Actualités 2010

Retour République tchèque : « Il faut garantir aux enfants roms une égalité dans l’éducation », déclare le Commissaire Hammarberg

Strasbourg, 22/11/10 – « Sur le terrain, pratiquement rien n'a changé en République tchèque depuis que la Cour européenne des droits de l'homme a estimé, il y a trois ans, que ce pays faisait preuve de discrimination envers les enfants roms en les scolarisant dans des établissements pour enfants handicapés mentaux. » C'est ce qu'a constaté le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Thomas Hammarberg, à l'issue d'une visite de trois jours en République tchèque. Selon lui, la mise en œuvre de cet arrêt décisif (D.H. et autres c. République tchèque) « prend un retard préoccupant, et il n'est pas du tout certain que cela soit sur le point de changer ».

Le Commissaire Hammarberg se félicite qu'un plan d'action en faveur d'une éducation inclusive pour tous les enfants, y compris les enfants roms, soit enfin en place. Les autorités tchèques ont également pris l'initiative louable d'établir des statistiques sur la situation des enfants roms en matière d'éducation. Cependant, alors que ces statistiques indiquent qu'au niveau national la probabilité pour un enfant rom d'être scolarisé dans un établissement spécialisé dispensant un enseignement de moins bon niveau est douze fois plus élevée que pour les autres enfants (la disproportion étant encore plus frappante dans certaines régions), « il est plus qu'évident que le temps est venu de passer à l'action concrète ».

Les autorités tchèques devraient maintenant fixer des objectifs clairs, mesurables et ambitieux en vue du transfert de ces enfants du système éducatif spécial au système ordinaire et d'une déségrégation générale dans le système scolaire. Sachant que des milliers d'enfants roms en République tchèque sont perdus chaque année pour le système éducatif ordinaire et condamnés à rester des citoyens de seconde zone, le Commissaire exhorte les autorités tchèques à faire en sorte que la rentrée de l'année scolaire 2011-2012 marque enfin un net changement de direction.

Les Roms demeurent les principales victimes de crimes haineux. Depuis quelques années, cependant, les autorités tchèques font preuve d'un plus grand volontarisme en ce qui concerne les enquêtes, les poursuites et les condamnations. Elles indiquent que, grâce à cette approche, les mouvements d'extrême droite sont devenus moins actifs. Selon le Commissaire, ces efforts doivent maintenant être poursuivis et développés, en tenant compte des normes du Conseil de l'Europe relatives à l'enregistrement des incidents racistes et au traitement des infractions à caractère raciste. Il est particulièrement important de veiller à ce que la lutte contre les crimes haineux ne se limite pas aux infractions commises par des membres de groupes extrémistes.

La situation des femmes – roms, pour la plupart – qui ont subi dans le passé une stérilisation en l'absence de consentement éclairé a connu une avancée en novembre 2009, quand le gouvernement tchèque a exprimé ses regrets à propos des cas de stérilisation illégaux. Néanmoins, en raison notamment des obstacles juridiques, des difficultés rencontrées pour réunir des preuves et de l'absence de mécanisme de règlement extrajudiciaire, ces femmes sont, en pratique, dans l'impossibilité d'obtenir réparation pour le traitement subi. « D'après les informations que j'ai pu recueillir, une seule femme a jusqu'à présent été en mesure de le faire », a déclaré le Commissaire Hammarberg, en soulignant la nécessité de remédier à cette situation.

Le Commissaire a également été informé que les amendements aux dispositions de la législation sanitaire relatives à la stérilisation et au consentement éclairé, attendus de longue date, seraient en principe adoptés au premier semestre 2011.

Le Commissaire Hammarberg juge préoccupant que l'antitsiganisme soit encore largement répandu dans la société tchèque, y compris dans le débat public et politique. Ce contexte accentue malheureusement les difficultés que rencontrent les Roms – celles déjà mentionnées et d'autres, notamment leur ségrégation dans des quartiers marginalisés, phénomène qui serait en augmentation, et le placement des enfants roms en institution.
Au cours de sa visite, le Commissaire Hammarberg s'est entretenu avec plusieurs hauts responsables, notamment le ministre de l'Intérieur, M. Radek John, le ministre des Affaires étrangères, M. Karel Schwarzenberg, le vice-ministre de la Justice, M. Marek Ženišek, le vice-ministre de l'Education, M. Ladislav Němec, et le vice-ministre de la Santé, M. Martin Plišek. Il a également rencontré des représentants du service des droits de l'homme du Bureau du gouvernement ainsi que la médiatrice adjointe, Mme Jitka Seitlová.

Par ailleurs, le Commissaire Hammarberg a eu des échanges de vues avec plusieurs organisations non gouvernementales et rendu visite à des communautés roms dans deux quartiers de Kladno.