Retour Le CPT publie le rapport relatif à sa visite au Royaume-Uni : sévères critiques formulées envers l’emballement de la violence et le manque de sécurité régnant en prison et mise en lumière de l’inadéquation des garanties permettant de protéger les patients dans les établissements psychiatriques

Dans le rapport publié aujourd’hui, le Comité pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) du Conseil de l’Europe exprime de vives inquiétudes quant au manque de sécurité régnant, pour les détenus et le personnel pénitentiaire, dans les prisons en Angleterre. Parmi les causes figurent l’incontrôlable spirale de la violence en milieu carcéral, les régimes appauvris et la surpopulation chronique. Le rapport analyse également la façon dont sont traités les patients dans un certain nombre d’hôpitaux psychiatriques. Il tient compte de l’approche bienveillante du personnel dans ces établissements mais formule des critiques quant aux garanties entourant le traitement obligatoire, le recours à la force vis-à-vis des patients ainsi que le recours à un isolement de longue durée et à l’enfermement à clé durant la nuit dans les hôpitaux de haute sécurité. Le traitement réservé aux personnes privées de liberté par la police et la situation régnant dans les centres de rétention administrative pour migrants sont des sujets également couverts par le rapport.
Le CPT publie le rapport relatif à sa visite au Royaume-Uni : sévères critiques formulées envers l’emballement de la violence et le manque de sécurité régnant en prison et mise en lumière de l’inadéquation des garanties permettant de protéger les patients dans les établissements psychiatriques

Le CPT se félicite, dans ce rapport, du fait que les autorités aient récemment reconnu la nécessité de réformer le système pénitentiaire en Angleterre et au Pays de Galle. Il souligne toutefois que si des mesures concrètes et déterminées n’étaient prises rapidement afin de réduire de manière significative la surpopulation carcérale actuelle, l’amélioration du régime de détention envisagée par les autorités dans le cadre du programme de réforme demeurera irréalisable.

Le CPT est profondément préoccupé par le niveau de sévérité manifeste de la violence généralisée  dans tous les établissements pénitentiaires visités, notamment la violence entre détenus et les agressions visant des membres du personnel. Les blessures des détenus et du personnel consignées sur une période de trois mois dans les prisons visitées comprenaient des cas d’eau bouillante versée sur des victimes (entraînant de sérieuses brûlures sur 10 % du corps de celles-ci), de plaies dites ‘shank’ (causées par des couteaux de fortune), de lésions à la tête, des nez et des dents cassées. Souvent, ces blessures entraînaient une hospitalisation et, dans un cas en particulier, avaient entraîné la mort du détenu. Tandis que le nombre d’incidents violents consignés dans l’ensemble des établissements pénitentiaires visités atteignait des niveaux inquiétants, le CPT pense que ces chiffres sont sous-estimés par rapport à la réalité du nombre d’incidents survenus et ne permettent par conséquent pas d’obtenir une vision juste de la gravité de la situation.

L’effet cumulatif des défaillances systémiques constatées fait qu’aucune prison ayant été visitée ne pouvait être considérée comme étant sûre ni pour les détenus ni pour le personnel. Le CPT recommande de prendre des mesures concrètes pour ramener les établissements pénitentiaires sous le contrôle effectif du personnel, renversant la tendance de l’escalade de la violence, et d’investir bien plus dans la prévention de la violence. Cela requière notamment un rapide renforcement des effectifs afin d’instaurer un environnement sûr pour les détenus et les membres du personnel pénitentiaire.

Le CPT souligne que de nombreux aspects de la vie en prison étaient détériorés par le phénomène de la surpopulation carcérale. Les régimes de détention étaient inadaptés dans l’ensemble des prisons visitées ; de très nombreux détenus passaient 22 heures sur 24 enfermés dans leur cellule. La situation était particulièrement difficile pour les mineurs qui étaient placés sur une liste dite de ‘séparation’ et qui pouvaient être enfermés seuls dans leur cellule 23 heures et demi sur 24. De l’avis du CPT, détenir des mineurs dans de telles conditions s’apparente à un traitement inhumain et dégradant. Les constatations faites ainsi que les données relevées montrent que ces mineurs placés dans les centres pour jeunes délinquants ont été détenus seuls dans des conditions avoisinant l’isolement cellulaire pour des périodes de 30, 60, voire même de 80 jours parfois. Le CPT recommande que ces jeunes ne soient pas mis à l’écart dans de telles conditions, même pour des motifs de non-respect de l’ordre, mais soient plutôt placés dans de petites unités dotées d’un personnel plus important.

S’agissant des établissements psychiatriques visités, le rapport du CPT reconnaît le dévouement des professionnels en psychiatrie travaillant dur pour prendre soin des patients placés sous leur responsabilité. Le CPT estime cependant que certains domaines nécessiteraient une réflexion et des changements importants : notamment, les garanties entourant le consentement au traitement qui mériteraient d’être renforcées durant les trois premiers mois d’une hospitalisation non volontaire ou les pouvoirs de la commission de contrôle psychiatrique qui devraient être renforcés et ses compétences étendues aux recours liés à des questions telles que le consentement au traitement, les transferts dans des hôpitaux plus sécurisés, le recours aux moyens de contention et l’application de mesures de traitements spécifiques. Le CPT est très critique vis-à-vis du placement à l’isolement pour une durée prolongée, telle qu’il est pratiqué dans les hôpitaux de haute sécurité, et exprime des doutes quant au recours à la force pour maîtriser les patients. Il appelle également à une révision de la politique d’enfermement à clé durant la nuit dans ces hôpitaux. Plus généralement, le rapport recommande que des efforts supplémentaires soient déployés pour recruter et maintenir dans leur emploi des infirmières et infirmiers en santé mentale diplômés, dont les effectifs ont chuté de plus de 8,5% depuis 2009 alors que le nombre de patients privés de liberté augmente d’année en année en Angleterre.

Le rapport relatif à la visite effectuée au Royaume-Uni est publié à la demande des autorités britanniques. La réponse devrait l’être également prochainement.

19/04/2017
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