Retour Le Comité anti-torture publie un rapport concernant sa visite à Chypre

Dans un rapport publié aujourd’hui sur Chypre, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) du Conseil de l’Europe se montre préoccupé par des allégations récurrentes de mauvais traitements infligés par la police et par les lacunes du système actuel d’enquêtes sur de telles allégations. Le rapport examine également la situation des migrants placés dans le centre de rétention de Menoyia ainsi que celle des personnes incarcérées à la prison centrale de Nicosie. Il critique aussi les conditions matérielles médiocres constatées à l’hôpital psychiatrique d’Athalassa et au Foyer social « Ariadni ». Le CPT demande à ce que des mesures déterminées soient prises pour s’attaquer au problème des mauvais traitements policiers et remédier aux différents manquements identifiés, y compris par le biais de modifications législatives.
Le Comité anti-torture publie un rapport concernant sa visite à Chypre

Au cours de sa visite effectuée en février 2017 dans le pays, le CPT a recueilli un certain nombre d’allégations crédibles de mauvais traitements physiques et/ou psychologiques infligés par des policiers à des personnes privées de liberté (y compris des mineurs), notamment dans les Commissariats centraux de la police de Limassol et Paphos. Les mauvais traitements allégués consistaient essentiellement en des gifles et des coups de poing et de pieds portés à la tête et à d’autres parties du corps ; ils incluaient aussi des insultes, des menaces et des actes d’intimidation. Ont également été recueillies un certain nombre d’allégations de maltraitance physique, d’insultes et de propos racistes envers des migrants placés en rétention au centre de Menoyia et plusieurs allégations de mauvais traitements infligés aux personnes retenues par des policiers du Service des étrangers et de l’immigration alors qu’elles étaient escortées vers l’aéroport. Le CPT conclut que le risque que les personnes privées de liberté par la police – les ressortissants étrangers en particulier – soient victimes de mauvais traitements demeure, notamment lors de leur arrestation, pendant l’interrogatoire ainsi que dans le cadre d’un placement en rétention et de mesures d’éloignement. Les autorités chypriotes doivent agir de manière déterminée pour s’attaquer au problème des mauvais traitements policiers et encourager un changement culturel au sein de la police chypriote. De plus, des mesures doivent être prises pour s’assurer que des garanties formelles contre les mauvais traitements soient mises en pratique de manière effective.

Les constatations faites par le CPT mettent également en lumière les lacunes du système actuel d’enquêtes sur les allégations de mauvais traitements infligés par la police et préconisent que soient adoptées un certain nombre d’améliorations visant à renforcer l’effectivité de ces enquêtes. Dans leur réponse, les autorités chypriotes réaffirment leur tolérance zéro à l’égard des mauvais traitements policiers et annoncent une série de mesures prises pour remédier à ce problème, notamment l’intensification de la formation de la police.

Dans les prisons centrales de Nicosie, la délégation du CPT a recueilli plusieurs allégations de violences physiques que des membres du personnel auraient fait subir à des détenus et entendu de nombreuses allégations concernant des insultes proférées par le personnel pénitentiaire et des menaces de représailles en cas de plaintes déposées par des détenus. Les efforts positifs effectués pour améliorer les conditions de détention sont mis à mal par la surpopulation carcérale persistante dans les prisons centrales de Nicosie. Certains espaces, notamment la pièce située dans la zone d’admission du poste de garde, ne devraient plus être utilisés pour héberger des détenus car les conditions de détention pourraient y être considérées comme étant inhumaines et dégradantes. Des recommandations sont également formulées, entre autres, pour lutter contre la violence entre détenus, promouvoir le professionnalisme du personnel, améliorer la façon dont sont traités les détenus étrangers et pour renforcer les garanties procédurales dans le système disciplinaire. Il reste également nécessaire de renforcer certains aspects des services de santé.

Dans leur réponse, les autorités font notamment référence aux nouvelles politiques et procédures permettant de prévenir les mauvais traitements, toute forme d’abus de pouvoir et les menaces de représailles et de lutter contre la violence entre détenus. Des informations sont également fournies concernant l’inauguration d’un nouveau bâtiment dans la prison et les modifications législatives et réglementaires à venir.

S’agissant de l’hôpital psychiatrique d’Athalassa, le CPT juge consternantes les conditions matérielles nettement inférieures à la norme et critique le manque d'activités thérapeutiques, d’ergothérapie et de réhabilitation proposées ainsi que la mauvaise réglementation encadrant le recours aux moyens de contention. Il recommande également des amendements législatifs permettant de renforcer les garanties offertes aux patients souffrant de troubles psychiatriques. S’agissant des foyers sociaux, le CPT salue les efforts continus de désinstitutionalisation mais critique le cadre législatif inadéquat régissant le fonctionnement de ces foyers ainsi que le placement et le séjour involontaires des pensionnaires. Le CPT se montre également préoccupé par les mauvaises conditions de vie et le manque d‘hygiène personnelle des pensionnaires tels que constatés au foyer « Ariadni ».

Dans leur réponse, les autorités chypriotes ont informé le CPT de la rénovation de plusieurs pavillons de l’hôpital psychiatrique d’Athalassa et de la mise en place de deux comités ayant commencé à réfléchir à la révision de la loi sur les soins psychiatriques et à établir un nouveau protocole hospitalier, à la lumière des recommandations formulées par le CPT. Des informations sont également données sur l’état d’avancement de la révision de la législation relative à la protection sociale. Les autorités chypriotes reconnaissent le mauvais état des choses tel que constaté au foyer « Ariadni » et affirment que des mesures sont prises afin d’y améliorer les conditions de vie.

Les principales constatations faites par le CPT sont décrites dans le résumé exécutif du rapport.

Le rapport et la réponse ont été rendus publics à la demande des autorités chypriotes.

26/04/2018
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