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Le législateur suisse devrait revoir le projet de loi sur les mesures policières de lutte contre le terrorisme pour garantir le respect des droits de l’homme

Par une lettre adressée à la Présidente et aux membres de la Commission de la politique de sécurité du Conseil national rendue publique aujourd'hui, la Commissaire invite les parlementaires à revoir le projet de Loi fédérale sur les Mesures policières de lutte contre le terrorisme afin de garantir que toutes les normes relatives aux droits de l’homme soient respectées.

Elle fait notamment part de questions que pose le manque de garanties juridiques suffisantes quant au champ d’application des mesures administratives que l’Office fédéral de police peut prononcer, en dehors de la procédure pénale, à l’encontre d’une personne qu’il considère comme étant un « terroriste potentiel » sur la base d’une présomption d’actions individuelles éventuelles et futures. « L’absence de définition claire et précise ouvre la voie à une interprétation large faisant courir le risque d’ingérences excessives et arbitraires dans les droits de l’homme », écrit-elle, ajoutant que la notion même de « terroriste potentiel » risque d’être stigmatisante.

La Commissaire souligne également la gravité des mesures administratives envisagées, en particulier la possibilité sous certaines conditions d’assigner une personne à une propriété. « Il semble très difficile de concilier une mesure aussi imprécise et grave, et pour une durée pouvant allant jusqu’à neuf mois, avec l’exigence de plein respect des obligations relatives aux droits de l’homme selon lesquelles les ingérences dans les libertés fondamentales doivent être proportionnées et nécessaires », souligne-t-elle.

La Commissaire note aussi le risque d’ingérences sérieuses dans la liberté d’aller et de venir, le droit au respect de la vie privée et familiale ainsi que la liberté de réunion et la protection des données qui pourrait résulter de l’imposition des autres mesure administratives envisagées. Elle estime particulièrement problématique que ces mesures, mis à part l’assignation à une propriété, peuvent être imposées à la discrétion de la police dans le cadre d’une décision prise en dehors de la procédure pénale et des garanties qu’elle prévoit et sans la possibilité d’un recours suspensif.

Enfin, la Commissaire se dit particulièrement préoccupée par l’application envisagée de ces mesures de police, en-dehors du système de justice pour mineurs et sans garanties juridiques appropriées, à des enfants âgés d’au moins douze ans, et pour l’assignation à la propriété, d’au moins quinze ans. Ce type de mesure ne donne pas suffisamment l’assurance d’un cadre adapté aux enfants, y compris ceux dont on considère qu’ils pourraient être un jour impliqués dans des activités terroristes, tels que ceux visés dans le projet de loi.

Strasbourg 13/05/2020
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