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Retour L’Irlande doit lever les obstacles à l’égalité des Gens du voyage, des femmes et des enfants

Rapport de visit pays
Le Commissaire parle avec des habitants de l'aire de repos pour Gens du voyage à Dublin

Le Commissaire parle avec des habitants de l'aire de repos pour Gens du voyage à Dublin

Strasbourg, 29 mars 2017 - « Le gouvernement irlandais devrait veiller à ce que la reprise économique bénéficie aux groupes les plus vulnérables et s’efforcer de promouvoir l’égalité des Gens du voyage, des femmes et des enfants en levant les obstacles qui les empêchent de jouir pleinement de leurs droits », a déclaré le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Nils Muižnieks, dans un rapport publié aujourd'hui sur la visite qu'il a effectuée en Irlande en novembre 2016.

Le Commissaire se réjouit que le gouvernement ait récemment reconnu que les Gens du voyage étaient un groupe ethnique, mais il continue d’être préoccupé par les conséquences très négatives d’une réduction du soutien que l’État accorde à cette communauté suite à la crise économique en 2008. « Les autorités irlandaises, y compris au niveau local, devraient réinvestir dans la communauté et améliorer l’accès des Gens du voyage et des Roms à l’éducation, à la santé, au logement et à l’emploi, ainsi qu’à des recours juridiques en cas de discrimination. Elles devraient également fournir des garanties suffisantes contre les expulsions forcées. »

Le Commissaire demande aux autorités irlandaises de lutter contre les inégalités persistantes entre les femmes et les hommes, notamment en procédant à un examen des dispositions constitutionnelles qui perpétuent des stéréotypes négatifs à l’égard des femmes et en prenant des mesures à long terme visant à surmonter les préjugés sexistes dans le système éducatif et les médias. Il faudrait également que des fonds suffisants soient affectés à des initiatives d’ordre politique qui pourraient faciliter la prise en compte des questions d’égalité de genre, telles que le Public Sector Duty, qui impose à tous les organismes publics d’éliminer la discrimination et de promouvoir l’égalité. « Le gouvernement irlandais devrait faire des efforts importants pour réduire les inégalités entre les femmes et les hommes, qui sont entretenues par des stéréotypes tenaces et aggravées par l’impact des mesures d’austérité, qui empêchent les femmes de participer pleinement à la vie économique et politique », a déclaré le Commissaire.

Par ailleurs, le Commissaire encourage les autorités irlandaises à améliorer la législation et la réponse globale à la violence domestique, notamment en améliorant l’accès des femmes victimes de violences aux ordonnances de protection délivrées en urgence et à un hébergement. Il recommande également à l’Irlande de ratifier dès que possible la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique car elle « fournit un cadre et une méthode pour changer les normes et pratiques sociales qui reproduisent la violence fondée sur le genre ».

En outre, le Commissaire demande instamment aux autorités irlandaises d’adopter une législation pour lever tous les obstacles à l’accès des femmes à l’avortement légal et sans risque. Il espère vivement, en particulier, que le huitième amendement de la Constitution irlandaise - qui protège le droit à la vie de l’enfant à naître en le mettant à égalité avec le droit à la vie de la femme enceinte – sera bientôt supprimé car il joue un rôle essentiel dans le blocage de toute tentative de réforme globale du régime juridique régissant l’interruption de grossesse en Irlande. « La dépénalisation de l’avortement dans le cadre d’une durée limite de la gestation raisonnable est essentielle pour l’égalité des femmes. Au minimum, l’avortement pratiqué pour préserver la santé physique et mentale des femmes, ou en cas d’anomalie fœtale létale, de viol ou d’inceste devrait être rendu légal. » Le Commissaire a également demandé instamment aux autorités de veiller à ce qu’une éducation sexuelle obligatoire, complète et sans préjugés soit dispensée dans toutes les écoles en Irlande afin de protéger les droits sexuels et reproductifs de tous, y compris des femmes.

Dans un contexte de pauvreté croissante des enfants et en raison, notamment, d’une augmentation importante du nombre d’enfants sans domicile, le Commissaire engage vivement les autorités irlandaises à remédier aux conséquences négatives des mesures d’austérité sur l’accès des enfants à la santé, à l’éducation et à la protection sociale. Il attire également l’attention des autorités sur la nécessité de corriger les lacunes de la protection des droits des enfants migrants découlant du système de prise en charge directe des demandeurs d’asile en matière de logement et de l’absence de moyens permettant aux enfants sans papiers d’obtenir un statut juridique.

Soulignant la nécessité de promouvoir une éducation inclusive dans un contexte où la grande majorité des écoles subventionnées par l’État sont confessionnelles, le Commissaire appelle les autorités irlandaises à supprimer l’exemption qui permet à ces écoles d’utiliser la religion de l’enfant comme critère d’admission et à prévoir des solutions pour les élèves qui ne souhaitent pas suivre de cours d’instruction religieuse. « Le système d’admission préférentielle, dans lequel les écoles confessionnelles – qui constituent 96 % des écoles primaires en Irlande - peuvent choisir ou refuser des élèves en fonction de leur religion, est incompatible avec le principe de non-discrimination et se heurte à la nécessité de promouvoir une éducation inclusive », a déclaré le Commissaire.

Notant que l’État a pris un certain nombre de mesures visant à traiter les abus commis dans le passé à l’encontre des femmes et des enfants placés dans des institutions, notamment des foyers pour femmes, des écoles et des établissements de santé, le Commissaire invite les autorités irlandaises à respecter pleinement les normes internationales des droits de l’homme applicables lorsqu’il s’agit de tous ces abus. Prêtant une attention particulière aux abus qui ont eu lieu dans le cadre des « blanchisseries Madeleine », des « foyers mères-bébés », des procédures médicales concernant l’accouchement dans les maternités et des violences sexuelles dans les écoles nationales, le Commissaire rappelle que tous les groupes de victimes de violations graves des droits de l’homme commises dans le passé ont le droit à la vérité, à un soutien plein et entier, à des voies de recours effectives, ainsi qu’à l’ouverture d’enquêtes indépendantes, approfondies et rapides sur des abus présumés visant à déterminer la responsabilité de leurs auteurs.

Strasbourg 29/03/2017
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