ress�s des conseils sur l'importance d'absorber des liquides. Aucun traitement n'est dispens� si le d�tenu s'y refuse.

    Dans d'autres pays (Espagne et Su�de), on peut proc�der � une alimentation forc�e, si le m�decin estime qu'un danger imm�diat p�se sur la vie ou la sant� du patient.

    Dans certains pays (en Italie par exemple), l'alimentation forc�e est interdite, sauf si le gr�viste de la faim n'est plus en mesure d'avoir conscience des cons�quences de son refus. Partout en Europe on juge important d'informer les gr�vistes de la faim des cons�quences possibles de leur d�marche; cette information intervient d�s le d�but, et de mani�re syst�matique.

    En 1985 le ministre de la Justice des Pays-Bas a publi� des principes directeurs sur la conduite � tenir en cas de gr�ve de la faim chez les d�tenus. Ces principes doivent �tre interpr�t�s dans le contexte du droit qui est reconnu � toute personne de r�gler comme elle l'entend les questions concernant sa sant�. Il est capital que le m�decin rappelle au gr�viste de la faim, � intervalles r�guliers, quels sont les effets de son action; et il est �galement capital que soit clairement enregistr�e la volont� de l'int�ress� de poursuivre la gr�ve. Celui-ci doit faire une ou plusieurs d�clarations, � l'adresse du directeur et du m�decin de la prison, indiquant qu'il ne souhaite pas que sa gr�ve de la faim soit interrompue s'il tombe dans le coma.

    On estime que la mise en place d'une �quipe permanente n'est pas la meilleure solution pour pourvoir aux besoins des gr�vistes de la faim. Il est clair que l'intervention de sp�cialistes ext�rieurs qui jouissent de la confiance du d�tenu peut �tre extr�mement utile, � condition que l'int�ress� consente � cette intervention. Mais il ne faut pas oublier que c'est le m�decin de la prison qui demeure juridiquement et m�dicalement responsable; et par cons�quent, on doit toujours le consulter, lui aussi.

4.7. Peines de substitution

    Dans certains cas le droit p�nal pr�voit des peines non privatives de libert�, qui se substituent � des peines d'emprisonnement de courte dur�e; il peut s'agir d'un travail d'int�r�t g�n�ral � effectuer pendant un certain nombre d'heures/de jours.

    Une autre solution est la prison ouverte, pour les d�tenus qui purgent la phase ultime de leur peine. Dans les prisons ouvertes, les gens ont g�n�ralement moins de probl�mes de sant� que dans les prisons traditionnelles.

    L'application d'une peine de substitution requiert le consentement de l'int�ress�; en effet, le travail forc� est interdit par l'article 4 de la Convention europ�enne de sauvegarde des droits de l'homme et des libert�s fondamentales.

    Un inconv�nient qui existe, dans le cas des peines de substitution, c'est que les juges ont tendance � prononcer cette peine en remplacement d'une amende ou d'une condamnation avec sursis, plut�t qu'en remplacement d'une peine ferme. Ce ph�nom�ne, � propos duquel on parle d'��largissement du filet� ou des �effets �largissants des peines de substitution�, est particuli�rement visible aux Pays-Bas.