Une table ronde des « Cités interculturelles » s’est tenue dans le cadre du Congrès des initiatives pour l’Europe de l’Est à Lublin (Pologne) le 2 octobre 2015. La réunion a rassemblé des représentants de villes polonaises et ukrainiennes, des organisations de la société civile, des fonctionnaires, des entrepreneurs et des experts du Conseil de l’Europe.

Contexte

Compte tenu de l’afflux actuel de réfugiés en Europe, l’intégration est devenue un sujet de préoccupation aussi bien pour les gouvernements que pour les citoyens ordinaires. Dans le cas de la Pologne, le rôle que doivent jouer les municipalités polonaises dans ce processus n’a pas encore été clairement défini et la politique d’intégration du pays est en cours d’élaboration. En décembre 2014, le Gouvernement a adopté un Plan d’action sur les migrations qui déléguait un certain nombre de tâches aux administrations locales, sans préciser toutefois comment et dans quelle mesure les villes pourraient y être associées.

Etant donné que de plus en plus d’étrangers choisissent la Pologne comme pays de résidence, c’est, à l’évidence, au niveau local qu’il y aurait le plus besoin de politiques d’intégration cohérentes et stables. La ville de Lublin a commencé à définir ce qu’elle pourrait faire pour créer une communauté de coexistence pacifique. En tant que participante au Programme des Cités interculturelles du Conseil de l’Europe, la ville bénéficie de l’expérience et des ressources du réseau européen. De plus, dans la mesure où des activités d’intégration y sont menées pour la première fois, la ville cherche en permanence à faire équipe avec d’autres municipalités afin d’échanger des expériences et de trouver des solutions concrètes aux problèmes d’intégration existants. Elle cherche notamment à collaborer avec les villes du pays voisin, l’Ukraine, qui sont actuellement confrontées à des problèmes similaires, et plus particulièrement avec celles qui sont membres du réseau ukrainien de cités interculturelles. Beaucoup de villes d’Ukraine accueillent en effet de nombreux réfugiés en provenance du sud-est du pays (zone de conflit militaire), alors qu’elles sont très peu préparées à faire face à ce type de phénomène. Des villes comme Melitopol, Lutsk, Pavlograd, Priluki, Vynnytsa et Sumy ont incontestablement pris conscience de la nécessité croissante de prendre des mesures d’intégration interculturelle en Ukraine et ont déjà mis en place un certain nombre de stratégies d’intégration locale pour relever ces nouveaux défis[1].

Objectifs

Dans ce contexte, une table ronde des « Cités interculturelles » a été organisée à Lublin, à l’occasion du Congrès des initiatives pour l’Europe de l’Est 2015, afin de donner la possibilité à des villes ukrainiennes et polonaises :

• d’examiner les questions relatives à l’intégration dans les villes polonaises et ukrainiennes dans une perspective interculturelle ;
• de mettre en commun les enseignements tirés de l’expérience et de trouver d’éventuelles solutions aux problèmes actuels ;
• de mettre en place des partenariats durables et de renforcer les partenariats existants dans les villes et entre les villes des deux Etats voisins.

La table ronde

La présentation du Programme des Cités interculturelles a été assurée par Phil Wood et Kseniya Khovanova-Rubicondo et a essentiellement porté sur l’idée d’interculturalité, sur les outils analytiques et pratiques offerts par le Programme, sur ses principes de travail et sur sa structure. Pendant la discussion sur les problèmes liés à l’immigration que rencontrent aujourd’hui les villes polonaises et ukrainiennes, animée par Anna Szadkowska-Ciężka et Kseniya Rubicondo, les représentants des villes ont partagé des expériences, des bonnes pratiques et des enseignements et se sont exprimés sur la façon dont ils envisageaient  l’intégration interculturelle de leurs habitants dans l’avenir. Les municipalités polonaises étaient représentées par Danuta Czechmanowska (Cracovie) et Piotr Choroś (Lublin). Olena Shulika (Pawlograd), Lyudmila Afanasieva et Olena Dubinina (Melitopol), Tetiana Hnativ (Lutsk), Viktoria Patiutko (Sumy) et Irina Ivasiuk (Vynnytsa) représentaient les villes ukrainiennes.

Une différence a été clairement observée entre l’expérience des municipalités ukrainiennes et polonaises : alors que les premières devaient faire face à des problèmes très basiques comme fournir de la nourriture et un hébergement à des réfugiés de l’intérieur, les secondes étaient confrontées à la résistance des administrations nationales et locales concernant la gestion de l’intégration. Les intervenants ukrainiens ont souligné à quel point le réseau national était important pour trouver des solutions aux divers problèmes d’intégration des réfugiés.

Pendant l’atelier sur l’élaboration d’une stratégie interculturelle animé par Daniel de Torres, les représentants des villes ont eu la possibilité de faire part de leurs préoccupations communes et de poser des questions concrètes sur l’intégration. Cette partie de la réunion a montré une fois encore combien il était important pour les municipalités de partager leurs expériences, d’échanger sur leurs problèmes et de faire le point sur les bonnes pratiques et les enseignements du passé. C’était en soi, ont-ils conclu, une preuve de l’intérêt d’appartenir au réseau des cités interculturelles (national ou européen).

Conclusions

La table ronde des Cités interculturelles a été l’occasion pour les villes participantes de travailler ensemble sur les questions d’intégration, de replacer leur situation actuelle dans une perspective interculturelle, de partager des expériences et de définir des approches applicables pour répondre aux défis existants. A l’issue de la table ronde, les villes ukrainiennes ont fait part de leur intention de poursuivre leur participation au programme des Cités interculturelles et de continuer de mettre en œuvre activement le modèle urbain de l’intégration interculturelle avec l’aide d’experts du domaine et en utilisant les autres ressources disponibles du réseau. Les représentants des municipalités polonaises se sont engagés à poursuivre le travail d’intégration interculturelle en s’efforçant de surmonter les obstacles administratifs, tout en restant en contact avec Lublin, qui est la seule ville polonaise membre du réseau des Cités interculturelles. Il est apparu à l’ensemble des participants que faire partie du réseau des Cités interculturelles avait une utilité incontestable et que développer une coopération entre les cités et les réseaux interculturels dans les deux pays voisins serait un avantage.

par Kseniya Khovanova-Rubicondo et Anna Szadkowska-Ciężka

[1] Il convient de noter que du fait de la situation géographique de Lublin (est de la Pologne), la coopération avec l'Ukraine est l'une des priorités de la ville. Les Ukrainiens sont majoritaires parmi les migrants de Lublin et, compte tenu de la situation politique actuelle, l'intégration des nouveaux arrivants, qui demandent souvent le statut de réfugié, pose de nombreux défis.