Retour Le Comité anti-torture du Conseil de l'Europe publie un rapport sur le Royaume-Uni

Le Comité pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants du Conseil de l'Europe (CPT) a publié aujourd’hui le rapport sur sa sixième visite périodique au Royaume-Uni en novembre/décembre 2008, ainsi que la réponse du gouvernement du Royaume-Uni. Ces documents ont été rendus publics à la demande des autorités du Royaume-Uni.

En Angleterre, la délégation du CPT a examiné les garanties offertes aux personnes privées de leur liberté par la police, ainsi que le traitement et les conditions de détention dans trois prisons « locales » (Manchester, Wandsworth et Woodhill) et dans un centre de détention pour mineurs (Huntercombe). En Irlande du Nord, la délégation a examiné les évolutions survenues en matière de police et dans deux prisons pour hommes (Maghaberry et Magilligan) depuis la dernière visite du Comité en 1999. Dans ces deux parties du pays, la situation des détenus issus de l’immigration a également été examinée, notamment par une visite dans un centre de rétention (Harmondsworth).

Annexe

Résumé du rapport de visite et réponse

Angleterre

En ce qui concerne la police, la délégation du CPT n’a reçu aucune allégation de mauvais traitements graves infligés par des agents de police. Cependant, en vue du nombre considérable de plaintes du type “comportement oppressif”, enregistrées par la Commission indépendante des plaintes à l’encontre de la police, le Comité a recommandé que les officiers supérieurs de police transmettent régulièrement le message clair qu’infliger des mauvais traitements à des personnes privées de liberté est inacceptable. Le CPT a également noté les projets d’étendre l’utilisation des pistolets à impulsion électrique (Tasers) au sein des forces de police et exprimé sa préoccupation quant aux conseils d’utilisation actuels, qui laissent la porte ouverte à l’usage abusif et disproportionné de telles armes. En matière de garanties au moment de la garde à vue, le CPT estime que l’offre de soins médicaux devrait être améliorée, et il recommande que tous les jeunes âgés de 17 ans privés de liberté soient traités comme des mineurs et non comme des adultes, afin de renforcer les garanties concernant leur garde à vue. En réponse, les autorités font référence aux critères d’utilisation du Taser par des unités spécialement entraînées et aux garanties en place. Elles donnent également des informations sur les mesures prises en vue d’améliorer la formation des policiers chargés de la garde à vue et pour renforcer les soins médicaux dans les commissariats de police; en outre, elles confirment qu’un amendement législatif va être adopté afin de traiter toutes les personnes de moins de 18 ans comme des mineurs. En réponse aux recommandations faites par le CPT concernant les personnes détenues en vertu de la loi de 2000 relative au terrorisme, les autorités soulignent les améliorations des conditions de détention au Commissariat de police de haute sécurité de Paddington Green ; cependant, elles réitèrent leur position sur le fait qu’il n’est pas nécessaire qu’une personne y étant détenue soit toujours physiquement et directement présentée au juge.

S’agissant des prisons, le rapport exprime une préoccupation concernant l’accroissement constant de la population carcérale ainsi que le surpeuplement en résultant. Le CPT plaide en faveur d’une approche plus imaginative visant à réduire le nombre de personnes en prison; il déconseille également la construction de prisons « Titan ». En réponse, les autorités ont donné des informations sur le renforcement de l’efficacité des alternatives à la détention, l’augmentation de la capacité du parc immobilier pénitentiaire, notamment la construction de cinq grandes prisons (1500 détenus chacune) et la présentation d’économies en frais administratifs et frais généraux. 

Concernant les conditions de détention dans les trois prisons visitées, le rapport souligne le surpeuplement observé par la délégation du CPT et le fait qu’un trop grand nombre de détenus passent trop de temps enfermés dans leurs cellules avec peu d’accès à des activités intéressantes. Les autorités ont contesté certaines de ces conclusions et ont indiqué les différentes opportunités offertes aux détenus en matière de travail, d’instruction et de loisirs, ainsi que les mesures en cours prises afin de fournir de bonnes conditions cellulaires. 

Le rapport met en valeur un certain nombre de lacunes concernant la gestion de détenus condamnés à des peines de durée indéterminée pour la protection de la population (IPP); entre autres, de tels détenus avaient des difficultés à accéder aux cours de prise de conscience du comportement délictueux. Dans leur réponse, les autorités font état d’une série de mesures qui ont été prises en vue d’aborder ces questions. En réponse aux recommandations du CPT, elles ont également donné des informations sur le régime proposé aux détenus de l’unité de Catégorie A de la prison de Manchester et ont fourni des commentaires détaillés sur le Centre de surveillance renforcée à la prison de Woodhill, où sont enfermés certains des détenus les plus difficiles du système. 

Le CPT a noté l’évolution positive liée à l’offre de soins de santé dans les prisons, à la suite du transfert de responsabilité au Service national de santé (NHS) en 2005. A cet égard, les autorités notent que le personnel expérimenté du NHS occupe de plus en plus de postes relatifs aux soins de santé en prison, le Comité a fait des commentaires sur le fait que des détenus souffrant de graves troubles mentaux doivent être transférés plus rapidement dans un établissement psychiatrique approprié. Les autorités ont marqué leur accord et ont fait référence au « Bradley Review » d’avril 2009, qui montre clairement la nécessité d’avoir des modèles plus solides en matière de soins de santé primaires en prison. 

D’autres questions sur les prisons soulevées par le CPT dans son rapport traitent du personnel et du fonctionnement du système de plaintes. 

En ce qui concerne la détention des mineurs, le rapport se réjouit de l’augmentation du nombre de mesures et de projets en vue de réduire le recours à la privation de liberté et espère vivement qu’ils seront dotés de budgets adéquats. En réponse, les autorités ont cité leur engagement à réduire le nombre de mineurs en détention et ont donné des informations sur le nouveau « Youth Rehabilitation Order » (mesure de rééducation des mineurs) ainsi que sur le rôle accru des autorités locales, notamment concernant la disposition sur l’efficacité des services de réhabilitation des mineurs sortis de détention. 

La délégation du CPT n’a trouvé aucune trace évidente de mauvais traitement physique des détenus par le personnel de l’établissement pour jeunes délinquants de Huntercombe. Cependant, des préoccupations ont été exprimées quant au nombre d’incidents violents entre détenus, qui ont requis l’usage de la force par le personnel pour y mettre un terme. Le rapport souligne qu’il est tout à la fois important d’avoir assez de personnel présent et que des procédures et des formations spécifiques soient mises en place dans le cadre du recrutement et de la formation pour tout le personnel travaillant avec de jeunes personnes. La réponse des autorités indique que les effectifs ont été augmentés à Huntercombe ainsi que le développement de procédures de recrutement spécifiques et de formation renforcée, y compris l’introduction d’une formation sur la résolution des conflits, pour le personnel travaillant avec des mineurs. 

En outre, les autorités ont donné des informations sur les efforts effectués afin d’offrir un régime constructif et font référence au nouveau contrat d’éducation, un accroissement de l’éducation physique et des activités associatives. Cependant, les autorités ne partagent pas l’avis du CPT sur la pratique courante disproportionnée des fouilles. De plus, elles soutiennent que le comportement extrêmement difficile de certains mineurs signifie que l’utilisation de moyens de contention par la douleur sur les mineurs devrait être retenue en dernier recours, tout en plaidant pour une série de garanties en vue de réduire le recours à la contention. En réponse à la recommandation selon laquelle des mesures doivent être prises pour améliorer le système de plaintes, les autorités font référence à la révision qui doit être entreprise par le Conseil de la justice pour mineurs. Des informations ont également été données eu égard aux recommandations traitant des soins de santé, de la discipline, des contacts avec l’extérieur, ainsi que sur les actions menées pour réduire le temps passé par les mineurs dans des véhicules sécurisés. 

En ce qui concerne les immigrés en situation irrégulière, le CPT a visité le centre de rétention d’Harmondsworth et en a conclu que les conditions et le régime y étaient satisfaisants pour les séjours de durée moyenne. Des recommandations ont été faites pour améliorer le dépistage de maladies des détenus et le recrutement d’un infirmier psychiatrique. Plus généralement, le rapport exprime des préoccupations sur le nombre accru de personnes qui séjournent plus d’une année dans un centre de rétention. Les autorités ont donné des informations sur les différentes questions soulevées dans le rapport et ont affirmé que les personnes ne sont pas détenues plus longtemps qu’il n’est nécessaire.  

Irlande du Nord 

Le rapport du CPT note les changements considérables en matière de police survenus au cours de la dernière décennie, et souligne le fait qu’il n’a été reçu aucune allégation de mauvais traitement de personnes détenues par le Service de police d’Irlande du Nord (PSNI). Cependant, il est fait référence à la nécessité de mettre en place des critères stricts dans l’utilisation de pistolets à impulsion électriques (Tasers), qui devraient correspondre étroitement avec ceux régissant l’utilisation des armes à feu. Les autorités ont marqué leur accord et ont fait référence aux lignes directrices et à la formation strictes des agents de police actuellement en place. 

Le report fait état du fonctionnement satisfaisant des garanties formelles contre les mauvais traitements, mais des préoccupations demeurent quant à la disponibilité de soins psychiatriques appropriés aux personnes détenues par la police; par exemple, des situations où des officiers de police ont recours à la fixation de personnes détenues nues à une chaise afin de prévenir des actes d’automutilation sont inacceptables. Le CPT a également fait des recommandations sur la confidentialité médicale et les soins médicaux offerts aux personnes présentant un risque de suicide élevé dans les commissariats de police. Les commissariats de police visités étaient généralement bien entretenus et propres. Cependant, des préoccupations ont été exprimées quant à la pratique de retenir des détenus en infraction à la législation relative à l’immigration dans des locaux de la police jusqu’à sept jours ; le CPT recommande que des locaux mieux appropriés soient mis à disposition pour la détention de ces personnes.  

En réponse, le PSNI indique que des mesures sont en cours afin d’améliorer les soins offerts aux personnes souffrant de troubles mentaux détenues dans les commissariats de police. Il mentionne également qu’une étude de faisabilité est en cours pour des locaux réservés aux courts séjours de détenus en infraction à la législation relative à l’immigration, mais que son financement n’est actuellement pas disponible. 

Concernant les prisons, le rapport recommande que des mesures soient prises afin de prévenir le surpeuplement qui tend à devenir une caractéristique permanente du système pénitentiaire, et que les cellules de 7m² ne devraient pas être occupées par plus d’un détenu. Dans leur réponse, les autorités ont donné des informations sur les mesures prises pour augmenter l’utilisation d’alternatives à la détention et sur le développement du parc immobilier pénitentiaire. Cependant, elles mentionnent qu’au vu des niveaux de population actuelle, les cellules de 7m² doivent continuer à être utilisées par deux détenus, tout en reconnaissant que les cellules de cette taille à la prison de Maghaberry ne sont pas destinées à ce usage. 

Le rapport fait état de plusieurs allégations de mauvais traitement par les membres du « Stand-by Search Team (SST) » (équipe d’intervention spéciale et de fouille) à la prison de Maghaberry, et recommande que des actions soient prises afin d’assurer que le SST n’abuse pas de ses pouvoirs. Plus généralement, le CPT souligne l’importance pour la direction de la prison, du suivi de toutes les plaintes pour mauvais traitements. De plus, à la lumière des plaints des détenus, le Comité a recommandé aux autorités de s’assurer que toutes les fouilles intégrales soient effectuées conformément au règlement en vigueur et au respect de la dignité des détenus concernés. Des mesures sont également recommandées afin de réduire la fréquence de violences entre les détenus à la prison de Maghaberry. 

En réponse, l’Administration pénitentiaire d’Irlande du Nord affirme que la nature même des tâches dévolues au SST (recherches, réponses aux incidents) engendrera plus de plaintes; il a été indiqué que chaque plainte fait l’objet d’une enquête et qu’à ce jour, aucune n’a été retenue. Toutefois, le rôle du SST est l’une des questions qui sera examinée par la nouvelle équipe de direction de la prison de Maghaberry. L’Administration pénitentiaire réfute les allégations des détenus relatives aux fouilles corporelles inappropriées mais a rappelé au personnel les procédures à suivre. De plus, il affirme que des mesures sont en cours afin de réduire les incidents violents entre détenus à la prison de Maghaberry, par une surveillance accrue, l’éducation des détenus et en cherchant à réintroduire le personnel dans les salles utilisées par les détenus lorsqu’ils se réunissent.  

Les autorités ont également donné des informations sur les mesures en cours pour renforcer l’offre de soins de santé et répondre aux préoccupations soulevées dans le rapport concernant les garanties en place liées à la discipline et à l’isolement. En réponse aux recommandations du CPT concernant le système de plaintes offrant des garanties appropriées d’indépendance, d’impartialité et de rigueur, les autorités ont donné des détails sur une nouvelle procédure interne de plaintes.

08/12/2009
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