Retour Sortir la Moldova de l’ornière

The New York Times / International , 

STRASBOURG, France — La République de Moldova, tout petit pays de seulement 3,5 millions d’habitants, risque de devenir le théâtre de la prochaine crise sécuritaire en Europe, ce qui pourrait avoir des répercussions bien au‑delà de ses frontières.

Ex-République soviétique prise en sandwich entre la Roumanie et l’Ukraine, la Moldova se situe au carrefour entre l’Est et l’Ouest de l’Europe. Depuis son indépendance déclarée en 1991, le pouvoir est exercé en alternance par le parti communiste qui traditionnellement cherche à renforcer les liens avec la Russie et les partis proeuropéens qui sont des partisans convaincus de l’adhésion à l’Union européenne.

En 2009, les proeuropéens ont accédé au pouvoir et progressé vers la réalisation de leur objectif. Ils ont signé un accord d’association pour renforcer les liens politiques avec Bruxelles et intégrer progressivement la Moldova dans le marché commun européen. Les exportations ont augmenté, l’économie s’est développée et, en échange d’un train de réformes, dont un respect accru des droits de l’homme, les citoyens moldoves se sont vu accorder la possibilité d’entrer sans visa sur le territoire de l’Union européenne.

Cependant, la situation aujourd’hui est beaucoup moins rose. Ces six dernières années, peu de choses ont été faites pour favoriser le développement de l’économie et des institutions du pays. La corruption reste endémique et l’Etat continue d’être aux mains d’oligarques tandis que le bas niveau, pénalisant, des salaires a poussé des centaines de milliers de Moldoves à partir à l’étranger en quête d’une vie meilleure.

Maintes personnes espèrent toujours que la solution viendra de Bruxelles mais d’autres, au contraire, pensent que c’est l’Union économique eurasiatique, conduite par la Russie, qui peut apporter la prospérité. Ce qui unit les deux camps, en revanche, c’est leur ressentiment tangible à l’égard de la classe dirigeante vénale. Demandez au citoyen moldove ordinaire en quoi la vie est différente selon que tel ou tel parti est au pouvoir, il vous répondra bien souvent qu’il n’y a aucune différence.

A présent, cette frustration publique largement répandue a un exutoire. A la fin de l’an dernier, un milliard de dollars a disparu de trois des banques nationales. Le scandale en est venu à symboliser l’incapacité de l’Etat à protéger les intérêts des citoyens. Peu de gens croient que les responsables auront à rendre des comptes ou que l’argent sera restitué. Le renflouement par les contribuables qui s’est avéré nécessaire pour stabiliser les banques a grevé les finances publiques. La valeur de la monnaie moldove, le leu, a chuté, les taux d’intérêt ont grimpé et la récession se profile à l’horizon.