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(Seul le texte prononcé fait foi)

Discours de Annelise OESCHGER, Présidente de la Conférence des OING du Conseil de l’Europe

Varsovie, 17 mai 2005

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,
Mesdames, Messieurs,

Si la société civile peut s'adresser à vous aujourd'hui, c'est parce que le Conseil de l’Europe est, une fois encore, un précurseur tant au niveau européen qu’au niveau mondial.

En effet, en 1952 déjà, il a accordé aux Organisations internationales non-gouvernementales, les OING, un statut consultatif. D'emblée il a été en cohérence avec son rôle et son objectif de promouvoir une démocratie pluraliste et "d'intensifier la participation active de toutes les citoyennes et de tous les citoyens à la conduite des affaires publiques". Au fil des années la coopération s'est intensifiée et en novembre 2003, le Comité des Ministres a décidé d'accorder aux OING un statut participatif, pour "refléter le rôle actif et constructif des ONG" et les impliquer davantage "dans la définition des politiques, des programmes et des actions du Conseil de l’Europe". (Résolution (2003)8)

La Conférence des OING est ainsi devenue un pilier du Conseil de l’Europe, l'un des quatre partenaires du "quadrilogue", aux côtés du Comité des Ministres, de l'Assemblée parlementaire et du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux.

Aujourd'hui vous affirmez cette reconnaissance devant tous les Européens et Européennes.

Les 374 OING actuellement dotées du statut participatif auprès du Conseil de l’Europe représentent des millions de citoyens à travers l'Europe qui sont actifs dans les domaines culturels, sociaux, écologiques, professionnels et syndicaux, humanitaires, religieux, et bien évidemment dans la défense des droits de l'Etre humain.

Le 25 janvier dernier, la Conférence des OING du Conseil de l’Europe a adopté sa contribution officielle pour le Sommet. Les membres des OING l'ont alors fait connaître aux autorités régionales et nationales dans les 46 pays ainsi que dans leurs propres réseaux.

Dans notre contribution pour le Sommet, la première demande concerne le Conseil de l’Europe lui-même : Nous vous demandons de réaffirmer le rôle irremplaçable de cette organisation paneuropéenne pour une Europe sans clivages et de la doter des moyens nécessaires pour assurer sa mission.

De par ses instruments juridiques et ses organes de contrôle, de par ses travaux de recherche et ses activités sur le terrain, le Conseil de l’Europe est l'allié de celles et ceux qui defendent ses valeurs au quotidien - l'allié de ces professeurs qui consacrent leur temps libre à l'élaboration de matériel pédagogique qui permet de comprendre l'histoire et les visions de l'autre, l'allié de ces parents qui luttent pour revoir leurs enfants confiés à l'adoption contre leur volonté, l'allié de celles et ceux qui se sont fait arrêter en se battant pour l'application des conventions du Conseil de l’Europe - que les Etats ont ratifiées.

Les droits de l'Homme nous importent tant parce qu'ils sont l'expression politique, juridique et morale de ce que nous rêvons pour tout être humain. Ils doivent aussi et en priorité protéger les personnes les plus meurtries que ce soit par la répression, la brutalité, l'exposition indifférente à des dangers évitables, la discrimination, ou par la misère. Ce sont des situations intolérables qu'ensemble nous avons la responsabilité et les moyens d'éradiquer.

Vous, chefs d'Etat et de gouvernement, et nous, citoyens de la société civile organisée, nous nous engageons pour le Conseil de l’Europe parce que nous portons les mêmes valeurs, et nous voulons les assumer chacun depuis notre place. Les OING sont donc vos alliées incontournables. De par leurs actions, elles contribuent au renforcement et au développement de la cohésion sociale. De par leur proximité avec les populations et les structures dans lesquelles elles vivent, les ONG observent les dysfonctionnements, pressentent les évolutions et suscitent des réactions adéquates. Très souvent elles alertent les autorités publiques et suggèrent des propositions aux décideurs politiques, basées sur leur expérience et leur expertise.

Ainsi, elles sont à l'origine de prises de conscience et d’avancées politiques, juridiques et sociales majeures. Ce rôle politique des ONG est attendu et reconnu par le Conseil de l’Europe et par un nombre croissant d'autorités locales et nationales. Il s'agit ici de la composante participative de la démocratie qui est complémentaire à sa composante représentative. La plus-value de la coopération des ONG au sein de la Conférence des OING du Conseil de l’Europe consiste à pouvoir réfléchir et agir de façon multidisciplinaire, et cela avec une vision qui dépasse les frontières tant géographiques que sociales.

La démocratie participative, c'est le citoyen reconnu acteur pour le bien commun. Le fait qu’il soit reconnu acteur est le point crucial pour l'avenir de nos démocraties. Les citoyens, quels qu'ils soient, s'engageront lorsqu'ils verront qu'ils sont respectés et qu'ils auront prise sur le devenir de la société dont ils sont partie composante.

Souvent on parle de l'argent des collectes qui se perd on ne sait où - mais on parle rarement des efforts humains qui se perdent parce qu’ils passent inaperçus et qu’ils ne sont pas reconnus à leur juste valeur. Les ONG transforment ces efforts en énergie constructive et durable. Découvrez les efforts insoupçonnés faits bénévolement et quotidiennement par des millions de citoyens dans vos pays, reconnaissez-les et prenez-les comme points de départ de vos choix politiques !

Pour pouvoir jouer leur rôle, les ONG doivent pouvoir agir dans la stabilité et la durée. C'est pour cela que la Conférence des OING du Conseil de l’Europe, dans sa contribution au 3e Sommet, invite les Etats à accélérer les travaux pour assurer les conditions légales et économiques pour un fonctionnement efficace et durable des ONG, sur la base des "Principes fondamentaux sur le statut des organisations non gouvernementales en Europe" élaborés au Conseil de l’Europe. Nous invitons également les Etats à ratifier la Convention européenne sur la reconnaissance de la personnalité juridique des organisations internationales non gouvernementales (STE no. 124).

Si nous insistons tant sur notre participation c'est parce qu’avec vous, avec les parlementaires et les élus locaux, nous nous sentons co-responsables pour que demain tous les enfants puissent vivre dans la dignité, dans un monde plus juste et plus solidaire et dans un environnement sain.

Un soutien politique clair de votre part pour la Conférence des OING du Conseil de l’Europe renforcera notre capacité à multiplier la participation citoyenne et à créer un nouvel enthousiasme pour le projet de civilisation porté par le Conseil de l’Europe. Notre énergie politique constructive et durable vous est assurée.

Je vous remercie.