Retour « La Bosnie-Herzégovine doit intensifier ses efforts pour établir une société plus juste »

Strasbourg, 29/03/11 – « L'héritage des violences passées continue de faire peser une menace sur la pleine jouissance des droits de l'homme, la démocratie et l'Etat de droit en Bosnie-Herzégovine. Bien que des progrès aient été accomplis, les autorités de tout niveau de ce pays doivent s'employer activement à mettre un terme à la discrimination, à encourager la réconciliation et à construire un pays qui reflète sa richesse multiethnique », a déclaré le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Thomas Hammarberg, qui publie aujourd'hui un rapport basé sur la visite effectuée dans ce pays du 27 au 30 novembre 2010.

Le Commissaire reste préoccupé par la discrimination persistante à l'égard des minorités nationales, soulignant que « les autorités doivent faire preuve d'une plus grande détermination à résoudre ce problème et s'assurer que les minorités nationales ont de réelles possibilités de représentation politique ». Par ailleurs, il regrette que la structure politique et institutionnelle du pays, complexe et composée de multiples niveaux, soit un obstacle à une jouissance équitable des droits économiques et sociaux de la part des différentes catégories de personnes vulnérables, en particulier pour les personnes handicapées, les civils victimes de guerre et les victimes de violences sexuelles liées à la guerre.

Le rapport souligne aussi la nécessité de renforcer la protection des Roms, en particulier dans les domaines où cette communauté est encore gravement désavantagée, comme l'éducation, l'emploi, les soins de santé et le logement. « Des solutions durables doivent être trouvées pour les Roms qui ont été déplacés de force du Kosovo* et qui vivent depuis des années en Bosnie-Herzégovine avec leur famille ».

La ségrégation et la discrimination largement répandues dans les écoles publiques de Bosnie-Herzégovine sont aussi un grave sujet de préoccupation. L'existence de systèmes éducatifs distincts et basés sur l'appartenance ethnique reste un obstacle aux retours durables. « Depuis ma visite de 2007, rien n'a été fait pour mettre un terme au système des « deux écoles sous un même toit ». Un curriculum-cadre commun respectant les spécificités de langue, culture et patrimoine de chaque peuple constituant devrait être adopté ».

La discrimination dans l'accès aux soins de santé, à l'assistance sociale et aux droits à la retraite, la lenteur des opérations de déminage et l'absence de suivi efficace des violences à motivation ethnique continuent de faire obstacle à un retour sûr et durable des personnes déplacées. « Plus de 7 000 personnes vivent encore dans des centres d'accueil collectifs et connaissent des conditions de vie extrêmement difficiles. Les autorités doivent fournir un logement adéquat aux personnes vulnérables vivant dans ces centres, y compris aux personnes âgées, et garantir l'accès à l'emploi et aux soins de santé. »

Le Commissaire insiste sur le fait qu'une véritable réconciliation interethnique en Bosnie-Herzégovine est impossible sans justice. Il encourage les autorités à renforcer leurs efforts pour mener des enquêtes et des poursuites efficaces sur les crimes de guerre, garantir aux victimes un accès à la justice et des recours efficaces au niveau du pays et leur accorder une réparation adéquate, effective et proportionnée.

Le Commissaire Hammarberg s'inquiète vivement de l'incapacité des autorités de Bosnie-Herzégovine à remplir leurs obligations internationales en matière de poursuite efficace des violences sexuelles liées à la guerre et à garantir une protection et une réparation adéquates aux victimes de tels actes. Il recommande aussi de veiller à ce que les victimes reçoivent un soutien psychologique et social adéquat et bénéficient de services d'orientation professionnelle.

De plus, le Commissaire encourage les autorités à améliorer considérablement le système de protection des témoins dans le cadre des procédures liées à la guerre et à mener promptement des enquêtes et des poursuites pour toutes les allégations de menaces ou d'intimidation de témoins.

Enfin, il recommande de poursuivre avec détermination les efforts visant à élucider les cas des quelque 10 000 personnes disparues en lien avec la guerre, de prendre des mesures efficaces pour protéger l'impartialité et l'indépendance des institutions judiciaires, d'adopter des mesures pour améliorer la protection des lesbiennes, gays, bisexuels et des personnes transgenres et de résoudre le cas des 220 policiers relevés de leurs fonctions à la fin des années 1990, en accordant une réparation appropriée à ceux qui en ont encore besoin.

Lire le rapport (anglais uniquement)

* « Toute référence au Kosovo dans le présent document, qu'il s'agisse de son territoire, de ses institutions ou sa population, doit être entendue dans le plein respect de la Résolution 1244 du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations Unies, sans préjuger du statut du Kosovo. »