Retour Le Comité anti-torture du Conseil de l'Europe (CPT) publie le rapport relatif à sa visite de 2021 en Lituanie

Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) publie aujourd'hui le rapport relatif à sa visite périodique effectuée en Lituanie en décembre 2021, ainsi que la réponse des autorités lituaniennes.
Le Comité anti-torture du Conseil de l'Europe (CPT) publie le rapport relatif à sa visite de 2021 en Lituanie

Au cours de la visite, la délégation a examiné le traitement et les conditions de détention des personnes privées de liberté dans les établissements de police et les prisons, ainsi que la situation des personnes retenues dans des centres d’enregistrement des ressortissants étrangers. La délégation a également examiné la question du recours aux moyens de contention et des garanties juridiques offertes aux patients admis sans leur consentement en soins psychiatriques (psychiatrie civile).

La délégation du CPT n'a recueilli aucune allégation de mauvais traitements de personnes privées de liberté par la police ; au contraire, la plupart des personnes entendues, qui étaient ou avaient récemment été en garde à vue, ont déclaré que les agents de police avaient eu un traitement convenable à leur égard, tant au moment de leur interpellation que lors des auditions qui ont suivi et au cours de la garde à vue.

Le Comité prend note que la plupart des personnes privées de liberté rencontrées par la délégation ont confirmé qu'elles avaient pu exercer le droit de notifier un tiers de leur placement en garde à vue. En ce qui concerne l'accès à un avocat, il était encore très exceptionnel que les personnes en garde à vue puissent bénéficier de l'accès à un avocat dès le début de la privation de liberté (c'est-à-dire, dès lors qu’elles sont détenues par la police).

Les conditions matérielles de détention dans les quartiers généraux de la police locale visités étaient satisfaisantes ; dans les maisons d'arrêt de Vilnius et Kaunas, elles étaient très bonnes, pour la durée maximale de la garde à vue, à savoir 48 heures.

Le Comité constate que les projets très attendus de construction de plusieurs nouvelles prisons n'ont pas encore vu le jour et appelle les autorités lituaniennes à prendre toutes les mesures possibles pour accélérer considérablement le processus de modernisation du parc pénitentiaire, notamment la conversion en hébergement cellulaire.

Dans les prisons de Marijampolė et Pravieniškės, la délégation n'a pratiquement pas recueilli d’allégation de mauvais traitements physiques de détenus par le personnel. La situation était toutefois très différente et préoccupante à la Prison d'Alytus et n'avait apparemment pas beaucoup changé depuis la dernière visite du CPT en 2018. Dans cette prison, un certain nombre d'allégations crédibles ont d’ailleurs été recueillies, y compris des coups de poing, de pied et de matraque.

Le Comité est également très préoccupé de constater qu'aucun progrès significatif n'a été réalisé pour réduire l'ampleur de la violence entre détenus ; ce qui a d’ailleurs été critiquée à plusieurs reprises par le CPT lors de ses précédentes visites. Au cours de la visite de 2021, la délégation avait de nouveau recueilli de nombreuses allégations crédibles de violences entre détenus, y compris des passages à tabac et des violences de nature sexuelle, ainsi que des extorsions, des pressions psychologiques et des intimidations poussant à commettre de nouvelles infractions.

Les racines de la violence entre détenus semblent être restées les mêmes, à savoir une hiérarchie informelle parmi les détenus (système de "castes"), l'omniprésence de drogues illicites et le manque de personnel de surveillance insuffisamment présent dans les quartiers d'hébergement des détenus (cela étant associé à une infrastructure composée principalement de dortoirs de grande capacité).

Sur la base des constatations faites lors de la visite de 2021, le Comité a conclu que les efforts visant à remédier à ces problèmes profondément enracinés ont été, jusqu'à présent, inefficaces et que la situation est restée inacceptable. Pour cette raison, le CPT a décidé d’enclencher la procédure prévue à l'article 10, paragraphe 2, de la Convention.[1]

Bien que l'accès aux soins de santé primaires soit généralement assuré dans les prisons visitées, les équipes soignantes continuent de manquer de ressources. L'accès aux soins spécialisés était très préoccupant, principalement en raison de la capacité opérationnelle considérablement réduite de l'hôpital pénitentiaire.

En ce qui concerne la rétention des ressortissants étrangers, la délégation n'a recueilli aucune allégation de mauvais traitements physiques qui auraient été infligés dans les trois centres d'enregistrement des étrangers visités par la délégation.

Le Comité a reconnu l'urgence avec laquelle les autorités lituaniennes ont dû répondre à une situation sans précédent et leur a recommandé de poursuivre leurs efforts pour améliorer les conditions de vie et le régime accordé aux personnes retenues.

Le Comité a également recommandé que les ressortissants étrangers retenus soient mieux informés du cadre juridique qui leur est applicable et que des mesures soient prises pour améliorer leur accès à des services de traduction, à l'assistance juridique et aux voies de recours.

En ce qui concerne le recours aux moyens de contention à l'Hôpital psychiatrique républicain de Vilnius, le CPT a constaté des améliorations tant dans le cadre réglementaire que dans la pratique. Les lacunes qui subsistent sont, entre autres, le manque de surveillance du recours aux moyens de contention mécanique et l'absence de « débriefing » systématique avec les patients après l'imposition de telles mesures.

Dans leur réponse, les autorités lituaniennes ont exposé les mesures prises ou envisagées pour mettre en œuvre les recommandations formulées par le Comité dans le rapport, notamment la poursuite de la modernisation du parc pénitentiaire, les derniers amendements au Code d'exécution des peines, l'intégration de mesures de prévention de la violence dans les prisons, etc. Les autorités ont également informé le Comité que le centre d'enregistrement des étrangers de Medininkai avait été fermé et que celui de Kybartai serait fermé au cours de l'année 2023.

Le rapport du CPT et la réponse des autorités lituaniennes ont été rendus publics à la demande du gouvernement lituanien.

 

Lire le rapport (en anglais uniquement)

Lire le résumé du rapport (en anglais uniquement)

Lire la réponse gouvernementale et l'addendum à celle-ci (en anglais seulement)

Le CPT et la Lituanie


[1]              L'Article 10 (2) stipule que « si la Partie ne coopère pas ou refuse d’améliorer la situation à la lumière des recommandations du Comité, celui-ci peut décider, à la majorité des deux tiers de ses membres, après que la Partie aura eu la possibilité de s’expliquer, de faire une déclaration publique à ce sujet ».

23/02/2023
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