Retour Bulgarie : Il est nécessaire de mieux protéger les enfants, renforcer la liberté des médias et respecter les droits de l'homme des migrants

Visite de la Bulgarie
Sofia 12/02/2015
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Camp de réfugiés Voenna Rampa, Bulgarie

Camp de réfugiés Voenna Rampa, Bulgarie

« La Bulgarie doit veiller à ce que les droits de l’enfant soient pleinement respectés dans le cadre de la désinstitutionalisation et de la réforme de la justice des mineurs », a déclaré Nils Muižnieks, Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, à l’issue d’une visite de trois jours en Bulgarie.

« La Bulgarie devrait cesser de placer des enfants dans des institutions comme les centres éducatifs-internats, qui ont été créés il y a plusieurs dizaines d’années pour prendre en charge des enfants ayant un « comportement antisocial » et dans lesquels des enfants victimes de violences sont placés aux côtés de jeunes délinquants », a estimé le Commissaire après avoir visité le centre éducatif-internat pour filles de Podem. « Il est nécessaire de réformer la justice des mineurs pour remplacer la législation répressive obsolète par des dispositions qui protègent pleinement les droits de l’enfant et permettent aux enfants en danger ou en conflit avec la loi de se réinsérer dans la société. »

Se référant à des cas de violences qui se seraient produits dans plusieurs types d’institutions pour enfants, et qui concerneraient à la fois des violences entre enfants et des actes commis par des adultes, le Commissaire a appelé les autorités bulgares à enquêter sur ces allégations et à protéger les enfants contre de nouveaux préjudices. « L’instauration, en 2012, du mécanisme national de prévention géré par le bureau de l’Ombudsman est une mesure qui va dans le bon sens. Il a cependant besoin de ressources humaines et financières supplémentaires pour pouvoir contrôler les 650 institutions où des adultes et des enfants peuvent être privés de liberté. »

En ce qui concerne plus généralement la désinstitutionalisation des enfants, les efforts de la Bulgarie se sont traduits par une baisse significative du nombre d’enfants vivant en institution depuis le lancement du processus, en 2001. « Toutefois, les autorités devraient renforcer encore la priorité accordée aux mesures visant à soutenir les familles et à éviter que les enfants soient séparés de leurs parents. Il faudrait veiller tout particulièrement à ce que les enfants ne soient pas simplement transférés dans des institutions plus petites, où ils ne pourraient toujours pas bénéficier pleinement de leur droit de vivre dans la société. »

La Bulgarie devrait aussi se montrer plus ambitieuse en matière de désinstitutionalisation des adultes handicapés, en fixant des objectifs clairs et des délais précis pour la mise en œuvre de la stratégie qu’elle a adoptée récemment dans ce domaine. Se référant à la réforme en cours des dispositions régissant la capacité juridique, le Commissaire a vivement encouragé les autorités bulgares à aller de l’avant et à rendre ces dispositions conformes à la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées. « Au-delà de ces changements législatifs, tout devrait être mis en œuvre pour que les personnes handicapées reçoivent l’aide dont elles ont besoin pour décider où et avec qui elles vont vivre et à quels services de proximité elles vont faire appel. »

Concernant la liberté des médias, le Commissaire est préoccupé par la transparence insuffisante de la propriété et du financement des médias et par le manque de mesures de lutte contre la concentration des médias. Cela aurait créé un paysage médiatique où de nombreux organes de presse ne serviraient que les intérêts d’un petit nombre. « Un véritable pluralisme des médias est la garantie institutionnelle indispensable à la réalisation du droit de recevoir et de répandre des informations ; les autorités doivent prendre des mesures pour assurer ce pluralisme. » Se référant à de lourdes amendes imposées récemment par l’autorité bulgare de surveillance financière à des médias qui avaient fait des reportages sur les activités financières d’entreprises et sur le secteur bancaire, le Commissaire a déclaré : « C’est très préoccupant. Dans un contexte déjà caractérisé par des possibilités limitées de diffuser librement des informations dans l’intérêt général, ces amendes ne vont pas manquer d’inciter les journalistes à s’autocensurer encore davantage ».

« S’il est encourageant de constater que les conditions de vie matérielles des demandeurs d'asile se sont améliorées depuis ma dernière visite, il y a un an, il faut cependant consolider ces progrès en allouant des fonds suffisants pour assurer le bon fonctionnement de tous les centres d’accueil du pays », a conclu le Commissaire après sa visite du centre d’accueil de Voenna Rampa. « Beaucoup reste à faire pour répondre aux besoins particuliers des demandeurs d'asile en situation de vulnérabilité, et notamment des mineurs non accompagnés. »

Notant que la législation relative à l’asile et aux réfugiés est en cours de réexamen, le Commissaire rappelle que les demandeurs d'asile ne peuvent être placés en détention administrative qu’en dernier recours et pour la durée la plus brève possible. De plus, il demande instamment aux autorités d’enquêter sur les allégations de refoulements à la frontière et de prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter de telles pratiques. Enfin, il encourage l’adoption d’une stratégie d’intégration ambitieuse qui prévoie des mesures concrètes, y compris des mesures destinées à combattre le discours de haine et les infractions motivées par la haine, dont un nombre inquiétant ont été commises récemment à l’encontre de demandeurs d'asile et de réfugiés.

Le Commissaire publiera prochainement un rapport sur sa visite en Bulgarie.