Retour Kosovo* : combler les lacunes dans le domaine de la justice transitionnelle et de la cohésion sociale, de la liberté des médias et des droits des femmes et de l'égalité de genre

Mémorandum
Kosovo* : combler les lacunes dans le domaine de la justice transitionnelle et de la cohésion sociale, de la liberté des médias et des droits des femmes et de l'égalité de genre

« Plus de deux décennies après le conflit armé au Kosovo, la cohésion sociale est toujours entravée par l'impunité des crimes liés à la guerre, les cas non résolus de personnes disparues, le manque d'accès à des réparations pour toutes les victimes de guerre, les obstacles au retour durable des personnes déplacées et les divisions ethniques », a déclaré aujourd'hui la Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Dunja Mijatović, en publiant un Mémorandum à la suite de sa mission au Kosovo du 30 mai au 3 juin.

La Commissaire souligne qu'il convient de remédier efficacement aux lacunes actuelles en matière d'enquêtes, de poursuites et de jugement des crimes en temps de guerre qui relèvent désormais de la responsabilité du système judiciaire du Kosovo. Elle souligne également la nécessité de renforcer la coopération avec les Chambres spécialisées pour le Kosovo et le Bureau du Procureur spécialisé. « Toutes les victimes civiles de la guerre, sans exception, devraient avoir accès à des réparations, et des conditions de sécurité devraient être en place pour permettre aux victimes de crimes de violence sexuelle en temps de guerre de se manifester », a-t-elle déclaré.

En ce qui concerne le sort des personnes disparues, la Commissaire encourage Belgrade et Pristina à résoudre leurs différends et à coopérer à la résolution des cas restants, en plaçant les familles des personnes disparues au centre de toutes leurs considérations.

De nombreux obstacles aux retours durables subsistent et doivent être levés, notamment ceux affectant la lutte contre les crimes qui sapent le sentiment de sécurité des rapatriés potentiels et les obstacles à l’exercice des droits de propriété malgré l'amélioration du cadre juridique sur ce point. « L'absence persistante d’exécution de l'arrêt de la Cour constitutionnelle du Kosovo concernant le monastère de Visoki Dečani pose des questions importantes concernant le respect de l'État de droit. L’arrêt doit être rapidement mis en œuvre », a-t-elle déclaré.

Regrettant la persistance des divisions ethniques, la Commissaire souligne l'importance de développer un système éducatif unique, respectueux des différences culturelles et linguistiques de toutes les communautés. Elle insiste sur la nécessité de remédier aux lacunes dans la mise en œuvre de la Loi de 2006 sur l'utilisation des langues et de prendre des mesures résolues à court terme pour assurer la protection et la promotion des droits linguistiques des communautés non majoritaires.

En ce qui concerne la liberté des médias, la Commissaire appelle à la mise en œuvre complète de la législation existante, en particulier en ce qui concerne l'accès à l'information. « Les journalistes doivent pouvoir mener leur travail vital à l'abri des poursuites stratégiques contre la participation publique (SLAPP) et de la violence. Le harcèlement doit cesser ainsi que l'impunité pour les crimes contre les journalistes, notamment pour les 13 cas de meurtres et de disparitions de journalistes serbes et albanais du Kosovo, survenus entre 1998 et 2005 », a-t-elle déclaré. Elle a également souligné l'importance de fournir un financement durable au Conseil de la presse et aux médias de service public pour les protéger de toute ingérence indue. Dans le même temps, elle a appelé les journalistes à adhérer à des codes de conduite éthique.

Sur les questions relatives aux droits des femmes et à l'égalité de genre, la Commissaire a constaté un écart important entre la législation domestique et la situation sur le terrain, dû notamment à la persistance de normes patriarcales profondément ancrées dans la société. Elle s'inquiète de la faible participation des femmes au marché du travail, à la vie politique et à la prise de décision, ainsi que de leur position en matière d'éducation, de santé et de répartition des responsabilités, qui se sont aggravées en raison de la pandémie de covid-19. La Commissaire a noté avec intérêt les mesures prises dans le domaine de l'accès des femmes aux droits de propriété et à l'héritage et les modifications annoncées du Code civil pour remédier aux lacunes restantes. Enfin, la Commissaire souligne la nécessité d'une harmonisation du droit interne avec la Convention d'Istanbul et de sa mise en œuvre effective, ainsi que d'une formation continue des membres de l'appareil judiciaire et des agents de la force publique dans ce domaine.

* Toute référence au Kosovo, qu'il s'agisse du territoire, des institutions ou de la population, dans le présent texte, doit être comprise dans le plein respect de la Résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité des Nations Unies et sans préjudice du statut du Kosovo.

Strasbourg 18/10/2022
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